Départ de la présidente, la Dre Christiane Simard
Depuis quatorze ans, la Dre Christiane Simard était à la tête de l’Association des médecins omnipraticiens du Sud-Ouest. Au cours de l’assemblée générale de son association, le 30 octobre dernier, elle a annoncé son départ comme présidente.
Dre Christiane Simard
« J’ai tenté de vous représenter avec le plus d’honnêteté possible et surtout de représenter les médecins de terrain que vous êtes, a expliqué à ses membres la Dre Simard. J’ai essayé d’être très terre à terre dans mes préoccupations quand j’allais parler en votre nom à la FMOQ. »
La Dre Simard connaît les valeurs profondes de ses membres. « Ce dont je me suis rendu compte c’est que même si l’argent est important, ce n’est pas seulement cela qui compte à vos yeux. Ce n’est pas ce qui vous fait bouger. Pour vous, l’organisation des services de santé est importante, tout comme la perception que la population a de vous. J’ai essayé de véhiculer ces valeurs le plus que je pouvais. »
Au cours de sa présidence, la Dre Simard a vu passer huit ministres de la santé, de M. Jean Rochon jusqu’au Dr Gaétan Barrette, en passant par M. François Legault. Sous le mandat de ce dernier, elle avait d’ailleurs commencé à engager des procédures judiciaires pour invalider la nouvelle loi qui permettait au gouvernement de forcer des omnipraticiens à aller pratiquer dans diverses urgences.
La présidente a aussi connu les arcanes des négociations. Elle a vu les dessous des discussions avec le gouvernement. « Ce qui rend les choses un peu difficiles, c’est que le ministère de la Santé et des Services sociaux est à la fois notre partenaire, celui qui nous paie et celui qui doit rendre des comptes à la population. Cela nous met parfois dans une drôle de situation. »
Au cours de toutes ces années, la Dre Simard a aussi été témoin de l’évolution de la FMOQ. De sa démocratisation. « Le processus a commencé avec le président Renald Dutil. Maintenant, les présidents d’association et les responsables de contestation sont très écoutés, et le tir est souvent rajusté à partir de leurs commentaires. »
La Dre Simard reste préoccupée par la question de l’accès de la population à un médecin de famille. « Il faut revenir à la base : être des médecins qui voient des personnes malades. En revenant juste à cela, on fait déjà une grosse part de notre travail. » L’éparpillement dans différentes tâches est insidieux. « Chaque fois que je fais quelque chose, je me demande : «Est-ce vraiment mon travail ?» Et parfois je suis surprise de m’entendre dire : «Eh bien non ! Ce n’est pas du tout ta job !» »
Déléguer n’est pas toujours facile. La Dre Simard le sait. « Les choses ne seront pas faites comme moi je le ferais, mais ça se peut que ce soit quand même bien fait. Je pense que chacun de nous doit se questionner là-dessus. »
Les omnipraticiens ont d’ailleurs une responsabilité à l’égard de la population. « Ce qu’on doit livrer ce sont des services. Cela touche tous les médecins : les jeunes qui commencent et qui vont devoir se poser des questions sur leur pratique et les plus âgés qui doivent aussi se remettre en question. Il faut donner des résultats. »
Le travail des omnipraticiens se fait cependant dans le cadre de structures. La Dre Simard a commencé sa pratique avec les régies régionales, puis s’est retrouvée avec les agences de la santé et des services sociaux actuelles. Et sous peu, elle va faire affaire avec les centres intégrés de santé et de services sociaux (CISSS). « Les structures ce sont beaucoup alourdies. Même s’il faut se concentrer sur notre travail de médecin, on doit quand même s’y engager pour veiller à nos intérêts. Ainsi, on sera peut-être capables de les alléger. C’est ce que je nous souhaite. »
Le projet de loi no 10 sur la restructuration du système de santé va ébranler le réseau. L’agence et les établissements d’une région seront fusionnés pour ne constituer qu’un seul établissement : le CISSS. La Dre Simard en craint les conséquences pour la Montérégie.
