En fin... la facturation

Vous faites des ponctions sous guidage échographique ?

Michel Desrosiers  |  2016-08-24

De plus en plus de médecins effectuent des ponctions sous guidage échographique. À la suite d’une réclamation de la RAMQ qui a fait l’objet d’un différend, la tarification applicable à certains services a été précisée. Le saviez-vous ?

Le Dr Michel Desrosiers, omnipraticien et avocat, est directeur des Affaires professionnelles à la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec.

Il est de plus en plus courant pour des médecins en établissement mais surtout en cabinet, d’effectuer des ponctions ou des injections sous guidage échographique. Cette technique a l’avantage d’offrir une plus grande précision et, dans plusieurs situations, de confirmer le diagnostic en établissant la présence d’inflammation sur un tendon, par exemple.

Pour avoir recours à cette technique, il faut posséder l’expertise et l’appareil requis ainsi qu’une sonde appropriée à la structure ou à la profondeur de la ponction effectuée. Lorsque le médecin veut effectuer une ponction sous guidage échographique, il doit de plus assumer des frais supplémentaires, occasionnés par l’achat d’un gel stérile et par la protection requise pour s’assurer que la sonde n’introduise pas de contaminants. Par ailleurs, la technique prend plus de temps que la méthode classique. Il est donc normal que les médecins recherchent une rémunération différente pour ce service de celle de la simple injection selon les repères anatomiques de surface.

Le volet de l’échographie

Or, le règlement d’application de la Loi sur l’assurance maladie prévoit que l’échographie est seulement un service assuré lorsqu’il est effectué en centre hospitalier ou encore dans le cadre de services obstétricaux dans un CLSC désigné. En cabinet, c’est au patient d’en acquitter le coût. De plus, l’article 22 (10e alinéa) de la Loi sur l’assurance maladie précise qu’un service non assuré ou qui n’est pas considéré comme tel le demeure même s’il est effectué avant, pendant ou après un service assuré. Le coût des fournitures associées à ce service non assuré n’est alors pas accessoire au service assuré. Il n’y a donc pas de doute que l’échographie servant à faire une injection sous guidage échographique est aux frais du patient, même si l’injection est un service assuré. Le gel stérile et la protection de la sonde requise pour effectuer la ponction ou l’injection sont aussi aux frais du patient, car ils font partie de la technique d’échographie, même si la dépense additionnelle pour conserver la stérilité en vue de la ponction ou de l’injection (soit le service assuré) est imposée par l’injection.

Encadré

La rémunération de la ponction ou de l’injection

C’est la question de savoir quelle rémunération s’appliquait à la ponction ou à l’injection qui a été tranchée par l’arbitre lors du différend. Le médecin avait utilisé le code 00124 lors des ponctions et des injections sous guidage échographique effectuées en cabinet. La RAMQ lui indiquait qu’il aurait plutôt dû réclamer le code 00430 (encadré) et lui demandait de rembourser la différence entre les deux tarifs pour l’ensemble des services rendus. Le médecin a contesté la position de la RAMQ.

Dans un premier temps, l’arbitre a étudié le code 00124. Le titre de cette section fait référence à la ponction de « kystes, abcès ou autres collections liquidiennes ou aériques », mais la description du code fait uniquement mention des « kystes ou abcès ». La RAMQ prétendait que le code s’appliquait seulement aux kystes et aux abcès du fait qu’ils étaient les seuls décrits, mais l’arbitre a plutôt retenu qu’il fallait donner pleine portée au titre de la section et que le service visait donc aussi la ponction d’une collection liquidienne.

Il fallait par la suite décider si la facturation de l’injection devait avoir préséance étant donné que le libellé concernant une injection dans une articulation est « l’injection incluant l’aspiration préliminaire ». Pour l’arbitre, il s’agit de deux services différents. L’arbitre semble avoir été influencé dans une certaine mesure par le temps différent requis pour l’un et pour l’autre.

Selon cette conclusion, l’injection n’est pas incompatible avec la ponction sous guidage échographique. Il faut donc analyser les deux services distinctement : la facturation de l’injection n’empêche pas, a priori, celle de la ponction d’une collection liquidienne sous guidage échographique. Restait à appliquer le raisonnement aux faits qui ont donné lieu au différend.

En se fiant à la description du code 00124, l’arbitre a conclu que ce code pouvait seulement être utilisé lorsque la présence d’une collection liquidienne était inscrite au dossier. Dans les cas étudiés, c’est dans des dossiers de ponction de grosses articulations (épaule, hanche et genou) que la présence de liquide était notée. On peut comprendre que du liquide surviendra moins fréquemment lorsqu’il s’agit d’une gaine tendineuse ou d’un tendon.

Fort de son raisonnement et de ses découvertes, et du fait que le libellé de la ponction n’inclue pas l’injection, l’arbitre est arrivé à la conclusion qu’un médecin peut dans un premier temps réclamer la ponction d’une collection liquidienne sous guidage échographique et par la suite facturer une injection dans la même articulation, si ce service est nécessaire.

Toutefois, contrairement à ce que demandait le médecin, l’arbitre a constaté qu’aucune rémunération spécifique n’était prévue lorsqu’une injection était effectuée sous guidage échographique, à moins qu’une ponction de collection liquidienne n’ait eu lieu auparavant. Il s’en est remis aux parties négociantes pour régler cette situation.

En cabinet, l’échographie effectuée pour faire une ponction ou une injection est un service non assuré dont les frais doivent être assumés par le patient.

À la suite d’un récent différend, un médecin peut désormais réclamer le code de la ponction d’une collection liquidienne sous guidage échographique lorsqu’il constate la présence d’une telle collection.

Le médecin qui effectue la ponction d’une collection liquidienne sous guidage échographique et qui, par la suite, effectue une injection dans la même articulation peut réclamer les deux services.

Depuis cette décision, lorsqu’un médecin effectue la ponction d’une collection liquidienne sous guidage échographique et que, par la suite, il effectue une injection au même endroit, il peut réclamer la rémunération associée à chacun de ces deux services. Cependant, s’il effectue simplement une injection sous guidage échographique, sans ponctionner de liquide, il peut seulement réclamer le tarif de l’injection, qui ne prévoit aucune bonification lorsque l’injection est effectuée sous guidage échographique.

Cette décision crée une disproportion im­portante entre la rémunération des ponc­tions et celle des injections effectuées sous guidage échographique. Les parties négociantes ont eu des discussions à ce sujet, question d’explorer l’intérêt de revoir l’encadrement des ponctions et des injections effectuées sous guidage échographique. Elles ne se sont pas entendues sur l’approche à prendre, voire sur l’existence d’un problème qui mérite une intervention. La décision de l’arbitre gouvernera donc l’utilisation des codes ayant fait l’objet du différend dans un avenir prévisible.

En établissement, il existe un tarif pour l’échographie dirigée d’urgence (code 00689) qui pourrait servir pour certaines injections faites sous guidage échographique. Néanmoins, ce service vise spécifiquement le recours à l’échographie de surface dans des situations d’urgence, alors son utilisation à ces fins sera nécessairement limitée.

Le mois prochain nous traiterons de questions concernant la nouvelle nomenclature en cabinet, à domicile, en CLSC et en UMF. D’ici là, bonne facturation ! //