Quand faut-il adresser un patient atteint de troubles mentaux à une nutritionniste ? La Dre Marie-Claude Delisle, psychiatre à l’Institut universitaire en santé mentale de Montréal, oriente fréquemment ses patients vers une diététiste pour réduire la prise de poids souvent associée à la pharmacothérapie. « Si je ne peux pas cesser les médicaments, parce qu’ils sont essentiels au patient, je vais m’assurer que ce dernier n’aura pas d’autres problèmes à cause de son poids. »
Le patient gagne à avoir une prise en charge précoce, indique Mme Mélanie Massé, nutritionniste clinicienne à l’Institut universitaire en santé mentale de Montréal. « On peut diriger d’emblée vers une diététiste un patient qui reçoit une prescription d’antipsychotique. Il faut s’assurer dès le départ que son alimentation est saine pour freiner le gain de poids. C’est beaucoup plus encourageant pour une personne d’agir tout de suite, de manière préventive, que d’attendre que l’obésité s’installe et de traiter ensuite les problèmes associés. »
La nutritionniste peut aussi aider le patient qui présente des effets indésirables à cause des médicaments : xérostomie, nausées, constipation, diarrhée, diminution de l’appétit. « Souvent la clientèle ne prend pas fidèlement ses médicaments à cause des effets secondaires. On va donc essayer de réduire ces problèmes pour améliorer l’observance », dit la diététiste.
La Dre Delisle peut aussi orienter un patient vers une nutritionniste s’il présente des carences. « Parfois, il manque un groupe alimentaire dans l’alimentation de la personne. C’est nous, les nutritionnistes, qui pouvons le voir. Nous pouvons ensuite régler le problème de manière naturelle plutôt que par des suppléments », précise Mme Robin Glance, nutritionniste à l’Hôpital général de Montréal.
La Dre Delisle fait également appel à une diététiste pour les patients qui n’ont pas assez d’argent, de temps ou de connaissances pour se nourrir adéquatement. « Il faut poser des questions sur la qualité de l’alimentation ainsi que sur la sécurité alimentaire, qui est liée à la quantité, à la qualité et à la fraîcheur des aliments », conseille Mme Massé.
Les patients atteints de problèmes de santé mentale constituent une clientèle particulière. « Ils ont besoin d’une plus grande attention. Le cheminement va être plus long. Il va falloir y aller objectif par objectif pour pouvoir atteindre le but qui est d’adopter une saine alimentation. La nutritionniste en santé mentale connaît des techniques d’entretien motivationnel reconnues et efficaces pour favoriser le changement chez ce type de patients », dit Mme Massé.
Une nutritionniste peut aussi s’avérer nécessaire dans les cas difficiles. Que faire, par exemple, dans le cas de patients atteints d’un trouble obsessif compulsif de comptage ? « Ils comptent tout ce qu’ils consomment. Ils ne peuvent donc pas manger de riz ni de couscous, mais doivent quand même prendre des produits céréaliers. On doit alors adapter leur alimentation. » Il existe également des personnes autistes ayant des sélectivités alimentaires. « Certaines ne veulent manger que du rouge. On doit donc combler leurs besoins uniquement par des aliments rouges. On a parfois besoin d’utiliser notre créativité. »
Une saine alimentation est une solution qu’aiment bien des patients. « Dans les études, les programmes de nutrition sont très appréciés, mentionne Mme Glance. Les gens ont ainsi le sentiment qu’ils peuvent se soigner eux-mêmes. C’est un élément qu’ils maîtrisent. Le patient a ainsi le pouvoir de faire des changements plutôt que d’avaler encore une autre pilule. » //