Droit au but

La vraie nature d’un GMF en cabinet

quelques rappels

Pierre Belzile  |  2023-02-03

Qu’est-ce qu’un GMF ? Cette question, toute simple en théorie, ne reçoit pas toujours une réponse claire. En effet, certains médecins, comme d’autres acteurs du réseau de la première ligne d’ailleurs, éprouvent à l’occasion des difficultés à en circonscrire les caractéristiques fondamentales. Revenons donc à la base.

Me Pierre Belzile, avocat, est directeur du Service juridique de la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec.

Des médecins de famille

Il est parfois plus facile de définir une chose par ce qu’elle n’est pas. D’entrée de jeu, il convient donc de rappeler qu’un GMF, fondamentalement, n’est pas en soi une clinique médicale. En effet, on entend régulièrement dans le langage de tous les jours que telle ou telle clinique médicale est un GMF ou qu’elle est reconnue à ce titre par le ministère de la Santé. À strictement parler, ce n’est pas tout à fait exact.

À la base, ce qui constitue un GMF en cabinet, ce sont les médecins de famille qui le forment. Ensemble, ces médecins ont mis sur pied un groupe de médecine de famille. C’est ce groupe, et non pas la clinique médicale où ses membres exercent, qui représente le GMF. C’est donc cette communauté de médecins qui est reconnue par le ministère de la Santé. Autrement dit, un GMF est un regroupement de médecins distinct du lieu qui l’héberge, soit la clinique médicale. D’ailleurs, il est possible d’avoir un seul groupe de médecins dans un GMF multisites, les membres pratiquant dans différentes cliniques médicales dans un territoire donné.

L’adhésion des médecins

Le programme des GMF du ministère de la Santé repose sur un principe d’adhésion. Outre certaines autres conditions préalables à respecter, le groupe de médecins doit, pour adhérer au programme, remplir et signer le formulaire d’adhésion prévu à cette fin. Tous les médecins du groupe doivent le signer, ainsi que le médecin responsable.

Dans un GMF déjà reconnu, l’ajout d’un nouveau médecin, ou le départ de l’un d’entre eux, doit être signalé à la RAMQ et au comité paritaire FMOQ–Ministère chargé du suivi des GMF. Le formulaire d’adhésion indiquera par ailleurs le nom et l’adresse de la ou des cliniques médicales (s’il y en a plusieurs) où le groupe offrira ses services.

Nous voyons donc à quel point il importe de comprendre qu’il existe une différence entre le ou les lieux physiques d’un GMF et le groupe de médecins qui le constitue.

La forme juridique du GMF

Le programme des GMF du ministère de la Santé n’exige pas d’un groupe de médecins qu’il privilégie une forme juridique au moment de sa constitution. Le ministère demande cependant que, quelle qu’en soit la forme juridique choisie, le GMF obtienne un numéro d’entreprise en s’immatriculant auprès du Registraire des entreprises du Québec.

Le groupe de médecins, selon ce qu’il considère comme le plus approprié pour lui, peut donc effectuer ses opérations sous l’une ou l’autre des formes juridiques d’entreprises parmi celles ayant cours au Québec. Ainsi, pour donner quelques exemples, le groupe pourrait se constituer en société par actions, en société en nom collectif, en association ou sous une autre forme de regroupement.

Cette décision quant à la forme juridique du GMF sera habituellement prise avec l’aide de conseillers juridiques et de comptables, le tout en fonction des particularités du groupe.

Le versement de l’aide financière et sa gestion

Puisqu’il constitue une entité indépendante, le GMF doit ouvrir un compte de banque qui lui est propre s’il veut recevoir l’aide financière auquel il a droit. Il s’agit d’une exigence. En effet, en vertu du programme, les médecins du groupe doivent administrer eux-mêmes les sommes liées au financement que leur verse l’établissement.

Le GMF est donc responsable de la bonne gestion de cette aide et doit y avoir recours aux seules fins du programme. S’il y a lieu, il doit permettre aux représentants du ministère d’accéder à ses livres ainsi qu’à ses états financiers sur l’administration et l’utilisation de l’argent reçu. Habituellement, le médecin responsable du GMF se charge de cette administration.

Un GMF peut-il confier à un tiers l’administration du financement ? Oui, mais il en demeure le premier responsable. Dans le cas où le groupe de médecins souhaite déléguer cette tâche à un tiers, un propriétaire ou un gestionnaire de clinique par exemple, les deux parties devraient en toute logique conclure un contrat écrit afin de s’assurer de la bonne administration et de la bonne affectation des sommes. Encore ici, le contenu contractuel d’une telle entente de gestion devrait être bien établi.

Des règles de fonctionnement

Tout groupe de médecins devrait en principe, outre sa constitution sous une forme juridique ou une autre, se doter de règles internes de fonctionnement écrites qui couvriront différents aspects de manière à assurer la bonne marche du GMF. Ces aspects peuvent être les obligations attendues de chaque médecin, le processus de nomination et de remplacement du médecin responsable, la tenue d’assemblées, les règles relatives aux prises de décisions, les règles propres à l’ajout ou au départ d’un médecin, l’absence prolongée d’un membre (grossesse, maladie, radiation). Ces règles peuvent bien sûr varier d’un GMF à un autre, en raison des réalités de chacun.

La structure contractuelle d’un groupe de médecine de famille doit être bien bâtie pour assurer le succès et la pérennité du groupe de médecins au sein de la clinique. Nous encourageons tous les GMF à établir de telles règles pour la bonne cohésion du groupe.

Conclusion

La réussite d’un GMF repose foncièrement sur l’esprit de corps qui soude le groupe. Il doit donc y avoir poursuite d’un but commun. L’instauration d’un véritable travail d’équipe et d’une culture d’entreprise partagée par tous est essentielle. Les GMF qui fonctionnent bien sont ceux où les médecins sont unis et où existent des règles d’exploitation claires favorisant la cohésion. //