En fin... la facturation

Obstétrique, questions persistantes et notions d’inscription

Michel Desrosiers  |  2016-02-29

Il y a un peu plus de deux ans, des modifications ont été apportées à la facturation en obstétrique et en périnatalité. Le but était, entre autres, de simplifier la facturation, mais plusieurs semblent avoir de la difficulté à s’y adapter. En effet, la direction reçoit encore souvent des questions sur la facturation de ces services. Nous en profitons pour répondre aux questions les plus fréquentes, y compris celles sur la pondération en GMF.

Le Dr Michel Desrosiers, omnipraticien et avocat, est directeur des Affaires professionnelles à la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec.

Deux articles de cette chronique ont déjà traité de ces sujets, soit ceux de novembre 2013 et d’avril 2014. N’hésitez pas à y faire référence.

Est-ce que plus d’un médecin peut réclamer les codes 06989 ou 06990 pour la même patiente ?

Oui. Lorsque la durée du travail chevauche plus de deux pé­riodes de garde, il peut arriver que deux médecins pren­nent successivement en charge la même patiente avant qu’un troisième médecin n’effectue l’accouchement ou soit obligé de transférer la patiente à un consultant pour une césarienne. Dans une telle situation, les deux premiers médecins réclament alors chacun le code opportun pour les soins qu’ils ont donnés en fonction de l’heure du transfert de la patiente d’un médecin à l’autre.

Si trois médecins réclament successivement la rémunération de l’accouchement de la même patiente, y a-t-il un ajustement pour éviter que la rétribution totale dépasse celle de l’accouchement de 133 % ?

Non, la rémunération n’est pas réduite en fonction du nombre de médecins parti­cipants au suivi du travail. Avant la modification la plus récente, plus de deux médecins pouvaient déjà se partager la rémunération de l’accouchement en réclamant chacun les deux tiers. Aucun ajustement additionnel n’était donc nécessaire. De ce fait, lorsque trois médecins se partageaient la rémunération, le coût total des services professionnels pouvait être le double du tarif de l’accouchement. L’analyse de la facturation suggérait d’ailleurs que cette situation se présentait rarement.

Est-ce qu’il y a une durée minimale à un quart de garde pour avoir droit au partage de la rémunération pour le travail d’une patiente ?

L’entente n’en énonce pas. Toutefois, la Loi sur l’assurance maladie prévoit que seuls sont assurés les services que rend le professionnel et qui sont requis sur le plan médical. Advenant qu’un groupe de médecins prévoyait des durées de garde très courtes (par exemple deux heures), la RAMQ pourrait remettre en question le fait qu’une telle organisation correspondait à des impératifs médicaux. Un comité de révision pourrait alors trouver qu’il s’agit d’un moyen de maximiser le revenu tiré de l’activité, et non d’une organisation rendue nécessaire par la nature ou le volume d’activités. Le comité de révision pourrait aussi tenir compte des statistiques de partage d’autres milieux comparables pour juger qu’un milieu rendait des services non requis.

Plus de deux médecins peuvent se partager la rémunération de l’accouchement d’une patiente lorsque la durée du travail fait en sorte que les services sont donnés sur plus de deux quarts de garde.

Comment le médecin qui réclame le code 06989 ou 06990 doit-il évaluer l’heure du transfert ?

L’heure aux fins de facturation par le mé­decin qui se fait remplacer correspond à l’heure où le médecin successeur prend charge de la patiente. Il arrive que le premier médecin quitte l’hôpital avant que son successeur ne soit sur place, soit à l’heure prévue pour le changement de garde ou avant. Le transfert se fait alors par téléphone. Dans une telle situation, il faut regarder s’il y a eu prise en charge effective à l’heure du téléphone ou à une heure plus tardive. L’indicateur le plus utile serait probablement de savoir qui des deux serait tenu d’intervenir en cas d’urgence. S’il est coutumier pour le médecin précédent de demeurer sur place tant que son remplaçant n’est pas arrivé, on comprendra que le transfert effectif n’a lieu que lorsque le remplaçant arrive sur place. Si la responsabilité de l’intervention revient au remplaçant dès le transfert par téléphone, le transfert a alors lieu au moment de l’échange téléphonique.

Lorsque le seul médecin qui a pris en charge une patiente en travail doit transférer cette dernière à un consultant pour effectuer l’accouchement ou une césarienne, doit-il utiliser le modificateur 383 et réclamer seulement les deux tiers du tarif ?

