L’entente signée le 2 juin 2015 par le président de la FMOQ et le ministre de la Santé et des Services sociaux a pour but d’améliorer l’accessibilité des services médicaux de première ligne. Cette entente constitue une solution de rechange à l’adoption du projet de loi n<sup>o</sup> 20 et elle en aura soulagé plus d’un. Néanmoins, rien n’est encore gagné.
Mme Marianne Casavant est conseillère en politique de santé à la direction de la Planification et de la Régionalisation de la FMOQ. |
Les médecins devront mettre la main à la pâte pour appliquer le contenu de l’entente et s’adapter davantage aux besoins de la population. De son côté, la Fédération fera un suivi rigoureux afin de s’assurer que le gouvernement respecte son engagement d’instaurer des mesures facilitantes pour permettre la prise en charge de 85 % des Québécois par un médecin de famille. À terme, la Fédération veut l’abolition complète des AMP. Dans cette foulée, la FMOQ et le MSSS ont mis en branle de nombreux chantiers, notamment celui de la révision de l’Entente particulière relative aux AMP.
Les AMP ont fait leur apparition au début des années 1990 dans la Loi sur les services de santé et les services sociaux. Elles avaient pour but d’orienter, sur une base régionale, les médecins vers les secteurs d’activités que le gouvernement estimait prioritaires.
Cependant, l’entente particulière relative aux AMP aura tardé à s’adapter. Jusqu’à présent, malgré le souhait exprimé par les médecins et les patients d’avoir accès rapidement à des services médicaux de première ligne, les modalités d’application prévoyaient d’abord l’orientation des effectifs vers les établissements et, accessoirement, vers les cabinets. Si un premier pas a été fait en 2011 pour corriger le déséquilibre entre les services de première et de deuxième ligne, il aura fallu attendre en 2015 pour convaincre le MSSS de permettre à un médecin de moins de 20 ans de pratique d’exercer exclusivement en cabinet.
Le 1er septembre 2015, une version amendée de l’entente particulière sur les AMP est donc entrée en vigueur. Pour l’essentiel, les modifications visent à rehausser la prestation de services médicaux d’inscription et de suivi de clientèle au même degré de priorité que les principaux secteurs de pratique en établissement. Seule l’urgence d’un établissement conserve un degré de priorité supérieur. Quant à l’AMP de catégorie V, soit l’AMP mixte, elle disparaît. Avec de tels changements, tous les médecins en début de pratique ou ceux dont l’engagement relatif aux AMP vient à échéance peuvent se consacrer entièrement à la prise en charge. Les médecins en cours d’engagement peuvent également en faire la demande à leur DRMG.
Sur le plan de l’application, contrairement à la portion « prise en charge » de l’AMP mixte, les règles d’équivalences relatives à l’AMP « prestation en première ligne de services médicaux, d’inscription et de suivi de clientèle » ne sont plus exprimées en heures, mais bien en nombre de patients. Le DRMG pourra ainsi reconnaître jusqu’à douze heures d’AMP aux médecins qui compteront 500 patients – vulnérables ou non – inscrits à leur nom. Quant aux médecins nouvellement en pratique, ou ceux qui commencent à faire de la prise en charge et du suivi, ils disposeront d’un an, à raison de 125 patients par trimestre, pour atteindre ce nombre. À noter que la provenance des patients et leurs profils ne peuvent pas être imposés. Le DRMG peut cependant déterminer les sous-territoires où cette AMP sera disponible.
Parmi les autres modifications apportées à l’entente, soulignons que les pénalités applicables pour non-respect de l’entente particulière sur les AMP ne s’appliqueront plus seulement à la rémunération tirée des activités réalisées en cabinet, mais bien à l’ensemble de la rémunération.
Le rôle du DRMG dans la gestion du dossier de chaque médecin et dans le processus de détermination des AMP est maintenu. La liste des AMP est dressée à la lumière de l’analyse que fait le DRMG des besoins de la région et l’approche professionnelle, qui est toujours de mise, assure au DRMG la latitude nécessaire pour adapter certaines situations particulières aux réalités du terrain.
L’objectif des modifications apportées à l’entente particulière relative aux AMP est d’accroître rapidement la disponibilité des médecins de famille en première ligne pour répondre aux besoins exprimés par la population. Depuis le 1er septembre 2015, qu’ils soient ou non en cours d’engagement, les médecins peuvent se prévaloir de l’AMP « prestation de services médicaux, d’inscription et de suivi de clientèle ».
L’adhésion d’un médecin aux AMP est de deux ans. Elle commence au trimestre suivant la date de la confirmation de l’adhésion par le DRMG et, à moins d’avis contraire, se renouvelle automatiquement à l’expiration de cette période.
Les médecins qui commencent leur pratique dans une région, ou ceux dont l’engagement vient à échéance, peuvent choisir des AMP parmi la liste qu’aura dressée le DRMG. Dans la mesure où les AMP retenues figurent à cette liste, le DRMG les approuvera. Soulignons que tous les médecins, quel que soit leur nombre d’années de pratique, peuvent se prévaloir des AMP indiquées sur cette liste.
Pour les médecins en cours d’engagement qui souhaiteraient modifier la nature de leur AMP, des nuances s’imposent. Ces médecins devront d’abord en faire la demande à leur DRMG. En principe, ce dernier tâchera de les accommoder, mais n’est pas tenu de le faire. Il analysera au préalable les demandes des médecins en tenant compte des répercussions sur les autres milieux et d’une possible rupture de services. S’il s’agit d’une cessation d’exercice en établissement, les médecins devront s’assurer qu’un préavis écrit de soixante jours a été expédié à l’établissement.
Au cours des dernières années, les AMP ont créé un déséquilibre entre les secteurs de première et de deuxième ligne. Devant les problèmes d’accès à un médecin de famille, il devenait primordial de faire contrepoids en proposant l’amendement de l’entente. Les modifications retenues visent à donner à la première ligne la place qui lui revient.
Néanmoins, malgré ces mesures, l’enjeu de l’accès aux services de première ligne reste de taille. D’ici la fin de l’année 2017, 85 % des Québécois devront être inscrits auprès d’un médecin de famille. Pour y arriver, la cohésion du groupe est essentielle, et l’effort doit être collectif. Si l’atteinte du but peut libérer les médecins de famille des AMP, l’échec risquerait par contre d’emprisonner la profession en raison de l’adoption possible de nouveaux règlements coercitifs par le gouvernement. //
Note : Au cours des prochaines semaines, le comité paritaire FMOQ-MSSS chargé d’assurer la mise en œuvre et le suivi de l’application de l’Entente relative aux AMP rendra disponible un guide de gestion des AMP, sur le site Internet de la FMOQ. Nous vous invitons à en prendre connaissance.
Pour tout renseignement concernant cette entente : Dr Serge Dulude, Mme Marianne Casavant et Me Pierre Belzile.