Dossiers spéciaux

Site Internet pour cliniques

Une fenêtre utile et un outil pratique

Francine Fiore  |  2014-06-29

Est-ce que cela vaut la peine pour une clinique d’investir temps et argent dans un site Internet? Probablement. Cet outil offre différentes possibilités intéressantes et parfois à un coût très bas  : système de prise de rendez-vous pour les patients, affichage de renseignements utiles, visibilité, etc.

Dr Réjean Thomas

Le site Web de la clinique l’Actuel, centre spécialisé en infections transmissibles sexuellement et par le sang (ITSS), relève presque du cinéma (www.cliniquelactuel.com). On y voit de magnifiques photos, des médecins expliquant les différentes ITSS dans des vidéos, des informations sur la santé sexuelle dans un graphisme moderne, des couleurs vives.

Au départ, le but du site était de faire connaître la clinique et ses services, de démythifier les ITSS et de donner des renseignements sur ces infections. Mais, rapidement, le site est devenu un modèle dans son genre. Abordant tout ce qui touche de près ou de loin la santé sexuelle, il compte une vingtaine de vidéos d’environ trois minutes sur différents sujets, comme, la prévention des ITSS, le lymphogranulome vénérien, la prophylaxie après une relation sexuelle, la communauté lesbienne, gay, bisexuelle, transsexuelle et transgenre, etc. Ceux qui le préfèrent peuvent avoir ces informations sous forme écrite.

Le site Web de la clinique l’Actuel, centrespécialisé en infections transmissibles sexuellement et par le sang (ITSS), relève presque du cinéma (www.cliniquelactuel.com). On y compte environ 160 000 visiteurs par mois.

Toutes les données que contient le site Web sont revues régulièrement. Il s’agit d’un outil utile, estime le Dr Réjean Thomas, cofondateur et directeur de la clinique. « Par exemple, une personne nous téléphone en panique. Lorsqu’elle arrive à la consultation, elle est angoissée. On lui conseille donc de visiter le site avant de se présenter à la clinique. La plupart des gens peuvent voir, en cliquant sur l’onglet qui leur convient, si leur problème semble urgent ou non. »

On apprend même sur le site comment annoncer à son partenaire que l’on est séropositif. Un module intitulé : « Aviser vos partenaires » permet d’ailleurs d’envoyer une carte électronique anonyme avec un hyperlien : « Je tenais à t’en informer... Depuis notre dernière rencontre, j’ai reçu un diagnostic de Chlamydia. Tu devrais passer un test de dépistage. Fais attention à toi ! ». Il y a des messages pour le VIH, la gonorrhée, l’hépatite, l’herpès, etc. L’expéditeur et le destinataire sont les seuls à être au courant de la démarche. Aucune donnée n’est conservée. « La clinique médicale l’Actuel ne fait qu’offrir l’utilisation de son serveur. Aucune information à cet égard ne lui est accessible », précise le Dr Thomas.

La boîte à solutions est au centre de ce site magnifique qui attire les foules. « On y compte environ 160 000 visiteurs par mois », affirme Mme Audrey Benoît, présidente de l’entreprise. Quelque 50 % des visites viennent de France. Le site de l’Actuel est devenu la référence de la francophonie en matière d’ITSS, bien qu’il soit bilingue. Son coût total, qui était de 50 000 $ au début, a atteint environ 100 000 $ avec les différentes améliorations. Pour le maintenir, la clinique l’Actuel ne reçoit pas de subventions du gouvernement, mais uniquement des commandites de partenaires privés.

Un site fait maison

Si certains ont recours à des professionnels pour bâtir leur site Web, le Dr Claude Rivard, médecin de famille à la clinique des Hauts-Bois à Sainte-Julie, a conçu le sien lui-même il y a trois ans (www.gmfmd.ca). Pour ce faire, il a utilisé iWeb, un logiciel gratuit d’Apple. Il lui a fallu environ deux heures par jour pendant une semaine pour y arriver. Une fois créé, le site a été hébergé sur celui du fournisseur Internet de la clinique sans coût additionnel.

Relativement modeste, ce site maison comporte l’essentiel : la liste des médecins, les services offerts, les heures d’ouverture du service de consultation sans rendez-vous, etc. L’horaire de la vaccination antigrippale annuelle y est aussi annoncé. « Le patient peut ainsi voir si son médecin sera disponible ou s’il devra se faire vacciner par un autre clinicien », indique le Dr Rivard. Le site contient par ailleurs des conseils pratiques pour les patients avant la visite médicale. Par exemple, il indique la liste des médicaments à apporter, les frais pour certains services comme les documents pour un arrêt de travail, etc.

