Nouvelles syndicales et professionnelles

Lettre d’entente 269

Une première au pays

Claudine Hébert avec la collaboration d’Emmanuèle Garnier  |  2020-08-25

Avant même que tout le Québec ne soit paralysé par la COVID-19, la FMOQ a donné un grand coup. Elle est devenue la première association médicale du Canada à obtenir une entente avec le gouvernement sur la rémunération de ses membres dans le cadre de la pandémie.

Blanchette

La lettre d’entente 269 sur la rémunération des omnipraticiens pendant la pandémie peut paraître insipide, complexe, laborieuse. Mais elle est historique. Et elle constitue un tour de force. Dès que la FMOQ l’a conclue, les syndicats médicaux des autres provinces ont voulu en connaître la teneur. C’était le premier accord de ce type au Canada.

« La FMOQ a été la première à avoir une entente dûment signée avec le gouvernement pour la compensation des médecins alors que le milieu médical subissait les aléas économiques de la forte diminution des consultations médicales, souligne M. Denis Blanchette, directeur des Affaires économiques à la FMOQ. La Fédération a également obtenu une compensation pour les médecins en quarantaine, pour ceux qui étaient atteints de la COVID-19 et pour les retraits préventifs. » Dans le reste du pays, les autres associations médicales se sont rapidement inspirées de cet accord pour mener leurs propres négociations.

L’une des avancées les plus marquantes de la nouvelle entente : la reconnaissance de la téléconsultation. « Avec la lettre d’entente 269, la FMOQ avait en main tout ce qu’il fallait pour assurer une prestation de services à distance. L’un des éléments importants est la simplicité de la facturation : le médecin peut facturer les téléconsultations avec la même nomenclature et au même tarif que si le patient était présent », souligne M. Blanchette.

Cette voie pourrait se révéler intéressante pour l’avenir. « La situation pandémique, qui est loin d’être réglée, et la réception positive des patients envers la téléconsultation, tendent à montrer que les soins à distance vont prendre beaucoup de place dans les futures négociations de la rémunération permanente des médecins », estime M. Blanchette.

Une course contre la montre

Comment la lettre d’entente 269 a-t-elle été négociée ? Début mars 2020. Les premiers cas de COVID-19 ont commencé à apparaître au Québec. Ailleurs dans le monde, le virus se propage comme une traînée de poudre. Il faut agir vite. « Le gouvernement et nous avons pris conscience qu'il fallait se préparer à une éventuelle pandémie qui toucherait la province. Nous devions revoir la rémunération des médecins dans un tel contexte », raconte le Dr Louis Godin, président de la FMOQ.

Les pourparlers s’enclenchent. Une course contre la montre commence. « Généralement, les négociations pour ce type d’entente prennent des mois, voire des années. Or, dans le contexte de la pandémie, tout s’est réglé en quelques jours », explique le Dr Godin. Le 18 mars, la lettre d’entente 269 était signée. Cinq jours plus tard, la décision de confiner le Québec tombait.

Godin

Pour amorcer leurs négociations, la FMOQ et le gouvernement avaient ressorti de leurs archives des canevas de base : l’entente de 2011 sur l’éventuelle pandémie de grippe H1N1 et celle sur les cliniques d’hiver. « Rapidement, on s’est aperçu qu’il y avait beaucoup trop d’éléments qui n’avaient pas été prévus dans le cas de la grippe H1N1. Il fallait être en mesure d’appliquer des compensations dans le contexte actuel où l’on introduisait la téléconsultation », indique le président.

La FMOQ et le gouvernement ont donc décidé, dans un premier temps, d’actualiser l’entente sur les cliniques de grippe – devenues les cliniques d’hiver –, ainsi que toutes les dispositions prévues pour les médecins qui tombaient malades. « Il fallait aussi étendre le contenu de la lettre d’entente 269 à d’autres secteurs de pratique que les cliniques de grippe, comme les cliniques désignées de dépistage et d’évaluation de la COVID-19. »

Au fil des semaines, d’autres ajustements ont été apportés pour inclure la pratique en CHSLD, en résidence pour aînés, en ressources intermédiaires, en milieu hospitalier, sans oublier les GMF. « Depuis le premier jour, cette entente a été conçue pour pouvoir évoluer et s’adapter aux situations exceptionnelles afin de permettre à tous nos médecins de facturer les soins offerts dans un contexte totalement inédit », ajoute le Dr Godin.

Une application personnalisée

L’un des grands défis liés à la lettre d’entente 269 ? Son application. Il fallait que, cas par cas, tous les médecins de famille, de chaque unité ayant droit à une compensation en lien avec la COVID-19, soient reconnus. Un immense travail pour le personnel des différentes directions et des divers services de la FMOQ. Le Dr Godin leur lève son chapeau. « Que ce soit à la Planification, aux Affaires économiques, aux Affaires professionnelles ou ailleurs à la FMOQ, tous ont effectué un travail extraordinaire pour faire en sorte que chaque situation soit prise en considération et que la mécanique d’analyse des données soit la plus fluide possible. Je suis très fier d’eux. »

La lettre d’entente 269 tient par ailleurs compte des cas particuliers. « Qu’ils soient infectés par le coronavirus ou en quarantaine, qu’ils présentent un problème de santé ou qu’ils soient en retrait préventif pour une grossesse, les médecins de famille ont droit à une compensation », indique Mme Sylvie Fortin, actuaire aux Affaires économiques de la FMOQ. Jusqu’à présent, plus de 600 omnipraticiens ont bénéficié de cette mesure.

Fortin

Bien des médecins, surtout les nouveaux, bénéficient en outre d’un traitement personnalisé de leur demande. Comme la nature des compensations accordées est basée sur des périodes d’activités effectuées en 2019, les cas des jeunes omnipraticiens qui ont commencé à pratiquer en décembre, des cliniciennes qui étaient en congé de maternité et des médecins qui étaient en sabbatique ou en congé de maladie sont analysés individuellement, souligne l’actuaire.

Une prolongation de l’entente ?

La lettre d’entente 269 prend fin le 30 septembre. Le président de la FMOQ promet de suivre de près la situation au cours des prochaines semaines, notamment à cause de la possibilité d’une deuxième vague. « Il est clair que dans un tel cas, nous demanderons une prolongation de cette lettre d’entente », assure le Dr Louis Godin. //