En fin... la facturation

Changements touchant les médecins qui traitent des problèmes musculosquelettiques – II

Michel Desrosiers  |  2018-10-30

Nous avons vu le mois dernier que certains médecins pourront se prévaloir d’une nomenclature adaptée au traitement des problèmes musculosquelettiques et que ces visites ne nuiront pas au taux d’assiduité des médecins qui dirigent les patients vers eux. Mais qui seront ces médecins et quelle est cette nouvelle nomenclature ?

Le Dr Michel Desrosiers, omnipraticien et avocat, est directeur des Affaires professionnelles à la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec.

Question de bien saisir qui tirera un avantage à cette no­­men­­­clature et de connaître les critères de désignation, com­mençons par traiter de cette nouvelle nomenclature. Nous vous rappelons que, bien que les textes aient été para­phés en août, le Conseil du trésor n’a pas accordé son approbation avant le déclen­chement des élections. Par conséquent, la date d’ap­plication sera retardée.

Les modifications

Trois nouveaux codes de visite

Certains médecins, désignés par le comité paritaire, peuvent se prévaloir de trois codes de visites spécifiques pour des problèmes musculosquelettiques en cabinet ou en CLSC, mais non à l’urgence ni au centre de consultation externe d’un centre hospitalier. Le mode mixte visant les services courants en CLSC a été modifié pour les intégrer, mais non celui pour les activités en GMF-U, le ministère étant d’avis qu’il ne s’agit pas d’un milieu au sein duquel une telle pratique devrait se développer.

Ces visites sont :

h la visite de prise en charge d’un problème musculosquelettique ;

h la visite de suivi d’un problème mus­culo­squelettique ;

h la visite d’évaluation d’un problème musculosquelettique pour donner une opinion, effectuée après l’orientation par un autre médecin et requise en raison de la complexité ou de la gravité du problème du patient ou de l’expertise du médecin à qui l’opinion est demandée.

Contrainte supplémentaire à l’exigence de désignation des médecins, ces trois visites peuvent seulement être réclamées lorsque le patient n’est pas inscrit auprès du médecin qui a été désigné par le comité paritaire. Et elles peuvent seulement l’être sur rendez-vous.

La visite de prise en charge peut être réclamée une seule fois par le médecin pour le même patient. On peut la concevoir comme la visite de prise en charge de la nomenclature générale : le médecin doit faire un examen, en plus de l’anamnèse et de ses recommandations diagnostiques ; et les échanges avec le patient ou ses proches pendant la visite sont inclus dans le tarif. Elle ne peut pas être réclamée par le médecin qui aurait facturé, pour un patient, la visite d’évaluation d’un problème musculosquelettique pour donner une opinion.

Les médecins désignés par le comité paritaire pourront se prévaloir de trois visites spécifiques lors de l’évaluation de problèmes musculosquelettiques en cabinet ou en CLSC.

La visite de suivi d’un problème musculo­squelettique peut être réclamée à répétition lors des visites subséquentes, sous réserve d’un traitement particulier lorsque la visite vise à assurer le suivi d’une commotion cérébrale. Le médecin doit avoir un contact avec le patient et faire un examen au besoin.

La visite d’évaluation musculosquelet­tique pour une opinion doit donner lieu à un examen (le libellé ne prévoit pas de contenu minimal) et peut être réclamée de nouveau lors d’orientations subséquentes pour obtenir de nouveau l’opinion du médecin. On comprend qu’il ne s’agira pas d’un problème pour lequel le médecin consulté assure déjà un suivi.

Les tarifs associés à ces trois visites ont été ajustés pour correspondre à ceux de la visite de prise en charge, de la visite de suivi et de la visite d’évaluation complexe pour le médecin qui compte 500 patients inscrits. Cet ajustement devrait corriger la perception des médecins désignés d’être pénalisés sur le plan de la rémunération.

