Nous n’avons pas terminé notre discussion sur la période visée par le nouveau mode mixte dans la chronique précédente. Reste aussi à traiter des services. Allons-y !
Le Dr Michel Desrosiers, omnipraticien et avocat, est directeur des Affaires professionnelles à la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec. |
Nous avons vu que le mode mixte s’applique pendant certaines plages horaires. Mais comment se fait le calcul de la durée pour réclamer la rémunération horaire à forfait ?
Le médecin qui adhère au mode mixte doit réclamer le pourcentage de l’acte applicable lors de ses activités régulières dans son secteur d’adhésion. Toutefois, il ne peut demander le forfait horaire à moins d’avoir exercé au moins soixante minutes consécutives au courant de la journée dans le secteur en cause. Le médecin qui ne pratiquerait que trente minutes dans un secteur où il est payé selon le mode mixte ne pourrait donc réclamer le forfait horaire. Il serait limité aux actes effectués selon le pourcentage permis du tarif. C’est déjà une amélioration par rapport à ce que prévoient les règles pour le tarif horaire.
Au-delà de cette première heure dans la journée, des périodes additionnelles du forfait horaire sont facturées pour chaque période complète de quinze minutes de services. Le médecin qui exercerait à raison de six heures vingt minutes dans un secteur où il est rémunéré selon le mode mixte demanderait ainsi six heures et quinze minutes selon le forfait horaire.
Lors de la facturation des forfaits horaires, le médecin devra indiquer la plage horaire dans laquelle il a fait la première heure et par la suite réclamer l’ensemble des périodes supplémentaires de quinze minutes dans la même plage horaire, même lorsque la durée totale des forfaits excède celle de la plage horaire en cause. Il peut répartir les périodes supplémentaires entre les plages, s’il le veut.
Nous verrons ultérieurement que les forfaits horaires ne sont pas majorés en horaire défavorable. Le médecin n’est donc pas désavantagé par cette façon de faire. Et notez que contrairement à ce qui prévaut à tarif horaire, il n’y a pas de banque annuelle individuelle de forfaits horaires qu’un médecin peut réclamer. Les forfaits sont payés au même taux en tout temps pendant l’année durant la période où le mode est applicable (de 8 h à 24 h, sept jours sur sept).
Il n’existe pas de supplément d’honoraires pour certaines activités (gestion des rapports) ou le pourcentage du supplément d’honoraires est réduit pour les activités médico-administratives. Pour les premières, le médecin payé selon le mode mixte reçoit donc moins que le tarif horaire et, pour le deuxième, un montant comparable. |
Des codes d’actes sont généralement prévus pour des services rendus à un patient donné. Ces codes ou la façon de les décrire varient d’un secteur à l’autre. Pour les activités en CLSC, en soins gériatriques de courte durée, en soins de longue durée, en réadaptation, en soins palliatifs et en psychiatrie, les actes retenus sont connus.
Dans certains autres secteurs, comme la santé publique et la santé et la sécurité au travail, la notion du patient est différente, car il s’agit de soins à la population. De ce fait, aucun code d’acte n’existait. Des codes d’actes ont alors été créés seulement pour les médecins qui se prévalent du mode mixte. Cette approche est exceptionnelle. On ne trouvera que quelques libellés spécifiques dans les autres secteurs.
À part les secteurs où la nomenclature sera propre au mode mixte, presque tous les codes d’actes seront accessibles dans le mode mixte. Le médecin n’aura donc pas à se limiter à un éventail restreint d’actes, contrairement à ce qui est le cas dans le Régime B des honoraires fixes, par exemple.
Une portion de la rétribution de ce mode est fonction de la rémunération à l’acte pour les différents services effectués. Mais nous savons bien que le mode à l’acte ne rétribue pas tous les services que peut rendre un médecin. Pour l’instant, le temps de gestion des rapports de laboratoire ou de consultation, par exemple, ne donne pas droit à une rémunération. Il en va de même des activités médico-administratives ou des services non assurés (comme remplir un formulaire d’assurance invalidité). Comment seront payées ces activités dans le cadre du mode mixte ?
D’abord, le forfait horaire peut être réclamé pour toutes les activités professionnelles du médecin, y compris la gestion des rapports et les activités médico-administratives, mais non pour les services non assurés (comme remplir un formulaire d’invalidité pour un assureur). Lorsque le médecin rend des services non assurés, il ne devrait pas comptabiliser ce temps pour établir la durée du forfait horaire qu’il peut facturer. Comme pour le médecin à l’acte, c’est au patient ou au tiers qui requiert le service de payer le médecin pour les services non assurés.
