Nouvelles syndicales et professionnelles

Assemblée générale de l’AMCLSCQ

Un rythme d’inscription de nouveaux patients qui inquiète

Claudine Hébert  |  2018-10-29

L’AGA de l’AMCLSCQ, tenue le 14 septembre dernier, à Montréal, a permis de discuter de plusieurs sujets concernant la pratique en CLSC, dont la rémunération mixte, l’accès aux dossiers médicaux électroniques et le taux d’inscription des patients.

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S’il y a une situation qui tracasse ces jours-ci le Dr Sylvain Dion, président de l’Association des médecins omnipraticiens de CLSC du Québec (AMCLSCQ), c’est la nette décélération du rythme d’inscription de nouveaux patients en 2018. Bien moins de personnes ont été prises en charge cette année par les médecins de famille qu’en 2017 et en 2016. « Comment expliquer ce ralentissement ?, a demandé le Dr Dion lors de l’assemblée générale annuelle. Est-ce parce que les omnipraticiens n’ont plus de marge de manœuvre ? Est-ce l’illusion que la loi 20* ne sera pas appliquée ? »

Pourtant, a ajouté le président, ce n’est pas parce la loi 20 a été mise en veilleuse en 2018 que les médecins de famille échapperont à ses mesures dans les prochains mois. « Surtout si nous ne parvenons pas à atteindre la cible de 85 % de patients inscrits d’ici le 31 décembre prochain. Ne nous leurrons pas. Nous avons actuellement une épée de Damoclès au-dessus de la tête », a indiqué le Dr Dion aux soixante-quinze cliniciens présents.

Actuellement, un peu plus de 4500 médecins suivent moins de 1000 patients inscrits. De ce nombre, plus de 1600 ont une clientèle de moins de 500 patients. Une statistique qui inquiète particulièrement le Dr Dion qui sait qu’un certain pourcentage de ses membres figure dans ce groupe. La situation pourrait cependant se redresser. Il suffirait que les 4500 médecins qui sont sous la barre des 1000 patients en prennent cinquante autres pour que 225 000 nouveaux patients soient instantanément inscrits, a indiqué le président de l’AMCLSCQ.

Mais peut-être que certains facteurs n’ont pas été bien cernés. « Nous devons, comme Fédération et comme association, faire nos devoirs. Il nous faut documenter davantage la situation. Quelles sont les activités des omnipraticiens qui pratiquent soit en CLSC, soit ailleurs qui n’ont toujours pas au moins 500 patients ? Travaillent-ils en deuxième ligne ? Pourquoi ces médecins n’ont-ils toujours pas mis la main à la pâte ? Et pourquoi certains ne veulent tout simplement pas participer à l’effort collectif qui nous est demandé ? », a indiqué le Dr Dion. À ses yeux, en ce qui concerne ses membres, la mobilisation des chefs de service en CLSC sera essentielle pour dresser un bilan complet de la situation.

Le Dr Dion craint, par ailleurs, que plusieurs médecins n’aient pas encore saisi les réelles conséquences de l’éventuelle ap­plication de la loi 20. « Certains m’ont déjà signalé qu’ils aimaient mieux voir leur rémunération être réduite de 30 % que d’avoir à changer leur pratique. Le hic, c’est que rien ne nous indique que les mesures punitives s’arrêteront là. Il pourrait y en avoir d’autres. »

Selon le Dr Dion, il faut continuer de rappeler aux omnipraticiens la menace qui pèse sur la profession. Une menace, a-t-il indiqué, qui est encore plus importante que celles qu’ont vécues les médecins au cours des trois dernières années. « Il faut qu’on mette cartes sur table. Nous nous devons de trouver un moyen d’inciter les médecins qui ont toujours une marge de manœuvre à participer, eux aussi, à l’effort. Nous avons réussi à négocier un sursis pour empêcher l’application de la loi 20. La balle est désormais dans notre camp. La seule façon de nous débarrasser de cette loi et de ses mesures contraignantes et punitives, c’est d’atteindre les cibles » a indiqué le Dr Dion à ses troupes.

* Le nom exact de la loi est : Loi favorisant l’accès aux services de médecine de famille et de médecine spécialisée et modifiant diverses dispositions législatives en matière de procréation assistée.

Faible adhésion au mode de rémunération mixte

Le Dr Dion a également profité de la rencontre annuelle des méde­cins de CLSC pour présenter le bilan de l’adhésion des méde­cins de CLSC au mode de rémunération mixte. Ce type de rétri­bution a été négocié par la FMOQ en 2015 afin de répondre à une demande des médecins de CLSC qui souhaitaient de meilleures conditions financières. La nouvelle mesure devait leur permettre d’obtenir une hausse d’au moins 20 %, selon les données qu’avait obtenues l’AMCLSCQ auprès de ses membres.

Premier constat, moins de 300 médecins de CLSC ont adhéré à ce mode de rémunération en vigueur depuis le 1er juin 2016. C’est à peine 20 % du groupe. « Pourtant, les médecins payés à tarif horaire qui ont adopté la rémunération mixte ont vu leurs revenus grimper de plus de 30 %. » Les médecins rémunérés à honoraires fixes ayant choisi cette formule, eux, ont eu une hausse de 11 %. « La différence s’explique-t-elle par une collecte de données faites auprès des médecins omnipraticiens qui n’étaient pas tout à fait exactes ?», s’est questionné le Dr Dion.

