Questions... de bonne entente

Compensation pour les frais de cabinet

erreurs fréquentes de facturation

Michel Desrosiers  |  2015-01-30

À l’automne 2014, un très grand nombre de médecins ont fait l’objet de récupération des montants réclamés en 2011, 2012 et 2013 pour la compensation des frais de cabinet. Une vérification est à venir d’ici l’été pour la facturation de l’année civile 2014. La majorité des coupures résultent d’erreurs lors de la facturation des services ou de la compensation. Nous vous présentons donc une liste des différentes erreurs qui ont été constatées.

Le Dr Michel Desrosiers, omnipraticien et avocat, est directeur des Affaires professionnelles à la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec.

Cadre général

Depuis l’introduction de la mesure de compensation pour les frais de cabinet le 1er novembre 2011, la RAMQ n’avait pas fait de validation automatisée. Elle devait d’abord mettre au point les outils informatiques pour effectuer les validations requises, mais devait aussi composer avec les nombreuses modifications apportées aux règles d’application, question de tenir compte de différentes réalités.

C’est pour cette raison qu’il a fallu attendre plus de deux ans après le début de la mesure pour que le médecin reçoive une rétroaction sur la conformité de sa facturation. Même s’il aurait été préférable que la rétroaction survienne plus tôt, nous devons composer avec la réalité existante.

Pour les années à venir, il faut aussi savoir que la RAMQ ne vérifiera pas la conformité des frais de cabinet en continu, car elle doit attendre la fin du délai de transmission de la facturation des services avant de valider la facturation d’une journée donnée. Cette réalité impose un délai d’au moins 90 jours par rapport à la facturation des services quotidiens. Par conséquent, la RAMQ a choisi d’effectuer le contrôle « en lot » pour l’ensemble d’une année civile, soit une fois par année au printemps. La validation pourrait se faire deux fois par année par la suite. Il faut donc s’habituer à ce que la rétroaction survienne avec un certain retard.

Pour vous aider à trouver ce qui peut expliquer des refus de paiement pour la facturation de la compensation de frais de cabinet, nous dressons une liste de ce qui motive le plus fréquemment les refus. Le tableau résume cette information et les solutions possibles. Grâce à la connaissance intime que vous avez de votre pratique, vous devriez être en mesure de repérer le problème et d’éviter de refaire les mêmes erreurs qui donneraient lieu à de nouvelles coupures à l’avenir.

Évaluation « par lieu »

Il ne faut pas oublier que lors de la validation du nombre de patients inscrits vus dans la journée par le médecin, la RAMQ procède « par lieu d’exercice ». Le médecin qui exerce dans deux lieux peut donc voir plus de douze patients inscrits au total dans sa journée, mais ne pas avoir le nombre requis dans un ou dans l’autre lieu. Une partie des refus pour les frais de cabinet est liée au fait que l’évaluation est faite par lieu.

La RAMQ peut découvrir un lieu grâce aux codes de lieu (localité ou site) correspondants. Si vous n’utilisez pas le code de lieu pour l’ensemble des services rendus le même jour, la RAMQ scindera votre facturation aux fins de vérification des frais réclamés. La situation semble survenir plus fréquemment pour les visites à domicile.

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La RAMQ effectue le contrôle de la facturation de la compensation pour les frais de cabinet « en lot » pour l’ensemble d’une année civile, une fois par année en mai.

Erreurs lors de la facturation des visites à domicile

Les visites au domicile des patients inscrits auprès d’un médecin qui exerce en cabinet sont comptabilisées aux fins de la mesure. Toutefois, la RAMQ doit pouvoir établir le lien entre le lieu de la visite et le cabinet du médecin (s’il s’agit du lieu de suivi habituel). Une limitation de la RAMQ et deux erreurs de facturation peuvent causer des problèmes.

Facturation avec le code de ville

D’abord, il faut savoir que si vous facturez l’ensemble de vos services avec le code de ville (localité) (au lieu du numéro spécifique attribué au cabinet), la RAMQ regroupera les visites à domicile effectuées dans la même ville, mais non celles qui ont été faites dans une ville voisine. La RAMQ traite les visites à domicile dans une autre ville comme s’il s’agissait d’un autre lieu de pratique.

