Questions... de bonne entente

Rémunération des activités médicoadministratives en établissement

les chefs et ceux qui les assistent

Michel Desrosiers  |  2014-08-05

Nous avons vu que le médecin rémunéré à l’acte ne peut généralement pas être payé pour ses activités médicoadministratives. Il y a toutefois des exceptions importantes qui méritent d’être abordées.

Chef de département clinique de médecine générale

Enfin une fonction pour laquelle une rémunération spécifique à l’acte est prévue. Cette rémunération ne vise toutefois que les centres hospitaliers qui exploitent un service d’urgence, exigence à laquelle répond la vaste majorité des centres hospitaliers.

Le Dr Michel Desrosiers, omnipraticien et avocat, est directeur des Affaires professionnelles à la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec.

Vous remarquerez qu’il est question de « centre hospitalier » et non de « centre de santé ». L'entente particulière date d’avant les fusions en CSSS et a été financée et conçue en fonction de la réalité hospitalière. Par conséquent, le taux de rémunération et l’évaluation de la charge de travail dépendent entièrement des activités hospitalières, à l’exclusion de celles qui sont liées à la vocation de CLSC ou de CHSLD intégrée à la mission du CSSS.

Seuls les médecins atteignant un certain seuil de revenu annuel sont retenus dans cette évaluation. Pour éviter des fluctuations importantes d’une année à l’autre (en raison, par exemple, d’une pénurie temporaire), les parties négociantes comptabilisent l’apport des médecins dépanneurs qui atteignent ce seuil.

Mode de rémunération à l’acte

Chaque centre hospitalier visé bénéficie d’un nombre prédéterminé de forfaits chaque année pour rémunérer les activités du chef. Ce nombre est mis à jour périodiquement, question de tenir compte de l’évolution des effectifs au sein de la mission hospitalière.

Le chef peut réclamer la totalité des forfaits ou les partager avec un ou des médecins qui l’assistent. Ces derniers peuvent avoir une responsabilité ciblée (comme faire l’horaire de garde) ou jouer le rôle de chef adjoint ou de chef de service (des soins intensifs, par exemple). Toutefois, le chef ne peut pas partager les forfaits de façon illimitée. Il doit en réclamer une portion minimale, généralement au moins 60 %. Dans certains milieux qui comptent plusieurs installations disposant d'urgences autonomes, ce pourcentage pourra être plus faible.

Malgré le mécanisme de conversion en heures dont il sera question dans quelques paragraphes, le médecin rémunéré à l’acte est payé sur base forfaitaire. Certaines années, il mettra plus de temps à sa tâche de chef et d’autres années moins, mais le nombre de forfaits alloués demeurera le même. Le chef n’a pas à calculer le nombre d’heures qu’il consacre à ses activités de chef ni à moduler sa facturation en fonction du travail à abattre.

 

Le taux de rémunération du chef de département clinique de médecine générale dépend entièrement des activités hospitalières, à l’exclusion de celles qui sont liées à la vocation de CLSC ou de CHSLD intégrée à la mission du CSSS.

Lorsque le chef change en cours d’année, les deux médecins en cause devront convenir d’un partage équitable. Autrement, le chef sortant pourrait laisser les caisses vides pour son successeur. En cas de désaccord entre les deux médecins, la RAMQ établit au prorata la banque de chacun en fonction de la durée de leurs mandats respectifs.

L’autre situation qui peut donner lieu à des questions est celle du chef payé en partie sur base de temps et en partie à l’acte. Supposons que la rémunération de ses activités en hospitalisation de courte durée (une semaine sur quatre) se fasse à l’acte, mais que celle des soins de longue durée soit à tarif horaire à raison de trois heures par semaine.

Aux yeux de l’entente particulière, ce médecin est rémunéré à l’acte et doit donc réclamer les forfaits de chefferie. Il ne devrait pas se servir de sa nomination à tarif horaire en soins de longue durée pour la rétribution de ses activités médicoadministratives de chef de département, bien qu’il puisse avoir recours à son tarif horaire pour des activités médicoadministratives liées à ses activités en soins de longue durée.