Outre la bonification des revenus, ce mode de rémunération se traduit également par d’autres points positifs. Les médecins qui ont adopté un mode mixte horaire voient le double de patients par heure. Un élément qui peut permettre d’augmenter le nombre de prises en charge, particulièrement chez les médecins ayant moins de 500 patients.

Louis Godin

Afin d’expliquer la faible adhésion des médecins de CLSC à ce mode de rétribution, le Dr Dion a promis d’aller chercher des réponses. Il veut également mettre en place certaines initiatives pour que la rémunération mixte gagne plus d’adeptes. « Il ressort de ce premier bilan qu’il faut poursuivre la formation et les rencontres auprès de nos médecins pour expliquer les avantages du processus. Peut-être que nous n’avons pas assez bien accompagné nos membres. De nouvelles analyses et quêtes de données vont nous aider au cours des prochains mois à avoir un meilleur portrait de la situation », a-t-il mentionné.

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À quand des DME dans tous les CLSC ?

Lors de la rencontre, le Dr Dion a rappelé les efforts déployés par la FMOQ pour que tous les CLSC aient enfin accès aux dossiers médicaux électroniques (DME). Selon un sondage mené en début d’année auprès des médecins de CLSC, seulement 50 % ont actuellement accès à cet outil. « Plusieurs d’entre nous ont préféré jeter la serviette. Pourtant, il s’agit d’un service auquel nous avons droit », a tenu à rappeler le Dr Dion.

Une mobilisation de l’ensemble des CLSC est nécessaire pour corriger cette situation, a soutenu le Dr Dion. Sinon, les injustices vont se poursuivre. « Il faut continuer d’effectuer nos démarches pour obtenir l’accès aux DME dans chacun de nos CLSC. Et surtout, il faut conserver une copie de nos demandes auprès des établissements. Les écrits restent », a mentionné le Dr Dion tout en précisant que l’AMCLSCQ poursuit actuellement des démarches avec la FMOQ afin de régler une fois pour toutes la question des DME et des conditions de pratique en CLSC.

Enfin, autre sujet qui préoccupe le président de l’AMCLSCQ, l’avenir de la pratique en CLSC. Le recrutement dans ce milieu est en perte de vitesse, a rappelé le Dr Dion. Chaque année, il y a deux fois moins d’arrivées de médecins dans les CLSC que de départs. « Une réflexion sur l’avenir de notre type de pratique s’impose. Il faudra innover, réaffirmer que nous avons notre place au sein du système de santé et surtout, a-t-il conclu, il faudra aussi collaborer avec les décideurs, en l’occurrence le ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS), pour ne pas les laisser tenir les rênes de notre avenir. »

DME, RVSQ et taux d’inscription

Venu rencontrer les membres de l’AMCLSCQ, le Dr Louis Godin, président de la FMOQ, a abordé plusieurs dossiers importants. Notamment l’accord-cadre, les lettres d’entente nos 304 et 321 et une possible majoration des forfaits d’inscription générale pour inciter les médecins suivant moins de 1000 patients à en inscrire davantage.

À la suite de son discours, le Dr Godin a été questionné sur l’absence de DME dans plusieurs CLSC. « Certains médecins vivent un réel parcours du combattant, a souligné le président de la Fédération. Toutefois, n’arrêtez pas de demander les services et les outils auxquels vous avez droit. Mettez de la pression sur les établissements qui tardent à suivre les consignes du MSSS. Et si les choses ne se règlent toujours pas, appelez-nous. C’est en faisant du bruit que les dossiers finissent par débloquer. »

Le site Rendez-vous Santé Québec (RVSQ) a lui aussi soulevé quel­ques interrogations de la part des médecins de CLSC présents. « Que se passe-t-il dans ce dossier ? », a demandé une omnipraticienne dans la salle. « Lors de nos discussions avec le ministère en janvier dernier, le RVSQ ne devait concerner que les plages de rendez-vous que les médecins acceptaient de mettre en ligne. Récemment, le MSSS a changé d’idée. Il veut que les omnipraticiens inscrivent toutes leurs plages de rendez-vous sur le site. L’entente que nous avons signée avec le ministère prévoit pourtant l’adhésion volontaire des médecins », a rappelé le Dr Godin, qui a indiqué que la FMOQ allait suivre ce dossier de près. //

Et les prix Inukshuk sont remis à

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L’AMCLSCQ a profité de son assemblée générale annuelle pour remettre ses prix Inukshuk junior et Inukshuk sénior à deux médecins, jeune et moins jeune, dont les contributions syndicales et professionnelles dans le milieu des CLSC sont reconnues par leurs pairs.

Le Dr Jean-Denis Bérubé, du CLSC de Chicoutimi, a reçu le prix Inukshuk sénior. Depuis 38 ans, ce médecin a été, presque sans interruption, un membre élu, actif et engagé du bureau de l’AMCLSCQ. Il a occupé le poste de secrétaire pendant près de vingt ans, et a aussi été vice-président et administrateur.

Le prix Inukshuk junior a, quant à lui, été décerné au Dr Philippe Melanson, qui pratique au CLSC-GMF de Saint-Donat de­puis 2015. Engagé dans l’Association des médecins de CLSC du Québec depuis 2015, il a d’abord été administrateur et, depuis 2 ans, occupe le poste de vice-président.