Droit au but

Le rôle des infirmières en première ligne

comment partager efficacement les responsabilités ? – I

Christiane Larouche  |  2015-03-31

Les problèmes d’accessibilité dont les causes sont complexes et multifactorielles mettent en relief l’importance de replacer le patient au centre des préoccupations. Comment rendre à ce patient les soins les plus appropriés, au moment opportun, par la bonne personne et au meilleur endroit ? Pour mieux répondre aux besoins des patients, plusieurs médecins de première ligne ont intégré des infirmières dans leur milieu (GMF ou non GMF) et s’engagent à construire un contexte de pratique favorisant une collaboration et une coordination accrues.

Me Christiane Larouche, avocate, travaille au Service juridique de la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec.

Travailler en équipe avec une infirmière suppose avant toute chose de connaître le champ d’exercice des infirmières pour partager adéquatement les responsabilités. Mais le médecin connaît-il les différences entre l’infirmière auxiliaire, l’infirmière, l’infirmière clinicienne et l’infirmière praticienne spécialisée (IPS) en première ligne ? Sait-il comment mettre à profit les compétences de chacune dans son milieu ?

Si elles ont en commun le titre d’infirmière, l’infirmière auxiliaire, l’infirmière, l’infirmière clinicienne et l’IPS n’ont pas la même formation, le même champ d’exercice professionnel, les mêmes activités réservées ou autorisées ni les mêmes compétences. Le médecin doit donc s’y retrouver pour bien comprendre le rôle que peut jouer chaque type d’infirmière dans une équipe de soins de première ligne. Dans cette première partie, nous éclaircirons le rôle de l’infirmière auxiliaire.

L’infirmière auxiliaire

L’infirmière auxiliaire est membre de l’Ordre des infirmières et infirmiers auxiliaires du Québec qui lui délivre un permis d’exercice.

Formation

Elle possède un diplôme d’études professionnelles (de niveau secondaire), totalisant 1800 heures, soit deux ans à temps complet. La durée totale des stages en milieux de travail est de vingt-huit semaines, soit 855 heures de stage à temps complet. Les stages s’effectuent généralement en milieu hospitalier, mais certains peuvent l’être en CHSLD, en CLSC ou dans un autre milieu de soins de santé. Des pro­grammes de perfectionnement sont par la suite offerts, notam­ment en soins palliatifs. La candidate peut également poursuivre ses études au niveau collégial en vue d’obtenir un DEC et devenir infirmière.

Son champ d’exercice et ses activités réservées

Il y a près de quinze ans, les infirmières auxiliaires étaient principalement présentes dans le milieu de soins de longue durée. Cependant, avec l’élargissement de leur champ d’exercice et l’intégration de nouvelles fonctions et respon­sabilités, elles œuvrent maintenant dans tous les grands sec­teurs de la santé, notamment dans les cliniques médicales.

Le champ d’exercice et les activités réservées de l’infirmière auxiliaire sont prévus au Code des professions. Suivant l’article 37p, le champ d’exercice de l’infirmière auxiliaire se définit comme suit :

« Contribuer à l’évaluation de l’état de santé d’une personne et à la réalisation du plan de soins, prodiguer des soins et des traitements infirmiers et médicaux dans le but de maintenir la santé, de la rétablir et de prévenir la maladie et de fournir des soins palliatifs. »

Les neuf activités de l’infirmière auxiliaire autorisées par le Code des professions sont les suivantes :

1. appliquer des mesures « invasives » d’entretien du matériel thérapeutique. Exemples : entretien des cathéters, tubes, drains ou stomies ;

2. effectuer des prélèvements, selon une ordonnance. Ex­emples : ponction capillaire, urine, selles, expectorations, sécrétions (conjonctive, vagin, gorge, oreilles, nez, plaie) ;

3. prodiguer des soins et des traitements liés aux plaies et aux altérations de la peau et des téguments, selon une ordonnance ou selon le plan de traitement infirmier. Ex. : faire ou enlever des pansements humides ou secs, appliquer des pansements de rapprochement, enlever des sutures ou des agrafes ;

4. observer l’état de conscience d’une personne et surveiller ses signes neurologiques. Ex. : collecter les données objectives et subjectives ;

5. mélanger des substances en vue de compléter la préparation d’un médicament, selon une ordonnance ;

6. administrer, par des voies autres que la voie intraveineuse, des médicaments ou d’autres substances, selon une ordonnance ;

7. contribuer à la vaccination dans le cadre d’une activité découlant de l’application de la Loi sur la santé publique. Ex. : après une évaluation du patient par l’infirmière, l’infirmière auxiliaire peut préparer et injecter des produits immunisants. Un délai maximal de deux heures est permis entre l’évaluation de l’infirmière et la vaccination par l’infirmière auxiliaire. Il est à noter que l’infirmière auxiliaire ne peut être seule au moment de la vaccination. Une infirmière ou un médecin doit être présent sur les lieux ;

8. introduire un instrument ou un doigt, selon une ordonnance, au-delà du vestibule nasal, des grandes lèvres, du méat urinaire, de la marge de l’anus ou d’une ouverture artificielle du corps humain. Ex. : cathétérisme vésical ou curetage rectal ;

9. introduire un instrument, selon une ordonnance, dans une veine périphérique à des fins de prélèvement, lors­qu’une attestation de formation lui est délivrée par l’Ordre des infirmières et infirmières auxiliaires du Québec. Ex. : prélèvements sanguins.

Tableau

Comme le révèlent les activités réservées qui précèdent, l’infirmière auxiliaire doit avoir une ordonnance pour poser un geste à l’égard d’un patient. Il doit s’agir d’une ordonnance individuelle, car l’infirmière auxiliaire ne peut pas exécuter une ordonnance collective (tableau).

De plus, contrairement aux autres infirmières, l’infirmière auxiliaire ne peut évaluer l’état de santé d’une personne de façon autonome. Elle doit agir en collaboration avec le médecin ou l’infirmière dont le champ d’exercice consiste « à évaluer l’état de santé d’une personne, à déterminer et à assurer la réalisation du plan de soins et de traitements in­fir­miers ». Pourquoi ? Parce que la notion d’évaluation implique de porter un jugement clinique sur la situation d’une personne à partir des informations dont le profession­nel dispose et de communiquer les conclusions de ce juge­ment. Cela dit, l’infirmière auxiliaire peut apporter une contri­bu­tion utile en colligeant des renseignements en vue de per­mettre au médecin ou à l’infirmière de procéder à l’évaluation par la suite.

Figure

On comprend d’ores et déjà l’importance de tenir compte de ces limites dans le partage des responsabilités. La figure donne cependant une bonne idée de la contribution concrète d’une infirmière auxiliaire dans une équipe collaborative en première ligne. La collaboration entre infirmière auxiliaire et infirmière peut être particulièrement intéressante pour maximiser l’efficience de l’une et de l’autre. //