Si cette limitation pose problème en raison de la situation géographique de votre cabinet, vous pouvez demander à la RAMQ de vous accorder un numéro de facturation pour votre pratique en cabinet. Vous devriez alors pouvoir réclamer l’ensemble de votre facturation à l’aide de ce numéro, comme le font les médecins en GMF ou ceux qui ont constitué un groupe de pratique au sein de leur cabinet. Le seul inconvénient possible serait de ne pas fidèlement traduire le lieu de la visite lorsque certaines villes font l’objet d’une rémunération majorée en territoires désignés.

Facturation avec un numéro de cabinet

Dans un cabinet GMF ou dans un lieu de pratique qui s’est vu attribuer un numéro spécifique, vous devez utiliser ce numéro pour la facturation autant des services au sein de la clinique que des visites à domicile. Si vous employez le code de ville pour la facturation des visites à domicile, la RAMQ traitera ces visites comme si elles avaient été effectuées dans un autre lieu, ce qui risque de nuire à l’atteinte de votre seuil quotidien.

Limitations de la pratique de groupe avec un numéro spécifique au cabinet

Si vous employez assidûment le code spécifique attribué à votre cabinet au moment de votre facturation, il peut rester un dernier problème à régler si vous voyez à domicile des patients de vos collègues. Sur le formulaire d’inscription de vos patients, vous devez indiquer leur lieu habituel de suivi. Vous pouvez le modifier selon l’évolution de la situation. Si vous indiquez que le lieu habituel de suivi d’un patient est son domicile, ce patient ne pourra être retenu aux fins de la compensation des frais de cabinet lorsqu’un de vos collègues voudra le compter comme patient inscrit dans le cadre de la pratique de groupe. Si le suivi se fait dans le cadre de vos activités de cabinet et que le patient peut parfois consulter au cabinet, vous devriez modifier le fichier d’inscription sur le site de la RAMQ pour indiquer que le lieu de suivi habituel est le cabinet en y précisant le code spécifique.

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Une partie importante des problèmes d’évaluation est liée au fait que l’évaluation est faite « par lieu », et non par cabinet.

Erreurs lors de la facturation de services de consultation sans rendez-vous

Facturation des services sans rendez-vous en GMF

Les règles particulières qui s’appliquent aux services de consultation sans rendez-vous en GMF peuvent poser une autre difficulté. Comme plusieurs GMF ne limitent pas l’accès à leurs seuls patients inscrits, la disponibilité qu’ils offrent au service de consultation sans rendez-vous aux patients sans médecin de famille peut réduire la disponibilité qu’ils proposent à leur clientèle. Pour éviter de pénaliser les médecins dans ces situations, le statut (inscrit ou non inscrit) du patient n’est pas vérifié durant ces plages, et le seuil donnant droit à la compensation de frais de cabinet est plutôt rehaussé à dix ou à vingt par jour. Vous n’avez pas à indiquer de modificateur lors de votre facturation pour identifier les services de consultation sans rendez-vous. Vous devez toutefois inscrire le modificateur 160 lors de votre facturation du soutien aux frais de cabinet.

Lorsque vous rendez des services sur rendez-vous, vous n’avez pas à indiquer de modificateur lors de votre facturation du soutien aux frais de cabinet. La RAMQ évaluera alors l’admissibilité à la compensation des frais de cabinet selon les seuils de six ou douze patients inscrits.

Lorsque vous assurez des services sur rendez-vous pendant une partie de la journée (le matin) et des services sans rendez-vous durant une autre partie (l’après-midi), vous devrez possiblement scinder votre facturation du montant de compensation : un montant réduit (code 19928) pour le matin et un deuxième montant réduit pour l’après-midi. Dans l’exemple donné, la facturation du premier forfait ne portera pas de modificateur et celle du deuxième forfait, le modificateur 160.

