En fin... la facturation

Rémunération à tarif horaire et rémunération pour remplir les formulaires

Michel Desrosiers  |  2024-05-01

Une question persistante des médecins rémunérés à tarif horaire est la possibilité d’être rétribué pour remplir des formulaires pour lesquels il existe un tarif à l’acte. Comme cette question revient souvent, elle mérite qu’on en traite.


Le Dr Michel Desrosiers, omnipraticien et avocat, est directeur des Affaires professionnelles à la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec.

Lorsqu’un médecin choisit un mode de rémunération, ce mode s’applique généralement à l’ensemble de ses activités régulières dans le milieu ou le secteur d’activité. On parle d’activité « régulière », car tous les médecins sont rémunérés à l’acte pendant la garde en disponibilité, à une exception près pour le mode mixte (encadré). Lorsque le médecin nor­malement rémunéré à tarif horaire ou à honoraires fixes facture des services à l’acte durant la garde en disponibilité, il doit ajouter un élément de contexte à chaque facture afin de préciser qu’il est de garde en disponibilité.

La tournée habituelle la fin de semaine fait partie des activités régulières. Par ailleurs, le médecin qui répond à des appels du CHSLD ou qui prodigue des soins à domicile pendant qu’il est à son cabinet est de garde, même en plein milieu de la journée en semaine, période durant laquelle il ne reçoit aucune rémunération pour la garde. Il pourrait même ne pas être indiqué à l’horaire de garde en disponibilité.

C’est donc dire que le médecin à tarif horaire, pendant qu'il pratique à tarif horaire, n’a pas à se soucier des actes pour lesquels un code d’acte rémunéré à la pièce est prévu, car ce n’est pas la rémunération qui s’applique dans son cas. C’est vrai qu’on parle de visites, de rapports ou formulaires. Toutefois, il y a quelques exceptions.

Nous avons déjà traité d’une exception, soit l’aide médicale à mourir (En fin... la facturation de juin 2023). L’Entente prévoit spécifiquement la possibilité pour un médecin de facturer ce service à l’acte plutôt qu’à tarif horaire ou à honoraires fixes, même s’il s’agit d’une activité régulière. Le médecin fait son choix à la pièce. Pour chaque patient qu’il traite, il peut ainsi opter pour la rémunération à l’acte ou à tarif horaire. Et son choix vise l’ensemble du service (évaluation et ultimement administration de l’AMM pour un patient donné). Il ne peut toutefois pas facturer l’évaluation à tarif horaire et l’administration à l’acte pour le même patient.

L’exception prévue pour l’aide médicale à mourir porte aussi sur les formulaires qui découlent du service. Il peut s’agir du constat de décès et des différents rapports rémunérés. Comme la rédaction du constat ou des rapports constitue un service distinct de l’aide médicale à mourir, le médecin peut choisir une option différente pour l’AMM et pour la rédaction des formulaires. Ainsi, un médecin pourrait choisir d’être rémunéré à tarif horaire pour la rédaction d’un rapport et à l’acte pour l’évaluation et l’administration de l’AMM.

Chose à souligner, le protocole d’administration de la sédation palliative continue n’est pas visé par cette option. Le médecin à tarif horaire ou à honoraires fixes ne peut pas facturer ce service à l’acte, à moins de le faire pendant sa garde en disponibilité.

Lorsqu’on parle de choix, il faut comprendre que le médecin qui opte pour la rémunération à l’acte ne cumulera pas le temps requis à son tarif horaire ou à honoraires fixes. C’est un mode ou l’autre.

La lettre d’entente 223 qui vise certaines évaluations psy­chiatriques prévoit aussi la possibilité de choisir le mode à l’acte à la place du tarif horaire ou des honoraires fixes. Comme ces services comprennent à la fois l’évaluation et la rédaction du rapport, l’option du médecin vaut pour l’ensemble du service, contrairement à ce qui s’applique à l’AMM où le médecin peut choisir entre « l’évaluation et l’administration » de l’AMM et la rédaction des formulaires. Il peut par ailleurs faire un choix différent pour le témoignage en cours lié à son rapport.