Enfin, du fait que la rémunération forfaitaire peut être réclamée n’importe quand au cours de l’année, la chef qui s’absente pour un congé de maternité, mais qui assure tout de même ses fonctions durant son congé, peut très bien réclamer les forfaits pour l’année entière. Durant les douze semaines où elle retire des allocations de congé de maternité de la RAMQ (pendant lesquelles elle ne peut recevoir de rémunération de la RAMQ), elle ne doit pas facturer de forfaits. Mais rien ne l’empêche de le faire avant ou après.

Mode de rémunération sur base de temps

Vous vous doutez déjà que le médecin rétribué sur base de temps qui occupe la fonction de chef de département peut être rémunéré à ce titre à honoraires fixes ou à tarif horaire. Une telle situation pourrait survenir si le chef du service de gériatrie active, payé à tarif horaire, devenait le chef de département. Comme il est rétribué entièrement à tarif horaire, il ne peut pas réclamer de rémunération forfaitaire à l’acte pour ses fonctions de chef. Du fait qu’il est en droit de facturer son temps, il serait alors payé en double.

En pareille situation, l’entente particulière prévoit que ce médecin peut bénéficier d’un dépassement des heures normalement payées à 100 %. Ces heures viennent s’ajouter aux 1540 heures par année et aux 880 heures de dépassement autorisées par le chef de département pour lesquelles le médecin est rémunéré sans réduction. Ainsi le médecin n'est pas rémunéré à un tarif réduit du fait que ses activités médicoadministratives comme chef l’amènent à dépasser les balises énoncées. L’entente lui permet donc d’effectuer jusqu’à 220 heures de plus à plein tarif. Elle ne cherche pas à lui accorder une rémunération forfaitaire pour ses activités.

Contrairement à celle du chef payé sur base forfaitaire, la rémunération du chef à tarif horaire fluctuera en cours d’année ou d’une année à l’autre en fonction de la charge de travail et des activités spécifiques qu’il doit accomplir comme chef.

Il n’obtiendra un avantage aux heures de dépassement que dans la mesure où ses activités de chef font en sorte qu’il excède les 1540 heures au plein tarif par année, en plus des 880 heures de dépassement aussi au plein tarif. Par conséquent, le chef rémunéré à tarif horaire qui ne dépasse pas 2420 heures durant l’année ne retire pas d’avantages aux modalités de l’entente particulière.

 

Le chef de département clinique de médecine générale rémunéré à forfait n’a pas à calculer le nombre d’heures qu’il consacre à ses activités de chef, ni à moduler sa facturation en fonction du travail à abattre.

Le mode de rémunération du chef d’un milieu ne sera pas nécessairement le même que celui de l’ensemble des médecins qui l’assistent. Il a ainsi fallu prévoir un mécanisme d’équivalence entre le nombre de forfaits et les heures de dépassement. Nous en avons déjà parlé, mais le sujet mérite d’être répété. Le facteur de conversion n’existe pas pour permettre au médecin rémunéré sur une base forfaitaire de juger s’il a travaillé assez pour réclamer l’ensemble des forfaits. Le médecin rémunéré à l’acte bénéficie d’un traitement forfaitaire. Il n’a donc pas à justifier un nombre spécifique d’heures de travail.

Lorsque le chef est entièrement rétribué sur base de temps, les forfaits accessibles aux médecins qui l’assistent sont limités selon une formule de conversion qui prévoit que chaque forfait correspond à 0,71 heure. Dans la plupart des milieux (ceux ayant une seule installation hospitalière), la part des forfaits qui peut ainsi être partagée est de 40 %. Le mécanisme fonctionne aussi dans l’autre sens, soit lorsque le chef payé à l’acte se fait aider par un médecin rémunéré sur base de temps (voir le tableau pour des exemples).

Notez que le mécanisme de partage entre le chef et les médecins qui l’assistent fixe un minimum à la proportion des forfaits qui sont réservés au chef. Bon nombre de chefs s’attribuent l’ensemble des forfaits. Il s’agit d’une question qui doit être gérée localement.

Le tableau contient un exemple du partage possible lorsque le chef ou un médecin qui l’assiste est rémunéré sur base de temps.