Non. Le mécanisme de partage s’applique aux omnipraticiens qui assurent les soins habituels durant le travail et l’ac­cou­chement. Lorsqu’il faut faire appel à un consultant pour effectuer l’accouchement, que celui-ci soit omnipraticien ou spécialiste, le médecin qui a fait appel au consultant est rémunéré selon un des codes applicables (06986, 06987 ou 06988) et n’est pas tenu d’indiquer le modificateur 383 (l’omnipraticien qui agit comme consultant sera plus souvent un gynécologue non certifié). Si le médecin qui fait appel au consultant est le deuxième ou le troisième d’une chaîne qui a assuré les soins de la patiente, il devra utiliser le modificateur 383.

Lorsqu’un médecin utilise le modificateur 383 du fait qu’il partage la rémunération avec deux médecins qui l’ont précédé, doit-il donner le nom et le numéro de ces deux médecins ou seulement de celui dont il a pris la relève ?

Il suffit d’indiquer le nom et le numéro de pratique du médecin dont il a pris la relève, mais le médecin peut indiquer l’ensemble des noms et des numéros s’il le veut.

Les formules d’ajustement du nombre d’inscrits dans un GMF pour le suivi prénatal et les accouchements ne découragent pas le suivi interdisciplinaire et compensent pour les patientes perdues du fait qu’elles accouchent par césarienne non urgente.

Est-ce que le médecin qui compte assurer les soins seulement durant le suivi prénatal et le suivi post-partum immédiat peut inscrire une patiente ?

L’inscription dans le cadre de l’entente par­ti­culière sur la prise en charge et le suivi peut se faire dans les lieux autorisés (cabinet, domicile, CLSC ou UMF-CH et dans les deux seules cliniques externes qui font partie de l’offre reconnue d’un GMF). Toutefois, il faut aussi que le suivi soit longitudinal, et non d’une durée limitée. Le suivi obstétrical étant temporaire, le médecin ne devrait pas inscrire la patiente enceinte pour un tel suivi. Il peut se prévaloir d’une mesure compensatoire, soit le supplément pour prise en charge temporaire (code 15189), que la patiente soit ou non inscrite auprès d’un autre médecin. Le médecin qui exerce en GMF peut de plus se prévaloir d’un supplément additionnel, mais seulement lorsque la patiente est inscrite auprès d’un autre médecin du GMF qui n’assure pas de suivi obstétrical (code 19074).

En GMF, est-ce qu’il est approprié de limiter l’accès aux ressources infirmières du GMF aux seules patientes qui sont inscrites au GMF ?

Non. Même si elles ne sont pas inscrites au GMF, ces patientes contribuent au financement du GMF et devraient donc avoir droit à l’ensemble des services durant la période de suivi.

Comment une patiente non inscrite au GMF contribue-t-elle au financement dans le contexte du suivi obstétrical ?

Le suivi prénatal d’une patiente par un médecin du GMF donne droit à un ajustement du nombre de patients inscrits auprès du GMF aux fins d’évaluation du financement. Il en va de même des accouchements auxquels un médecin du GMF a participé. Dans les deux cas, le suivi prénatal et l’accouchement comptent chacun pour trois patients inscrits.

Le suivi prénatal aux fins de cet ajustement doit comprendre au moins deux visites de suivi de grossesse par le même médecin, doit obligatoirement la visite de prise en charge de grossesse. La formule est conçue pour ne pas décourager le suivi interdisciplinaire avec d’autres professionnels du GMF.

L’association d’un code d’accouchement à au moins une visite de suivi prénatal par le même médecin sur les lieux du GMF est retenue comme un accouchement donnant droit à l’ajustement. Sont retenus comme accouchement en plus des codes d’accouchement mêmes, l’ensemble des soins durant le travail lorsque le médecin transfère la patiente à un autre médecin, que ce soit en raison de la durée du travail ou de la nécessité de faire appel à un consultant pour procéder à une césarienne. Cette formule fait en sorte que la même patiente peut être retenue plus d’une fois pour l’ajustement du nombre d’inscrits et vient compenser la « perte » de patientes qui accouchent par césarienne non urgente.

Espérons que cet article vous aidera à mieux comprendre le fonctionnement des mesures en place. Le mois prochain nous traiterons de la nouvelle nomenclature en cabinet, à domicile, en CLSC et en GMF. D’ici là, bonne facturation ! //