Particularités de facturation en clinique-réseau

Le médecin qui pratique en clinique-réseau (qu’il s’agisse ou non d’un GMF) doit employer des modificateurs différents. Lorsqu’il exerce au service de consultation sans rendez-vous dans le milieu désigné de la clinique, il doit se servir du modificateur 176 pour la facturation des services, mais non pour celle de la compensation pour les frais de cabinet. Toutefois, lorsqu’il prodigue des services sur rendez-vous, il doit systématiquement employer le modificateur 180 lors de sa facturation des services. Retenez toutefois que les modificateurs 176 et 180 ne doivent jamais être indiqués lors de la facturation de la compensation pour les frais de cabinet.

Comme nous l’avons décrit précédemment, lorsque vous prodiguez le même jour des services sur rendez-vous et sans rendez-vous au sein de la clinique-réseau, vous pouvez devoir scinder votre facturation de la compensation pour frais de cabinet pour en tirer le plein avantage. Vous pourriez alors réclamer deux fois le code 19928 pour vos activités en clinique-réseau.

 

Tableau

 

La RAMQ valide de façon indépendante la facturation de la compensation pour les frais de cabinet en fonction des modificateurs correspondant à la facturation quotidienne des services dans la clinique, comme s’il s’agissait de lieux distincts. Ça peut paraître contre-intuitif, mais c’est le seul moyen choisi par la RAMQ pour appliquer deux règles de validation distinctes dans ce genre de milieu.

Le cas particulier des rendez-vous d’appoint

Certains médecins en GMF se demandent quoi faire lorsqu’ils attribuent des rendez-vous d’appoint parmi leurs rendez-vous réguliers. Il ne s’agit pas alors d’un service de consultation sans rendez-vous, mais bien de vos activités habituelles. À moins de couvrir une plage horaire consacrée aux services sans rendez-vous (en GMF ou en clinique-réseau), vous ne devriez avoir recours à aucun des modificateurs spécifiques dont nous venons de discuter. Si vous le faites quand même, vous réduirez d’autant le nombre de patients inscrits que vous avez vus sur rendez-vous et limiterez ainsi votre accès à la mesure de soutien.

Erreurs liées à la pratique de groupe permettant le partage des suppléments de vulnérabilité

Patients inscrits vulnérables et non vulnérables

Un premier problème lié à la pratique de groupe vient de l’information transmise par les préposés de la RAMQ concernant les patients non vulnérables. Certains médecins se seraient ainsi fait dire que seuls les patients vulnérables inscrits auprès d’un collègue du groupe étaient comptabilisés aux fins de la compensation des frais de cabinet. Cette information est erronée, l’ensemble des patients inscrits étant comptabilisé.

Il ne s’agit donc pas à proprement parler d’une erreur de facturation des médecins. La RAMQ nous indique que la comptabilisation de ces patients s’est faite correctement. Si jamais ça ne semble pas être le cas pour vous, n’hésitez pas à le signaler à la Fédération.

Selon le lieu de visite ou de suivi habituel

L’autre problème est inhérent aux limites propres à cette mesure. La pratique de groupe est reconnue par la RAMQ sur un seul lieu. De façon générale, la possibilité de faire compter un patient d’un collègue comme étant inscrit aux fins de la mesure de compensation se limite donc aux patients inscrits auprès de ce collègue au même endroit. Il doit s’agir du lieu de suivi habituel indiqué sur la fiche d’inscription du patient à la RAMQ.

Néanmoins, le GMF multisite fait l’objet d’un traitement particulier. Tous les médecins du GMF qui inscrivent des patients et en assurent le suivi peuvent s’inscrire dans chacun des groupes de l’ensemble des lieux. Ainsi, l’ensemble des patients vulnérables des collègues, qu’ils aient été inscrits sur le lieu en cause ou dans un autre, seront retenus comme étant inscrits aux fins de la mesure de compensation.

Il faut donc tenir compte de ces limitations ou de ces réalités quand vient le temps d’établir le nombre quotidien de patients inscrits aux fins de la mesure de compensation.

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N’hésitez pas à avoir recours au comité paritaire si la correction de votre situation semble impossible ou exige des efforts démesurés.