L’autre exception permettant à des médecins à tarif horaire ou à honoraires fixes d’être rémunérés à l’acte est l’entente particulière sur la rémunération en CLSC. Cette entente per­met à ces médecins d’opter pour le mode à l’acte lorsqu’ils remplissent des formulaires médico-administratifs de la CNESST, que ce soit dans le cadre de leurs activités régulières ou de la garde en disponibilité. Trois autres exceptions visent les services à l’urgence d’un CLSC du réseau de garde intégré ou le service de consultation sans rendez-vous dans un CLSC qui ne fait pas partie du réseau de garde intégré, les services de planification familiale et le programme de maintien à domicile.

L’option pour l’urgence ou le service de consultation sans rendez-vous vise soit l’ensemble des activités du médecin à l’urgence, soit la fin de semaine seulement. Dans le cas de la planification des naissances, l’option est par période d’activité. Par conséquent, le médecin visé par cette option peut s’en prévaloir quotidiennement selon la nature de ses activités.

On trouve une option comparable pour le service de consul­tation sans rendez-vous dans l’entente particulière du médecin enseignant pour les activités en GMF-U, qu’il soit en centre hospitalier, en CLSC ou hors établissement. L’option ne fait pas la distinction entre semaine et fin de semaine. Elle est globale pour le service de consultation sans rendez-vous.

En dehors de ces options, le médecin qui remplit des for­mu­laires assurés est rémunéré selon son mode habituel, soit le tarif horaire ou les honoraires fixes.

Sources possibles de confusion

Bien que les règles soient simples, les questions reviennent régulièrement. Il y a potentiellement deux sources de confusion, soit les validations appliquées par la RAMQ et le traitement d’application lors de services non assurés.

Validations appliquées par la RAMQ

Certains médecins disent à leurs collègues qu’ils ont facturé à l’acte la rédaction de certains formulaires (ex. : CTMSP ou constat de décès) bien qu’ils soient normalement rémunérés à tarif horaire ou à honoraires fixes. De tels commentaires créent la perception que cette facturation est permise. Si le service n’a pas été rendu pendant la garde en disponibilité, c’est souvent l’option pour le service de consultation sans rendez-vous ou l’urgence en CLSC qui est en cause.

En effet, lorsqu’un médecin est visé par l’exception lui permettant de facturer des services à l’acte dans ce contexte, s’il facture des formulaires autrement que dans le cadre des exceptions dont nous avons parlé, la RAMQ suppose que ces services ont été effectués au service de consultation sans rendez-vous ou à l’urgence. En dehors du service de consultation sans rendez-vous, les médecins doivent s’en tenir à leur tarif horaire ou à leurs honoraires fixes. Facturer des formulaires à l’acte en dehors des exceptions permises n’est pas conforme.

Certains croient que s’ils attendent en fin de journée pour remplir les formulaires, ils respecteront l’Entente. Dans la mesure où le formulaire découle d’activités régulières, il fait partie des services réguliers et devrait être facturé selon le même mode, même si le médecin attend en fin de journée pour effectuer le service.

Certains formulaires qui ne sont pas visés par une exception (CTMSP, constat de décès) peuvent par erreur être payés à l’acte par la RAMQ, bien que le médecin soit normalement à tarif horaire ou à honoraires fixes,en raison de l’option
qu’il a choisie pour le service de consultation sans rendez-vous.

Services non assurés

L’autre source de confusion est la possibilité pour tout médecin de facturer des services non assurés à ses patients, sans égard au mode habituel de rémunération du médecin. Afin de faciliter la comptabilité du tarif horaire ou des honoraires fixes, plusieurs médecins offrent de tels services en fin de journée, une fois qu’ils ont « arrêté le compteur » du tarif horaire ou des honoraires fixes. Cette façon de faire est conforme parce que les services ne sont pas assurés, et non parce que le médecin les sépare artificiellement de sa rémunération régulière. La « séparation » ici vise simplement à faciliter le respect des règles encadrant la facturation du tarif horaire et des honoraires fixes.

Espérons que cet article a éclairci le sujet des formulaires. Le mois prochain, nous traiterons des forfaits versés en juin : leur origine et les conditions minimales pour les recevoir. D’ici là, bonne facturation !