Dossiers spéciaux

La profession médicale à l’ère des communications

Claudine Hébert  |  2018-06-29

Pratiquer la médecine familiale en 2018 ne repose plus seulement sur la maîtrise de multiples connaissances liées aux soins et aux services de santé. C’est à l’avantage de tous de maîtriser l’art de communiquer avec ses patients, ses collègues de la clinique, le grand public, les médias... sans oublier les politiciens.

C’est en grande partie le message qui a été véhiculé au forum portant sur les communications, dans le cadre du congrès syndical de la FMOQ. Et à l’ère des médias sociaux, des nouvelles générations de membres et plus particulièrement à l’approche des élections provinciales, voilà un sujet qui tombait fort à point.

« C’est un fait qu’il faut communiquer davantage avec nos membres », a soulevé d’emblée le Dr Sylvain Dion, deuxième vice-président de la FMOQ. Premier des quatre conférenciers à prendre la parole, le Dr Dion dirige actuellement les travaux du comité des communications de la FMOQ. « Plusieurs membres, qui ont souffert des multiples attaques à l’égard de notre profession, nous ont dit être mal informés de l’ensemble des actions menées au cours des dernières années par la Fédération. La page Facebook de la FMOQ ne suffit plus », a-t-il ajouté.

Former un comité des communications permanent

Pour remédier à ce besoin, un comité des communications a été mis sur pied afin de transformer la posture défensive des médecins omnipraticiens en une présence médiatique proactive, a-t-il expliqué. Ce comité a le mandat d’explorer toutes les stratégies de communication appropriées sur une base régulière et assidue afin de promouvoir une offensive médiatique qui talonne le ministre de la Santé et des Services sociaux sur ses engagements. « L’objectif d’un tel comité, a indiqué le Dr Sylvain Dion, est d’alimenter les stratégies de communication sur le plan politique, populationnel et auprès des membres, tout en tenant compte de la réalité de la FMOQ, dont le principal mandat en est un de négociation. »

Une des solutions proposées par l’actuel comité a été d’inviter les associations régionales à faire appel à un conseiller en communication afin d’améliorer les relations avec leurs membres, les médias locaux et régionaux ainsi qu’avec la population. « Jusqu’à maintenant, six associations se sont adjoint les services d’un conseiller en communication, soit Laurentides-Lanaudière, Montréal, Saguenay–Lac-Saint-Jean, Yamaska, Bas-Saint-Laurent et Laval. Des démarches sont en cours à Québec et en Montérégie », a signalé le Dr Dion.

sylvain dion et cie

La recette de l’AMOLL...

Les présidents de deux associations, le Dr Marc-André Amyot de l’Association des médecins omnipraticiens de Laurentides-Lanaudière (AMOLL), et, Jacques Bergeron de l’Association des médecins omnipraticiens d’Yamaska (AMOY), étaient justement parmi les conférenciers invités pour venir parler de leur plan de communication respectif.

« Nous ne sommes pas des experts en communication. Nous sommes d’abord et avant tout des cliniciens. C’est peut-être ce qui explique notre difficulté à aller chercher spontanément cette aide. N’empêche que nos membres nous ont demandé d’être plus transparents et de leur communiquer plus régulièrement nos actions », a indiqué le Dr Amyot.

En fait, a-t-il ajouté, une absence de communication constitue une forme de communication en soi, qui est malheureusement mal perçue par les gens directement concernés. « Le souci d’accroître en quantité et en qualité les communications destinées aux membres de l’AMOLL était donc nécessaire », a-t-il dit.

Le Dr Amyot a profité de sa tribune pour dresser la liste exhaustive des initiatives de l’AMOLL depuis un peu plus d’un an, dont l’embauche d’un conseiller en communication. Il a aussi cité la création d’une bibliothèque virtuelle, les bulletins d’information saisonniers et ceux qui sont diffusés à la suite des rencontres du CA et les consultations des membres sur le Web. Un des actuels projets de l’AMOLL est de créer une trousse d’accueil pour les nouveaux médecins qui se joignent à l’association.