Tableau

Distinction avec chef de CHSLD ou de CLSC

Depuis les fusions en CSSS, il est courant pour un chef de département de médecine générale d’être responsable de la gestion de l’équipe médicale de CHSLD ou de CLSC intégrés au CSSS. Or, nous avons vu que la rémunération du chef de département est fonction du nombre de médecins exerçant dans la mission hospitalière seulement.

Cette lacune sera sûrement corrigée ultérieurement. Cependant, pour l’instant, la rémunération du chef ne tient pas compte de cette charge additionnelle de travail. Tant que les médecins dans ces autres milieux seront rétribués à tarif horaire, ils ne réclameront probablement pas de compensation pour l’assistance qu’ils apportent au chef. Mais advenant qu’un assistant au sein du CHSLD passe au mode à l’acte, il ne sera plus rémunéré pour ses activités médicoadministratives. Il pourrait alors demander de bénéficier d’une compensation par le partage de la rémunération du chef de département. Ce dernier devra décider de l’attitude à adopter. Rien ne lui interdit de partager les forfaits (dans les limites énoncées par l’entente particulière), mais comme le nombre de forfaits attribué ne tient pas compte du nombre de médecins exerçant dans ces autres milieux, rien ne l’y oblige non plus.

 

Le chef de département clinique de médecine générale rémunéré à tarif horaire ne bénéficie pas d’une rémunération forfaitaire, mais plutôt d’un mécanisme évitant qu’un quantum d’heures excédentaires ne fasse l’objet d’une réduction.

Chef de l’urgence

Une rémunération forfaitaire existe aussi pour le chef de l’urgence. Le mode de rémunération étant plus homogène à l’urgence que dans les multiples services d’un département de médecine générale, rien n’est prévu pour le médecin rémunéré sur base de temps.

Mode de rémunération à l’acte

Le nombre de forfaits alloué dépend de la catégorisation de l’établissement, sans égard au nombre de médecins qui exercent à l’urgence. Un mécanisme de partage entre le chef et les médecins qui l’assistent est également prévu, mais le chef doit obligatoirement se prévaloir d’une proportion minimale des forfaits accordés. Lorsque l’établissement compte plus d’une urgence distincte, les forfaits de chacun sont cumulés pour l’établissement et le pourcentage que le chef peut partager est plus important. Pour en savoir plus, voyez le paragraphe 4.03 de l’entente particulière.

Parfois, le chef de l’urgence est aussi celui qui assume les fonctions de chef de département de médecine générale. Il ne peut alors réclamer plus de la moitié des forfaits accordés pour le chef de l’urgence, en plus de sa rémunération comme chef de département clinique de médecine générale.

Enfin, dans certains milieux, le chef de l’urgence est un spécialiste en médecine d’urgence et se trouve donc rémunéré par l’entente FMSQ-MSSS. Dans ces situations, les omnipraticiens qui assistent le chef peuvent se prévaloir d’une partie de sa rémunération par l’entremise du mécanisme de partage. Toutefois, la part partageable tient compte du poids des spécialistes en médecine d’urgence par rapport à l’ensemble des effectifs de l’urgence. Lorsque cette proportion est faible, il n’y a pas d’ajustement aux forfaits qui peuvent être partagés. Cependant, lorsqu’elle dépasse le quart, la moitié ou les trois quarts, le nombre de forfaits que l’omnipraticien qui assiste le chef peut réclamer est progressivement réduit du tiers, des deux tiers ou de la totalité, respectivement.

Médecin responsable d’une UMF

Le médecin responsable d’une UMF bénéficie aussi d’une rémunération forfaitaire annuelle pour ses activités qu’il peut partager avec d’autres médecins qui l’assistent (voir le paragraphe 8.00 de la section II de l’entente particulière sur le médecin enseignant). Il n’y a pas de mécanisme de conversion en heures de dépassement même si la rémunération au sein d’une UMF se fait obligatoirement sur base de temps.

On peut donc supposer que le chef de l’UMF et les médecins qui l’assistent dans ses fonctions rempliront ces tâches en dehors d’une période autrement rémunérée à tarif horaire.