Commotions cérébrales

Une situation particulière à la médecine sportive a fait l’objet de discussions, soit l’utilisation de cette nomenclature pour des patients souffrant de commotion cérébrale. Le compromis auquel les parties négociantes sont arrivées à la suite de discussions prolongées est celui de permettre l’accès à cette nomenclature lors de la visite de prise en charge ou d’évaluation sur orientation de patients souffrant de symptômes prolongés d’une commotion cérébrale, mais non lors de visites de suivi. Selon sa situation, le médecin devra réclamer une visite ponctuelle ou une intervention clinique lors de tels suivis. (Si le patient est inscrit auprès de lui, il peut réclamer la visite de suivi d’un patient inscrit, mais n’aurait pas pu réclamer de visites de la nomenclature spécifique aux problèmes musculosquelettiques.) Toutefois, si un tel patient souffre à la fois d’une commotion cérébrale et d’un problème musculosquelettique, le médecin désigné pourra alors se servir de la visite de suivi d’un problème musculosquelettique.

Effet sur le taux d’assiduité

Les trois visites spécifiques sont exclues du calcul du taux d’assiduité du médecin traitant. Cette modalité règle donc la crainte que les médecins traitants redirigent les demandes de consultation vers des spécialistes de l’appareil locomoteur. Elle ne règle pas entièrement cette préoccupation en ce qui a trait aux patients souffrant de commotions cérébrales, mais l’effet de cette « lacune » devrait être limité pour la majorité des médecins visés. Si jamais l’effet était important pour certains, ces derniers sont invités à se manifester à la Fédération.

Les médecins voulant se faire désigner devront faire une demande au comité paritaire, qui l’analysera en fonction de certains critères.

Médecins qui offrent de tels services à leur clientèle

Certains médecins nous ont indiqué qu’ils soignaient les problèmes musculosquelettiques de leur propre clientèle et qu’il s’agissait donc de patients inscrits. Ces médecins n’ont généralement pas avantage à chercher à se prévaloir de la nomenclature spécifique pour les problèmes musculosquelettiques. Il n’y a pas d’avantage pécuniaire, car ils bénéficient déjà d’une rémunération comparable. De plus, la nomenclature générale est moins restrictive en ce qui concerne la commotion cérébrale. Enfin, l’exclusion de ces visites du calcul de leur taux d’assiduité n’est pas avantageuse et peut même être désavantageuse. Une des conditions pour se prévaloir de la nomenclature spécifique est d’ailleurs que le patient ne soit pas inscrit auprès du médecin en question.

Médecins qui offrent leurs services à une clientèle non inscrite

Les autres médecins qui offrent de tels services peuvent avoir avantage à adresser une demande au comité paritaire. Les médecins qui détiennent une certification en médecine du sport ou en musculsquelettique devraient être reconnus d’emblée, tout comme leurs collègues qui font de l’enseignement universitaire dans ce secteur aux médecins en formation. D’autres médecins peuvent aussi être reconnus s’ils répondent à certains criètres et que leur volume d’acti­vités dans ce secteur est élévé. C’est le cas des médecins qui reçoivent un nombre important de pa­tients d’autres médecins pour une opinion concernant des problèmes musculo­sque­let­ti­ques et de ceux dont le volume de cer­tains actes associés à cette pratique est élevé. Les autres feront l’objet d’une évaluation par le comité paritaire. Les critères spécifiques d’évaluation pourront évoluer au fur et à mesure que le comité paritaire acquerra une meilleure connaissance de la réalité de cette pratique. Sans avoir fixé un nombre maximal de médecins pouvant être reconnus à cette fin, les parties négociantes ne s’attendent pas à ce que le comité paritaire désigne plus de 200 à 250 médecins.

En ce qui a trait à la nature des problèmes musculosquelet­tiques traités, ils pourront être liés autant au sport qu’au vieillissement ou découler d’un accident de travail ou autre. Les médecins estimant que leur pratique dans ce secteur est suffisamment importante pour donner lieu à la désignation doivent adresser leur demande à la direction des Affaires professionnelles de la Fédération. Ils devront indiquer les lieux où ils ont une pratique de problèmes musculosquelettiques et fournir une autorisation permettant à la RAMQ de fournir leur rémunération nominative au comité paritaire. Un formulaire préétabli à cette fin sera accessible en ligne.

Espérons que ces informations vous permettront de savoir si vous devez vous faire désigner pour avoir accès à la nomenclature spécifique pour les services musculosquelettiques. Le mois prochain, nous traiterons de sédation-analgésie. D’ici là, bonne facturation ! //