« Déjà, les retombées sont fort positives. Le taux de satisfaction est élevé auprès de nos quelque 870 membres, le CA bénéficie d’une meilleure représentativité, notre association profite d’une plus grande légitimité et crédibilité et les échanges avec nos membres ont été grandement améliorés », a signalé le Dr Amyot. Il a toutefois tenu à préciser que le conseil d’administration doit être actif et participer à un tel processus. « C’est la principale condition pour réussir à établir de meilleures communications. »

...et celle de l’AMOY

C’est la loi 20, des commentaires négatifs sur les médias sociaux ainsi que l’incessant « Doctor Bashing » dans les mé­dias qui ont incité l’AMOY à se doter d’un plan de communication en septembre 2017, a fait savoir le Dr Jacques Bergeron.

Son association a, elle aussi, embauché une conseillère en communication afin de mieux orchestrer le procédé. « On souhaite ainsi se rapprocher de nos membres, du grand public, des représentants politiques locaux et des médias. On veut susciter la vie associative en stimulant la participation, l’engagement et la mobilisation de nos membres. De plus, on veut désormais transmettre davantage d’informations pertinentes à saveur locale et, surtout, mettre en valeur les réalisations de nos membres », a indiqué le Dr Bergeron.

Jusqu’à maintenant, cette volonté de l’AMOY de mieux communiquer s’est traduite par plus d’une vingtaine d’initiatives, allant des journées de formation offertes aux futurs membres, à la collaboration, en passant par l’engagement et la participation à des événements locaux, tels que la Grande Marche de Granby et de Saint-Hyacinthe, la mise à jour régulière du site Web, davantage de veilles des médias sociaux et de meilleures relations avec les élus locaux. Une lettre de félicitations a d’ailleurs été envoyée à chacun d’eux lors des dernières élections municipales, a précisé le Dr Bergeron. Il a également ajouté que d’avoir un contact privilégié dans un média local aide à mieux communiquer avec le grand public.

Soyez des agents de changement

« Au cours des dernières années, les communications sont devenues des vecteurs politiques », a pour sa part enchaîné Jean-Pierre Dion, directeur des Communications à la FMOQ. Invité à conclure ce forum, M. Dion a reconnu que les médecins n’ont pas eu la vie facile depuis quatre ans. « Vous avez eu à composer avec une couverture médiatique extrêmement négative, de la désinformation, de la pression provenant des autres professionnels de la santé et, surtout, de nombreuses critiques quant à votre accessibilité envers la population », a mentionné Jean-Pierre Dion.

Et, a-t-il poursuivi, les médias sociaux, qui ont complètement changé la donne en matière de communication, s’en sont mêlés. « Il y a quatre ans, la page Facebook de la FMOQ avait 1000 adeptes. Elle en compte aujourd’hui sept fois plus. »

M. Dion a également présenté un bilan des communications de la FMOQ depuis 2015 et un plan d’action sur le plan des orientations jusqu’en 2020. Le bilan compte pas moins de 25 communiqués, plus de 1000 entrevues, huit lettres ouvertes parues dans les quotidiens nationaux et une participation aux campagnes publicitaires. « Malgré tout, il y a un fossé entre la perception des membres et le travail accompli à la FMOQ. Et ce, même si aucune autre organisation professionnelle de la santé n’est aussi présente dans les médias depuis quatre ans. Les membres se sentent injustement attaqués par le ministre Barrette, les politiciens et les médias. Et nos réponses rationnelles ne semblent pas toujours répondre à leurs attentes », a concédé M. Dion.

Qu’à cela ne tienne, il faut s’ajuster, a-t-il dit, et demeurer le plus zen possible avec la prochaine vague à venir. « Il faudra investir davantage de ressources dans les communications et dans la transmission de l’information. On peut faire mieux. Il y a de la place pour de nouvelles idées et initiatives. Il faudra faire davantage la promotion de nos bons coups. En fait, a-t-il conclu, les médecins cliniciens seront appelés à devenir des agents de changement. C’est dans ce rôle que leur message semble être le plus crédible auprès de la population. » //




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