Assemblée générale de l’Association du Sud-Ouest
« Il n’y aura plus qu’un seul conseil d’administration (CA) et un seul conseil des médecins, dentistes et pharmaciens (CMDP) dans la région. Le CISSS va régir 2400 médecins en Montérégie. C’est complètement fou. Comment le petit hôpital d’Ormstown va-t-il tirer son épingle du jeu ? Comment une région comme Vaudreuil-Dorion, où il n’y a pas d’hôpital, va être entendue dans une structure aussi grosse ? Si on veut faire une réunion du CMDP, il va falloir qu’on aille au Carrefour DIX30. Cela n’a aucun sens pour les médecins, les patients et les gestionnaires. Il va falloir qu’on se mobilise. »
Les pouvoirs que s’accorde le ministre semblent par ailleurs énormes à la Dre Simard. « Il nomme tous les membres du CA du CISSS. Il a tempéré ses déclarations en disant que les mesures sont transitoires et que dans quelque temps tout cela changerait. Toutefois, mais pour le moment c’est une autocratie. Cela n’a pas de sens. »
La Dre Simard est fière de son territoire. « Après quatorze ans à la présidence, ce dont je me rends compte c’est à quel point on est une région innovatrice. On est capable d’inventer beaucoup de choses et on a été des précurseurs dans bien des domaines. » Un exemple ? Les tables de concertation qui, bien avant l’arrivée des GMF, ont permis aux cliniques médicales de collaborer et qui ont déjà intégré des pharmaciens avant que ce ne soit dans l’air.
Actuellement, plusieurs projets intéressants se préparent, comme cette unité de médecine familiale à Valleyfield. « Ce sera une très bonne façon de recruter de jeunes médecins et surtout de les retenir. Il pourrait aussi éventuellement y avoir une unité d’accès populationnel à Vaudreuil-Dorion. »
Le nouvel accueil clinique de la région, lui, devrait faciliter la tâche des médecins de première ligne. Le nouveau CLSC, de son côté, va offrir des services de deuxième ligne donnés par des spécialistes de Valleyfield. « Je pense qu’il y a de beaux projets qui s’en viennent pour les médecins comme pour les patients. » La Dre Simard, pour sa part, restera un an comme présidente sortante, un nouveau poste qui a été créé pour faciliter la transition.
Dr Serge Lalonde
À la fin de l’assemblée générale, le Dr Serge Lalonde, vice-président depuis six ans, a été élu à la tête de l’Association des médecins omnipraticiens du Sud-Ouest. Ayant commencé à pratiquer en 1979, il est membre du bureau de l’Association depuis 2000.
Le Dr Lalonde s’intéresse à la fois aux dossiers régionaux et provinciaux. En ce qui concerne son territoire, il appréhende le nouveau cadre de gestion que prépare le gouvernement pour les GMF. Le sud-ouest du Qué»»bec comporte de petits groupes qui, déjà, ne répondent pas aux exigences actuelles. « Ils sont directement menacés, et il va falloir les soutenir », dit-il.
La situation de ces GMF s’explique par ailleurs. « On était parmi les premiers groupes. On nous a poussés à devenir des GMF en nous disant que cela allait nous faire évoluer et amener des médecins dans la région. Cela ne s’est cependant pas réalisé. Comme il n’y a pas de relève, il est difficile d’augmenter le nombre de nouveaux patients inscrits et de parvenir aux cibles fixées qui sont d’ailleurs inatteignables », affirme le Dr Lalonde. Il craint le pire si les exigences envers ces groupes se durcissent. Les médecins pourraient mal réagir.
Sur le plan provincial, le Dr Lalonde surveille les suites du projet de loi no 10 sur la réorganisation du système de santé. Il s’intéresse également à la question de l’amélioration de l’accès à un médecin de famille.
Aux yeux du nouveau président, il est possible d’accroître la disponibilité des médecins de famille. Il faut pour cela intervenir sur certains facteurs. « On n’a pas les ressources suffisantes et on a des modèles de pratique qui datent », explique-t-il. D’un côté, il faudrait plus d’infirmières pour épauler les médecins, mais de l’autre, les omnipraticiens doivent organiser leur pratique différemment. « On s’est installé dans un certain confort pour se protéger. Il y a environ vingt ans, il le fallait parce que la demande était énorme à cause des compressions budgétaires et des mises à la retraite dans le cadre du déficit zéro. Les médecins ont donc gardé ce vieux modèle d’accès avec des rendez-vous et des clientèles fermées. Il faut qu’on accepte de changer. »
Au sein de son association, le Dr Lalonde veut avoir un contact plus étroit avec ses membres. « J’espère susciter une plus grande participation à la vie syndicale, surtout en ce qui concerne la relève. »