En fin... la facturation

Mises en garde concernant la facturation auprès de patients hospitalisés

Michel Desrosiers  |  2018-06-28

Au cours des six derniers mois, la RAMQ a effectué plusieurs inspections auprès de médecins exerçant en hospitalisation, surtout en gériatrie active. Deux services ont fait l’objet d’une attention particulière : la visite de suivi et les échanges interdisciplinaires ou avec les proches. La RAMQ a jugé qu’une forte proportion des dossiers ne contenaient pas suffisamment d’informations pour appuyer la facturation effectuée. Afin de vous aider à réduire votre risque de vivre des situations similaires dans l’avenir, nous en profitons pour faire quelques mises en garde concernant les exigences de ces services et des recommandations pour la tenue de dossier.

Le Dr Michel Desrosiers, omnipraticien et avocat, est directeur des Affaires professionnelles à la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec.

La nomenclature des services auprès des patients admis en soins de courte durée a connu des changements importants en octobre 2013. Fini les exigences spécifiques de l’examen ordinaire, complet et complet majeur. Ces examens ont été remplacés par des « visites » (de prise en charge, de suivi, de transfert, d’évaluation pour donner une opinion) dont les exigences de contenu ne sont pas aussi précises. Est aussi venu s’ajouter un nouveau code d’échanges interdisciplinaires ou avec les proches.

Cependant, ces visites conservent tout de même certaines exigences, tout comme les échanges. La RAMQ peut donc, lors d’une inspection, vérifier que les notes au dossier appuient bien les services réclamés. Les deux reproches les plus fréquents de la RAMQ sont que la note ne montre pas qu’il y a eu un contact entre le médecin et le patient ou que les échanges ont eu lieu en dehors du cadre de la visite et que la durée minimale a été respectée.

Visite de suivi

Le libellé de la visite de suivi exige effectivement un contact entre médecin et patient. Ce contact pourra servir à discuter avec le patient, l’informer de l’évolution des examens paracliniques ou des traitements, l’examiner, évaluer le niveau d’intervention à privilégier, obtenir son consentement à certains traitements, etc. Une tournée de dossiers de discussion avec le personnel infirmier, donnant lieu à la prescription de certains médicaments ou traitements, sans « voir le patient », ne suffit pas.

La démonstration qu’il y a eu un contact avec le patient

Dans les dossiers qui ont fait l’objet d’une inspection, la RAMQ était d’avis que les notes indiquant simplement « stable » ne montraient pas qu’il y avait eu un contact avec le patient. Ces notes contrastaient avec d’autres notes plus complètes qui décrivaient l’état de conscience du patient ou des éléments spécifiques à l’examen. De plus, de telles notes survenaient plus fréquemment chez des patients qui n’exigeaient pas de soins actifs et qui étaient en attente d’un transfert vers une ressource d’hébergement.

Sans donner raison à l’évaluation de la RAMQ, nous vous rappelons donc qu’il faut être conscient du risque à ne prendre que des notes sommaires. Une telle pratique peut faire en sorte que le médecin ait à fournir des explications lors d’une visite d’inspection, situation qu’il éviterait si l’inspecteur constatait à l’examen de copies du dossier qu’il y avait manifestement eu un contact entre le médecin et le patient.

Dans les dossiers récents, la RAMQ n’a pas remis en question le contact avec le patient lorsque la note au dossier contenait plus d’informations, même si ces informations auraient pu simplement être transcrites, sans qu’il n’y ait eu de contact avec le patient. On peut imaginer des indications concernant les signes vitaux, l’état de conscience ou la stabilité de l’état du patient. Si vos notes se limitent à de telles indications, il pourrait être prudent d’en revoir la rédaction.

D’autres indications peuvent seulement résulter d’un contact avec le patient : des discussions avec le patient sur sa maladie ou sur les examens paracliniques, le consentement, un examen spécifique ou général du patient sur un élément physique ou mental et, enfin, des discussions avec des membres de la famille dans le cadre de la visite auprès du patient.

Si vous évaluez un patient plus d’une fois le même jour, la visite subséquente doit être requise du fait d’un changement de l’état du patient. Vous devrez donc effectuer un examen. N’oubliez pas de l’inscrire au dossier.