Dr Claude Rivard

L’objectif premier que le Dr Rivard avait en tête en créant son site était toutefois de permettre la prise de rendez-vous par Internet. Une fonction simple qui facilite le travail du personnel administratif. Le médecin a simplement placé sur son site les adresses courriel des secrétaires, ce qui permet aux patients d’entrer facilement en contact avec elles. Actuellement, près des deux tiers des communications entre les patients et le personnel se font par ordinateur. « Les communications par courriel sont plus faciles que celles par téléphone, indique le Dr Rivard. C’est moins long, il y a moins d’explications à donner et cela libère des lignes téléphoniques pour les patients qui en ont vraiment besoin. » Les courriels présentent également un autre avantage : le patient peut communiquer avec la secrétaire en dehors des heures ouvrables. Il reçoit une réponse automatique qui confirme que son courriel a été reçu et que la secrétaire y répondra le plus tôt possible.

Un site Web peut aussi être utile pour le recrutement. Si un jeune omnipraticien est intéressé par la clinique, d’un clic il peut connaître tous les services qu’elle offre et avoir accès à des photos. « Avant même de visiter les lieux, il voit d’une manière virtuelle à quoi ressemble le milieu de travail. »

« Lorsque les patients ouvrent la page, ils voient l’horaire de leur médecin de famille. Ils choisissent la journée qui leur convient en sélectionnant la case appropriée et reçoivent un courriel de confirmation. »

– Dre Renée Du Tremblay, à la Clinique médicale Alma

Un travail d’équipe

À la Polyclinique médicale Concorde, l’élaboration du contenu du site Web (www.polyconcorde.com) a été un travail d’équipe. « Nous avons fait un sondage auprès des professionnels de la clinique et revampé le site il y a un an et demi, dit le Dr Jacques Beauchamp, président de la polyclinique. Avoir un site Web est important pour les entreprises qui ont pignon sur rue. »

Dr Jacques Beauchamp

Sur le site de la polyclinique Concorde, on peut voir les services offerts, les coordonnées de la clinique et les liens avec d’autres sites qu’ont déjà certains groupes de médecins et d’autres professionnels de la santé. Ainsi, les patients peuvent regarder le nom du professionnel qu’ils veulent consulter, savoir comment prendre un rendez-vous avec lui, etc. Cet outil répond à plusieurs questions des patients. « Nous travaillons actuellement à la création d’un système de demande de rendez-vous en ligne, ce qui devrait permettre de simplifier la prise de rendez-vous et libérer des lignes téléphoniques. »

Des rendez-vous par ordinateur

La Clinique médicale Alma, elle, offre déjà sur son site Internet (www.cliniquemedicalealma.com) la prise électronique de rendez-vous. Les patients vont sur le site et s’inscrivent sur une fiche. « L’utilisation d’une fiche, comme pour l’inscription à un jeu, a pour objectif de protéger les utilisateurs, explique la Dre Renée Du Tremblay, médecin de famille à cette clinique. Ensuite, lorsque les patients ouvrent la page, ils voient l’horaire de leur médecin de famille. Ils choisissent la journée qui leur convient en sélectionnant la case appropriée et reçoivent un courriel de confirmation. On a déjà eu 140 prises de rendez-vous en moins d’une minute. » Par ailleurs, quand les résultats des examens qu’ont passés les patients arrivent, le personnel peut communiquer avec eux par courriel pour leur demander de prendre rendez-vous.

Environ le tiers des rendez-vous sont pris par Internet, car la clinique laisse la possibilité aux patients qui le souhaitent de téléphoner. La prise de rendez-vous électronique fonctionne bien, même pour les personnes âgées qui peuvent être inscrites avec le courriel d’un de leurs enfants ou d’un ami. « Ce système a d’ailleurs permis à une patiente de prendre rendez-vous alors qu’elle était en voyage en Inde », explique la Dre Du Tremblay. Bientôt, le site pourra même être employé pour les consultations sans rendez-vous par les patients qui ne sont pas inscrits au GMF.

Au départ, le site n’était qu’une page d’ouverture toute simple pour annoncer la Clinique médicale Alma. « Je ne voulais rien de complexe, explique la Dre Du Tremblay qui l’a conçue. Par la suite, avec l’aide du Dr Charles Fournier, nous avons travaillé pour adapter progressivement le site à nos besoins en collaboration avec deux informaticiens, son fils et un ami, qui ont conçu le logiciel. Aujourd’hui, environ 10 000 patients sont inscrits sur le site. »

Bonjour-santé

Pour les cabinets qui n’ont pas de site Internet permettant la prise de rendez-vous, il y a Bonjour-santé. Cette entreprise en technologie de l’information se spécialise dans la prise de rendez-vous dans le domaine de la santé. Elle offre ce service à des cliniques médicales dans tout le Québec ainsi que la gestion de listes d’attente pour les établissements de santé, les cliniques spécialisées, les GMF et les cliniques-réseau.

Certains médecins ou certaines cliniques choisissent de libérer leurs lignes téléphoniques et de permettre la prise de rendez-vous directement par ordinateur. « On offre des solutions aux cliniques individuellement », affirme Mme Annie Blanchette, vice-présidente de Bonjour-santé. Environ 125 cliniques bénéficient de nos services. » Le patient dont la clinique offre le service de rendez-vous par Internet va sur le site Web de Bonjour-santé, choisit son médecin, voit sa disponibilité et s’inscrit. Le rendez-vous lui est confirmé par courriel. Il peut aussi téléphoner.