Erreurs liées au processus d’inscription

« Enregistrement » ou « transmission » des inscriptions

Vous êtes nombreux à utiliser le site de la RAMQ pour gérer vos inscriptions en ligne. Lorsque vous entrez les informations requises dans les cases prévues, vous devez ensuite appuyer sur un des deux boutons au bas de la page d’inscription ou de modification d’inscription, soit « Enregistrer » ou « Transmettre ». Le premier permet d’enregistrer les données dans le système de gestion, mais n’entraîne pas la transmission de l’information à la RAMQ. Votre clientèle n’est donc pas inscrite et ne sera, par conséquent, pas retenue par la RAMQ aux fins de validation du soutien aux frais de cabinet. Elle ne sera pas retenue non plus pour le versement des divers forfaits d’inscription versés chaque année ni pour le paiement forfaitaire pour la modulation des inscriptions.

Si vous n’êtes pas certain de l’état de vos inscriptions, repassez la liste produite par la RAMQ et comparez-la avec votre liste interne. Et assurez-vous de cliquer sur le bouton « Transmettre » lorsque vous inscrivez des patients ou que vous effectuez des modifications à une inscription existante.

Notez que lorsque vous mettez fin à une inscription, vous devez indiquer une date de fin sur la fiche d’inscription et utiliser le bouton « Fermer ». Seuls les services subséquents seront touchés. L’utilisation du bouton « Supprimer » annule l’inscription du patient pour les trois dernières années. Cette action peut donc avoir des conséquences sur le calcul de la compensation des frais de cabinet, mais aussi sur le versement des différents forfaits annuels qui dépendent de vos inscriptions.

Pratiques reconnues par le comité paritaire

Certains médecins ont une pratique qui ne repose pas sur la prise en charge et le suivi et peuvent donc avoir de la difficulté à atteindre le nombre quotidien de patients inscrits. Ceux qui se sont adressés au comité paritaire peuvent avoir fait reconnaître leur pratique aux fins de la mesure (ce comité paritaire relève de la Direction de la régionalisation et de la planification). Le seuil applicable peut avoir été réduit ou rehaussé, tout comme le statut requis des patients (inscrit ou non inscrit).

Pour donner suite à ce traitement particulier, la RAMQ doit être en mesure d’appliquer les validations retenues. À cette fin, le médecin qui exerce de telles activités doit obtenir un numéro identifiant le cabinet en cause (s’il n’en a pas déjà un) et l’utiliser systématiquement lorsqu’il rend des services et qu’il réclame la compensation pour les frais de cabinet. Ce code remplace le code de ville. Il ne s’agit pas du « numéro de groupe » pour le paiement des honoraires du médecin. À défaut, la RAMQ appliquera les règles habituelles de validation et refusera vraisemblablement les services du fait que vous n’atteignez pas le seuil de patients inscrits. Si vous employez le code seulement pour facturer la compensation, la RAMQ ne trouvera pas de services correspondants sur le même lieu et refusera le paiement de la compensation.

Bref, si vous êtes un des médecins visés par ce traitement particulier, assurez-vous d’avoir systématiquement recours au code du cabinet.

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En lien avec des activités sans rendez-vous en GMF, vous devez utiliser le modificateur 160 pour votre facturation du soutien aux frais de cabinet (mais non pour celle des services).

Corriger le passé

Avec ces informations, vous devriez être à même de comprendre pourquoi vous faites l’objet de coupures. Dans certains cas, vous serez en mesure de corriger vos erreurs de facturation et de récupérer les paiements coupés. Dans d’autres, vous devrez vous rendre à l’évidence que votre calcul du nombre de patients était erroné et vous résigner à réclamer un montant moindre que celui auquel vous croyiez avoir droit.

Parfois, le volume de corrections à effectuer peut sembler insurmontable ou les erreurs passées ne peuvent être corrigées (ex. : problèmes liés à la transmission des inscriptions, facturation de visites à domicile avec un code de ville problématique). Vous devriez songer à communiquer avec le représentant de la Fédération au sein du comité paritaire responsable d’assurer la gestion de cette mesure, soit le Dr Serge Dulude. Il sera à même de juger si une intervention de la part du comité paritaire peut atténuer ou régler votre problème.

Dans la prochaine chronique, nous reprendrons notre discussion sur les limitations des assurances « interruption et annulation de voyage » offertes par les émetteurs de cartes de crédit. À la prochaine ! //