La démonstration que les échanges ont eu lieu à un moment distinct

L’association, lors de la facturation, des codes de visite et des codes d’échange a aussi été scrutée par la RAMQ. Lorsqu’un seul des deux services est réclamé un jour donné, la question ne se pose pas. Mais lorsque les deux ont lieu le même jour, la RAMQ peut se demander s’il s’agit bien de deux services distincts.

La rémunération des échanges avec d’au­tres professionnels ou les proches d’un patient qui ont lieu pendant la visite est incluse dans celle de la visite. Les échanges doivent donc avoir lieu à un moment distinct. Une visite le matin et des échanges avec les membres de la famille en après-midi sont deux services distincts. Une note qui indique les heures des deux services peut réduire sensiblement le problème.

Beaucoup de médecins ne prennent pas nécessairement leurs notes au fur et à me­sure de leur tournée, surtout concernant les échanges interdisciplinaires. Si vous inscrivez vos notes tardivement, vous devriez indiquer à la fois l’heure de la visite et l’heure de la rédaction. De cette façon, advenant que d’au­tres professionnels aient versé des notes dans le dossier après votre visite, l’emplacement de votre note dans le dossier ne fera pas douter de la réalité des informations indiquées.

Échanges interdisciplinaires ou avec les proches

Il reste un dernier point sur les échanges ayant entraîné le refus d’une bonne partie de la facturation des échanges par les médecins lors des inspections, soit la question de leur durée. Le libellé prévoit une durée minimale de quinze minutes complètes. Cette exigence est répétée pour chaque période additionnelle de quinze minutes. Il s’agit ici de temps consécutif pour un échange (concernant un ou plusieurs patients). Il n’est donc pas possible de cumuler des périodes de cinq minutes durant la journée pour en faire un grand total en fin de journée. Chaque échange réclamé doit comporter une durée minimale continue de quinze minutes.

Lors de rencontres multidisciplinaires, la situation de plusieurs patients sera discutée pendant une rencontre pouvant durer plus d’une heure. Bien que le temps requis pour chaque patient individuellement peut être de moins de quinze minutes, dans ce contexte, du fait que la réunion est une période continue, vous pouvez facturer en fonction de la durée totale. Il faut toutefois indiquer le numéro d’assurance maladie de chaque patient lors de la facturation, comme information complémentaire.

Le libellé des échanges interdisciplinaires ou avec les proches prévoit une durée minimale de quinze minutes complètes. Le temps doit être consécutif, et non un cumul de périodes plus courtes durant la journée. Il peut être prudent d’indiquer l’heure de début et de fin de chaque échange au dossier.

Il peut donc être prudent d’indiquer l’heure de début et de fin des échanges au dossier, de même qu’une indication sommaire de la nature de l’échange. Le fait d’indiquer le contenu en plus des heures de début et de fin peut appuyer la réalité de votre facturation. Vous pouvez n’indiquer que l’heure de début au dossier, mais il devient alors d’autant plus important d’indiquer le contenu des échanges, afin qu’il soit possible de juger de leur durée probable.

La documentation de rencontres multidisciplinaires peut poser problème. Des notes ne sont pas nécessairement indiquées dans chaque dossier. Le fait de conserver un agenda avec les dates et les heures de telles rencontres et des numéros d’assurance maladie des patients discutés peut être d’un grand secours. Tant mieux s’il y a des procès-verbaux, mais ça ne semble pas être une pratique courante en milieu hospitalier.

Gardez aussi à l’esprit que vous devez être sur place dans l’établissement pour facturer les échanges et que les autres professionnels doivent l’être aussi. Une exception est prévue pour les membres de la famille, qui peuvent participer à distance, mais toujours dans la mesure où vous êtes sur place dans l’établissement et que vous respectez la durée minimale prévue.

Enfin, les inspections dont nous avons eu connaissance visent une période durant laquelle il n’était pas exigé d’indiquer, lors de la facturation, l’heure de début et de fin des échanges. Il est possible que cette nouvelle réalité modifie les attentes de la RAMQ. Toutefois, le fait de devoir indiquer l’heure de début et de fin vous obligera déjà à noter ces informations ; donc aussi bien les inscrire au dossier.

Espérons que ces informations vous permettent d’ajuster votre tenue de dossier pour éviter de vivre des surprises, advenant une inspection de la RAMQ. D’ici le mois prochain, bonne facturation ! //