Dre Annie Blanchette

Bonjour-santé permet aussi d’éliminer les files d’attente qui se forment devant les cliniques dès l’aurore. Au lieu de venir tôt le matin, les patients n’ont qu’à appeler Bonjour-santé. « Ils peuvent le faire même au milieu de la nuit, s’inscrire à la consultation du lendemain et se reposer en attendant le moment de se déplacer », explique Mme Blanchette. Le service est gratuit pour les consultations sans rendez-vous. Pour d’autres services, comme les rendez-vous pris par Internet, Bonjour-santé facture les cliniques.

Par ailleurs, si le patient téléphone à sa clinique pour voir rapidement un médecin et que c’est complet, il peut encore une fois aller sur bonjour-sante.ca. « On entend dire que les cliniques médicales sont toujours pleines, fait remarquer Mme Blanchette, mais il y a un taux élevé d’annulation, de sorte qu’il peut y avoir des disponibilités au milieu de la journée : une place qui se libère et que l’on peut offrir à un autre patient. » Une fois sur le site, le patient tape son code postal et une recherche est amorcée auprès de toutes les cliniques inscrites à Bonjour-santé. Le système va essayer de trouver une consultation le plus tôt possible et le plus près du domicile du patient. « On propose de un à trois choix, selon les disponibilités, dit Mme Blanchette. Si l’une de ces recherches convient au patient, des frais de 15 $ lui seront facturés. Ce que l’on fait payer c’est la recherche, car on ne peut pas vendre de rendez-vous ».

Au Collège des médecins du Québec, le Dr Yves Robert, secrétaire de l’organisme, estime qu’un service comme Bonjour-santé est utile. « Ce que je trouve déplorable c’est que le service public ne récupère pas ce modèle. Info-Santé est née de cette manière. C’était un service privé, une bonne idée qui a été reprise par le système public. »

Dr Yves Robert

Comme on peut le constater, le virage électronique offre d’intéressantes possibilités. Les avenues qu’il ouvre permettent même d’améliorer une partie des services de santé. De l’avis des médecins qui ont choisi d’avoir un site Web, cela devient un outil supplémentaire pour la bonne gestion de la clinique. //

Diagnostic, photos et Internet

Le Dr André Renaud, du centre médical de Saint-Lin–Laurentides, ne s’attribue pas la paternité de la technique qu’il utilise depuis environ un an. Néanmoins, il remarque que les patients apprécient énormément cette nouvelle possibilité qu’il leur offre. Très simplement, il s’agit pour les personnes qui ont une lésion qui les inquiète de la prendre en photo avec un téléphone intelligent et de la lui faire parvenir par courriel. Ce service est gratuit.

Selon le Dr Renaud, cette méthode est particulièrement utile pour les éruptions cutanées, notamment chez les enfants de 0 à 4 ans quand les parents se demandent s’il s’agit d’une scarlatine attrapée à la garderie, d’une éruption allergique ou d’autre chose.

« Comme les lésions sont plus évidentes les premiers jours de leur apparition, les parents prennent une photo immédiatement avec leur cellulaire et me l’expédient par courriel ou l’apportent à la visite médicale, raconte le Dr Renaud. Souvent quand ils arrivent, les lésions sont presque disparues, mais je peux les voir sur le téléphone. »

Cette technique est aussi pratique chez les adultes. « C’est particulièrement vrai dans les cas de psoriasis en goutte, d’urticaire, de lésions associées à un cancer basocellulaire ou spinocellulaire ou au mélanome qui pourraient nécessiter une biopsie. Il peut aussi s’agir d’une dermatite de contact causée par l’herbe à puce ou d’un zona. »

Selon le Dr Renaud, cette approche comporte peu de risques d’erreur, car aujourd’hui les téléphones intelligents ont une bonne résolution. Si le patient n’a pas de rendez-vous avant quinze jours, la photo permet de voir la phase initiale des vésicules.

Selon le Dr Renaud, il serait possible de créer un site Web où une infirmière classerait par priorité les cas dans un service de consultation sans rendez-vous. À son avis, toute cette approche contribue à une meilleure pratique. Environ les deux tiers des patients du médecin utilisent la photographie de lésions. « On a au moins 90 % de satisfaction », lance-t-il. Ce n’est donc pas une utopie que de penser que l’on pourrait traiter certaines maladies par Internet.

Le Collège des médecins du Québec ne voit pas d’inconvénient à l’utilisation de photographies par Internet. « Il faut cependant que le médecin connaisse bien son patient, qu’il ait l’information clinique appropriée et qu’il soit certain qu’il s’agit bien d’une photographie de la bonne personne, car il doit se placer dans le contexte clinique », précise le Dr Yves Robert, secrétaire du Collège. //