Lorsqu’il existe un acte pour le service effectué, le médecin réclame le pourcentage prévu pour le service en question, selon la nature de ce dernier ou le secteur dans lequel il exerce. Lorsqu’il s’agit des services évoqués précédemment, certaines adaptations ont eu lieu. Aucune rémunération additionnelle n’est prévue pour la gestion des rapports et d’autres activités clinico-administratives. Toutefois, dans le cadre du mode mixte, une rémunération additionnelle est prévue pour les activités médico-administratives. Le code de cette rémunération, qui vient s’ajouter à celle du forfait horaire en fonction du pourcentage applicable, est propre à chaque secteur. Cependant, le revenu que le médecin retire de ces deux voies de rémunération est celui du tarif horaire actuel. Ce résultat est identique d’un secteur à l’autre.
Vous aurez donc compris que la somme des deux formes de rémunération fait en sorte que le médecin payé selon le mode mixte pour les activités médico-administratives a droit au même montant que le médecin à tarif horaire. Pour les activités de gestion clinique qui ne font pas l’objet de rémunération à l’acte, le médecin au mode mixte obtient la moitié de ce que reçoit le médecin à tarif horaire. Pour ses activités médico-administratives, le médecin qui était rétribué à tarif horaire et qui passe au mode mixte ne perd rien, mais il n’est pas gagnant à moins d’effectuer d’autres services et d’ainsi bonifier sa rémunération globale. Lors de ses activités clinico-administratives (suivi de rapports, appels à des patients, etc.), le médecin au mode mixte est perdant par rapport à la rémunération qu’il obtenait à tarif horaire. Ce sont ses gains provenant de ses activités cliniques qui doivent compenser ses pertes. Comme la gestion clinico-administrative découle des activités cliniques du médecin, il devrait y avoir un certain équilibre entre les deux.
C’est l’effet global qu’il faut regarder. Le pourcentage du supplément sur les services cliniques est plus important qu’il ne l’aurait été si les activités clinico-administratives avaient été payées à un taux supérieur. Le médecin retirera donc une bonification dans le mode mixte par rapport au mode à tarif horaire dans la mesure où il rend d’autres services pour lesquels une rémunération à l’acte existe.
De façon générale, outre certains secteurs qui possèdent une nomenclature qui leur est propre, tous les services peuvent être réclamés. Il y a toutefois une limite importante qui s’applique à la facturation de l’intervention clinique. Par crainte que des médecins bénéficient des majorations inhérentes au mode mixte en se servant systématiquement du code de l’intervention clinique pour l’ensemble de leurs activités cliniques (un équivalent de la rémunération horaire), une limite a été mise en place pour ce code.
Dans le mode mixte, au plus 90 minutes d’intervention clinique peuvent être réclamées pendant une plage horaire et au plus 180 minutes par jour. Lorsque le médecin exerce plus de quatre heures durant la plage horaire de l’après-midi, le maximum est rehaussé de 45 minutes pour la plage en cause, mais non le maximum quotidien. |
Essentiellement, une durée maximale par jour, tous patients confondus, a été fixée en fonction des plages existantes de services. Ces plages sont de 0 h à 8 h (période durant laquelle le mode mixte ne s’applique pas), de 8 h à 12 h, de 12 h à 18 h et de 18 h à 24 h. La restriction est qu’un médecin peut facturer au plus 90 minutes d’intervention clinique par plage horaire et au plus 180 minutes par jour.
Cette restriction établit une quantité, et non une proportion maximale stricte. Le médecin qui fait quatre heures de cabinet en avant-midi pourrait réclamer 90 minutes d’intervention clinique. Si son horaire chevauchait deux plages horaires, disons de 10 h à 14 h, il pourrait facturer jusqu’à 180 minutes d’intervention clinique. La proportion maximale dans les deux situations n’est pas la même.
Cependant, durant la plage de l’après-midi (durée de six heures), le médecin pourrait se percevoir comme étant indûment défavorisé. Pour éviter un tel résultat, un médecin qui exerce pendant au moins quatre heures pendant cette plage voit le maximum de la plage rehaussé de 45 minutes. Toutefois, le maximum quotidien n’est pas augmenté pour autant. Il n’y a pas d’ajustement comparable pendant la plage de soir. Espérons que les restrictions imposées ne seront pas trop contraignantes, bien qu’elles nécessitent des calculs lors de la facturation.
Reste à traiter d’une exception en CLSC visant l’urgence et les IVG et d’une autre en UMF visant l’urgence ainsi que du fonctionnement durant les heures défavorables et de la compensation qui pourra être accordée aux médecins qui adhéreront au mode mixte (du fait des délais de mise en place du mode). Ce sera le sujet du mois prochain. D’ici là, bonne facturation ! //