pour une participation massive des médecins !
Le Dossier Santé Québec (DSQ) est en cours de déploiement dans votre région. Un représentant de l’Agence de santé et des services sociaux de votre territoire vous invite à y participer. Vous vous posez alors plusieurs questions : Suis-je obligé d’y participer ? Devrai-je l’alimenter moi-même ? Mon personnel y aura-t-il accès ? Si j’y participe, aurai-je l’obligation de l’utiliser systématiquement pendant les consultations ? Pourrai-je verser dans mon DME les renseignements vus dans le DSQ ? Quel sera l’apport véritable de ce dossier dont le déploiement a tant tardé ?
Pour vous éclairer, voici des réponses ou des réflexions sur ces questions que plusieurs d’entre vous ont déjà soumises à notre attention.
Le DSQ est encadré par la Loi concernant le partage de certains renseignements de santé, LRQ c. P-9.0001. Adoptée en 2012, cette loi a pour objet de mettre en place des actifs informationnels, dont le DSQ, afin de permettre le partage de certaines informations sur la santé jugées « essentielles ». Cette nuance est importante, car le Dossier Santé Québec n’est pas un dossier médical électronique qui témoigne du suivi longitudinal du patient. Il regroupe plutôt simplement certaines données qui peuvent être utiles, particulièrement lors d’une prise en charge en complémentarité ou en continuité avec d’autres intervenants. Il est particulièrement efficace en cas d’urgence, car il peut être consulté quel que soit le lieu où le patient a reçu les services.
Me Christiane Larouche, avocate, travaille au Service juridique de la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec. |
La Loi prévoit la constitution de six domaines cliniques, à savoir :
h les médicaments ;
h les analyses de laboratoire ;
h les examens d’imagerie médicale ;
h l’immunisation ;
h les allergies et les intolérances ;
h le sommaire d’hospitalisation.
Pour l’instant, seuls les domaines des médicaments, des analyses de laboratoire et des examens d’imagerie médicale sont en cours de déploiement et seront accessibles aux médecins qui participeront au DSQ.
« On doit donc conclure à une participation massive des citoyens au DSQ, ce qui favorisera son utilité pour tous. » |
La participation des citoyens au DSQ est automatique, à moins que ces derniers se prévalent de leur droit de refus. Le ministère de la Santé assume donc l’obligation d’informer la population sur le but, le contenu et le fonctionnement du DSQ par des campagnes publicitaires. Le Ministère gère aussi la collecte des refus de participer au DSQ et en fait part aux gestionnaires des banques de renseignements. Même si un citoyen exerce son droit de refus, les données qui le concernent seront tout de même recueillies, mais ne seront pas consultables. Ainsi, s’il change d’idée et décide d’adhérer au DSQ par la suite, les renseignements recueillis pendant la période de refus deviendront alors accessibles à la date du consentement. Dans tous les cas, le professionnel qui accède au DSQ sera prévenu de l’existence d’un refus.
À ce jour, les refus sont rarissimes. On doit donc conclure à une participation massive des citoyens au DSQ, ce qui en favorisera l’utilité pour tous.
La Loi sur le partage de certains renseignements de santé n’oblige pas les médecins de famille à participer au DSQ. La FMOQ s’est toujours opposée à la participation obligatoire, préférant de loin des mesures incitatives plutôt que coercitives. C’est ainsi que pour favoriser l’adoption massive du DSQ dans des conditions gagnantes, la FMOQ a négocié une entente particulière sur la participation des médecins omnipraticiens au DSQ et au programme québécois d’adoption des dossiers médicaux électroniques (PQADME). Pour bénéficier des mesures de soutien prévues, le médecin doit s’engager formellement à participer au DSQ dès son déploiement dans sa région. En d’autres termes, le médecin s’oblige lui-même à participer au DSQ de façon libre et volontaire.
Que le médecin omnipraticien accepte ou non de participer au DSQ, il aura l’obligation de transmettre certains renseignements visés par la Loi sur le partage de certains renseignements de santé pour le DSQ, soit ceux sur les allergies et les intolérances ainsi que sur la vaccination. L’étendue des données à communiquer a été précisée dans un règlement adopté par le législateur en juin dernier. La liste est exhaustive.
La FMOQ ne conteste pas l’exigence selon laquelle les médecins sont tenus de fournir ces renseignements pour assurer l’intégralité et la qualité de ces domaines. Cependant réaliste, la FMOQ a enjoint le ministre de la Santé à mettre des règles facilitantes pour les médecins de famille afin de réduire au minimum les inconvénients sur les prestations de soins. Particulièrement en ce qui a trait aux données de vaccination, les systèmes informatiques devraient permettre l’entrée fluide et automatisée dans la mesure du possible. Évidemment, il faut aussi que le ministère établisse la façon dont les professionnels non participant communiqueront les renseignements (par ordinateur ou par écrit).