Médecin responsable d’un GMF

Le médecin responsable d'un GMF bénéficie aussi d’une rémunération forfaitaire, mais qui est hebdomadaire sans mécanisme de partage. Lorsqu’un médecin responsable se fait aider ou remplacer temporairement par un autre médecin du GMF, il devra convenir avec ce dernier de qui d’entre eux réclamera la rémunération forfaitaire et pour quelles semaines.

Le forfait s’applique sans égard au mode de rétribution du médecin responsable. Tout comme en UMF, on peut supposer que le médecin responsable en CLSC ou en UMF (et donc payé sur base de temps) remplira ses fonctions médicoadministratives en dehors des périodes comptabilisées à tarif horaire.

Chef de DRMG

Une rémunération forfaitaire est prévue pour le chef du DRMG, mais il n'y a pas de mécanisme de partage. Les forfaits sont hebdomadaires, mais la gestion en est annuelle. Advenant que le chef change en cours d’année, la RAMQ restreint la facturation de chacun de façon à ce qu’elle corresponde à leur durée de nomination respective.

Aux fins d’application de l’Annexe XII, l’agence dont relève le DRMG est censée être un centre hospitalier. Ainsi, lorsqu’elle se trouve en territoire désigné, le taux de rémunération du chef sera majoré du taux applicable en milieu hospitalier. Dans une région comportant à la fois une portion désignée et non désignée, le chef qui exercerait ses activités en région désignée pourrait s’estimer désavantagé du fait qu’il serait alors rémunéré à taux réduit pour les forfaits, bien qu’il puisse effectuer une bonne partie des services à partir de son lieu d’exercice régulier et non dans la ville de l’agence. C’est un désavantage possible de la formule forfaitaire dans ce contexte.

Médecin nommé au DRMG

La rémunération des médecins élus au comité de direction du DRMG, autres que le chef, est à tarif horaire. Le chef ne peut s’en prévaloir, sauf pour des mandats spécifiques comme médecin-conseil, qui doivent alors être distincts de ceux de chef.

Certains DRMG sont appelés à gérer des territoires étendus dont une partie est désignée. Souvent, les réunions du comité de direction ont lieu dans la partie non désignée du territoire. Le taux de majoration applicable est ainsi celui de la région où se tient la réunion, ce qui peut sembler injuste au médecin qui exerce normalement en région désignée et qui se rend hors région pour participer à des réunions.

À quand des améliorations ?

Pour ceux qui bénéficient d’une rémunération pour les activités médicoadministratives, la demande est plus fréquemment de majorer celle-ci pour tenir compte de leur pleine charge de travail. Vous êtes nombreux à demander quand une rémunération générale pour les activités médicoadministratives verra le jour et mettra l’ensemble des médecins, sans égard à leur mode de rémunération, sur un pied d’égalité. La réponse n’est pas simple, d’autant plus que des coûts considérables pourraient y être rattachés. La conjoncture ne permet pas d’annoncer un échéancier pour revoir les modalités existantes ni pour convenir d’une rémunération générale pour les activités médicoadministratives. Il s’agira sans doute de questions importantes lors du renouvellement de l’entente, mais on peut difficilement en dire plus pour l’instant.

 

Le chef de département clinique de médecine générale peut partager sa rémunération avec un médecin qui l’assiste et qui exerce en CHSLD ou en CLSC, mais rien ne l’y oblige du fait que le taux de rémunération ne tient pas compte du nombre de médecins exerçant dans ces autres milieux.

Conclusion

Pour ceux qui se questionnent sur leur accès à une rémunération comparable à celle qui a récemment été convenue par la FMSQ avec le MSSS pour les activités médicoadministratives, la présente série d’articles apporte une réponse simple. Pour ceux qui peuvent se prévaloir d’une rémunération prévue pour certaines fonctions énumérées, espérons que les précisions vous auront permis de mieux comprendre ce qui existe et d’en bénéficier, tout en en respectant les limites.

Nous traiterons sous peu du rôle du médecin dans la rédaction d’attestations médicales de tout genre. À la prochaine ! //