Éditorial

Improvisation, incohérence et chaos

Louis Godin  |  2017-01-30

Gaétan Barrette s’est surpassé au cours des derniers mois. En effet, aucun dossier ne semble dorénavant résister à l’improvisation, à l’amateurisme et à la mauvaise foi du ministre de la Santé dans la gestion de son ministère. Voici quelques exemples éloquents de cette improvisation déconcertante qui menace l’accessibilité aux soins.

Les frais accessoires

La gestion du dossier des frais accessoires par le mi­nistre de la Santé a été carrément gênante et in­dé­fen­dable. Est-il nécessaire de rappeler les changements de position et de conviction de Gaétan Barrette dans ce dossier ? En tant que président de la FMSQ, il défend les frais accessoires et exige une compensation substantielle de l’État en cas d’abolition de certains d’entre eux. Ensuite, une fois ministre, il plaide pendant des mois pour un simple encadrement de ces frais, puis fait un virage à 180 degrés et annonce unilatéralement, le 14 septembre dernier, sans prévenir per­sonne, l’abo­lition pure et simple des frais accessoires à compter de janvier 2017.

Après avoir pris acte de l’annonce du gouvernement, la Fédération a sollicité pendant des semaines une rencontre avec les représentants du MSSS pour que des discussions aient lieu de façon à faire atterrir convenablement cette nouvelle orientation. Faute de retour du gouvernement, la Fédération soumet au ministre par écrit, le 8 novembre, ses interrogations légitimes sur l’application de la future réglementation. Le silence du gouvernement perdure tout de même des semaines, une première rencontre n’ayant lieu que le 22 décembre et une réponse écrite officielle à notre lettre du 8 novembre n’arrivant que le 20 janvier 2017. Que de temps perdu ! Surtout que les sbires du gouvernement n’avaient jamais prévu toutes les conséquences de l’abolition des frais accessoires, dans un contexte où le MSSS ne dispose manifestement pas de l’expertise médicale et juridique nécessaire pour mener convenablement et rapidement un tel dossier.

Devant une telle incompétence, arriva ce qui devait arriver : la FMOQ a dû lutter pour éviter une baisse de l’accessibilité aux soins et de l’offre de services aux patients, malgré la bonne foi des médecins.

Les supercliniques

Réalisant que son cadre pour les supercliniques (GMF-R) ne correspondait pas aux attentes des médecins de famille ni aux besoins de la population, Gaétan Barrette a tenté, à l’automne, de mettre de la pression sur les médecins en reniant l’engagement de l’État d’assurer le financement des 51 cliniques-réseau de la province jusqu’en avril 2018. Le ministre met alors en péril, dès le 1er avril, l’accès aux soins sans rendez-vous, notamment pour les patients orphelins et pour des milliers de Québécois. Agir de la sorte, malgré les propositions concrètes de la FMOQ pour ouvrir un nombre important de supercliniques et préserver l’accès aux cliniques-réseau incapables de devenir de supercliniques, est tout simplement irresponsable. Comme si ce n’était pas suffisant, appréhendant l’échec de son coup de force, le ministre décide d’aller de l’avant avec une nouvelle stratégie illogique et irresponsable : rendre conditionnel l’octroi de postes dans certaines régions (PREM) à l’obligation de travailler en heures défavorables dans des supercliniques qui, bien souvent, n’existent pas encore. Une telle mesure, au-delà du fait qu’elle ne tient pas compte des besoins de la population sur l’ensemble du territoire québécois, va bien sûr à l’encontre de la priorité accordée à la prise en charge des patients orphelins.

Vous aurez compris que les engagements électoraux et les slogans politiques du ministre ont malheureusement préséance sur les besoins réels et prioritaires de la population du Québec en 2017 ainsi que sur le gros bon sens. Dans ce contexte, nul ne peut contester au ministre Barrette son titre de Dr Chaos.//

Le 25 janvier 2017

 

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Le président, Dr Louis Godin