Dans l’intervalle, comme ces dispositions ne sont pas encore en vigueur, le médecin n’a pas à alimenter le DSQ.
Une personne qui rend des services de soutien technique à un médecin participant au DSQ pourra obtenir une autorisation d’accès au DSQ. Le Règlement sur les autorisations d’accès et la durée d’utilisation des renseignements contenus dans une banque de renseignements de santé d’un domaine clinique autorise cette personne à recevoir la communication des informations se trouvant dans les banques de renseignements de trois des six domaines du DSQ :
Votre personnel administratif pourra donc vous soutenir dans votre pratique en reproduisant plus ou moins la réalité qui existait à l’ère des dossiers papier.
L’accès au DSQ n’entraîne pas l’obligation automatique de le consulter à chaque visite d’un patient. Le médecin devra plutôt se servir de son jugement clinique pour déterminer si la consultation du DSQ est nécessaire ou utile dans le cadre de la prestation de soins. Il devra chaque fois tenir compte des circonstances pour établir ce que serait une bonne pratique.
Par exemple, la consultation du DSQ n’est probablement pas essentielle dans le cadre du suivi courant d’un patient qu’il connaît bien alors qu’il a déjà tous les résultats dans le DME et que rien de particulier ne s’est produit depuis la dernière visite. Il en serait toutefois autrement dans le cas d’un patient inconscient arrivant à l’urgence et qui n’est jamais venu dans l’établissement.
Le médecin autorisé à recevoir la communication de renseignements de santé contenus dans le DSQ pourra consigner dans son dossier local uniquement les données dont il a besoin pour prodiguer ses services. Il pourra le faire par écrit, par dépôt de photocopie ou par téléchargement directement dans le DME. En d’autres termes, le médecin ne pourra intégrer que les renseignements dont il devait tenir compte pour traiter le patient ce jour-là, même si d’autres informations pourraient s’avérer très pertinentes dans le suivi futur du patient. Ce qui est « nécessaire » demeure donc subjectif et sujet au bon jugement du médecin.
Le comité sur les enjeux juridiques auquel avait participé la FMOQ dans le cadre des travaux sur le DSQ avait demandé une reconnaissance dans le DME de l’ensemble des renseignements consultés, car ceci soulève la question plus large de l’interopérabilité du DSQ et du DME. Le législateur en a décidé autrement, pour l’instant.
Il est utile de rappeler que les résultats des analyses de laboratoire et ceux des examens d’imagerie ne sont pas transmis au médecin requérant par l’entremise du DSQ. Le DSQ est essentiellement un outil de visualisation. Il ne contient pas les fonctions indispensables pour assurer un suivi des résultats de façon efficace et sûre.
Enfin, il y a lieu de noter que le médecin devra obtenir une autorisation spécifique de son patient avant de communiquer un renseignement qu’il a consigné dans son dossier local après consultation d’une banque de renseignements du DSQ. Une autorisation générale du patient à communiquer son dossier médical ne sera pas suffisante.
Le déploiement du DSQ se fait progressivement en tenant compte du degré de préparation technologique des différentes régions. À la fin août, l’alimentation des trois domaines en cours de déploiement allait bon train, particulièrement en ce qui a trait aux examens d’imagerie médicale et aux médicaments (tableau I1).
Le DSQ est de plus consulté par plusieurs cliniques et établissements (tableau II1). Selon les données du PQADME, on comptait en date du 5 septembre 2014, 2497 demandes d’adhésion au PQADME, dont 2174 provenaient des médecins et étaient dûment acceptées.
Les données qui précèdent sont franchement encourageantes. Il ne fait plus aucun doute que le PQADME aura eu l’effet que la FMOQ recherchait, soit l’adoption des DME et dans son sillon celle du DSQ comme outil complémentaire. La dernière année témoigne d’ailleurs d’un virage important : ceux qui n’ont pas déjà adopté un DME sont sur le point de le faire. Fort heureusement, les médecins qui l’ont déjà fait se disent satisfaits.
En conclusion, la participation des médecins de famille au PQADME se fait selon une approche fondée sur le volontariat et les incitatifs qui favorise le recours massif au DSQ de manière à en assurer le succès. Pourquoi vous priveriez-vous des avantages du DSQ ? //