Plusieurs médecins vaccinent leurs patients dans le cadre de leurs activités. Certains organisent même des séances de vaccination de masse pour accroître le taux de vaccination au sein de leur clientèle. La conclusion d’un tarif spécifique, en octobre dernier, pour les séances de vaccination de masse en a probablement pris un certain nombre par surprise. Traitons des questions que vous pourriez vous poser.
Le Dr Michel Desrosiers, omnipraticien et avocat, est directeur des Affaires professionnelles à la FMOQ. |
Un nouveau code est entré en vigueur le 16 octobre 2016 pour la vaccination antigrippale de masse. C’est un exemple de plus que la rémunération dont un médecin peut se prévaloir lors de la vaccination varie selon le contexte et la nature du vaccin. Faisons le tour de ce qui s’applique.
L’annexe I du Préambule général prévoit que la rémunération de l’injection sous-cutanée, intradermique, intramusculaire ou intraveineuse, sauf celle qui est spécifiquement incluse dans le tarif, est comprise dans les honoraires de l’examen, de la visite ou de l’intervention. On doit donc saisir qu’en l’absence d’un tarif spécifique pour un type de vaccination, un médecin ne peut réclamer la vaccination en association avec une visite, un examen, une intervention ou un autre service au cours de laquelle l’examen d’un patient est rémunéré. La seule rémunération est alors celle qui est prévue pour l’examen.
En cabinet, en CLSC ou en UMF, la rémunération applicable pour l’évaluation sera alors généralement celle de la visite de suivi (lorsqu’il s’agit d’un patient inscrit et d’une visite sur rendez-vous ou dans le cadre d’une pratique d’accès adaptée) ou d’une visite ponctuelle mineure ou complexe (selon le contexte).
À domicile, il pourra s’agir de celle d’une visite à domicile auprès d’un patient en perte « sévère » d’autonomie ou, lorsque le nombre maximal de telles visites sous un même toit est dépassé, des types de visites applicables en cabinet, en CLSC ou en UMF.
En service de consultation externe d’un hôpital, il s’agira généralement d’un examen ordinaire ou complet, toujours selon le contexte.
Le médecin qui administre le vaccin à l’occasion des services courants à ses patients (lors de visites de suivi ou dans le cadre de sa pratique régulière) ne reçoit pas de rémunération supplémentaire.
Bien que l’évaluation et la vaccination associée soient généralement des services assurés, le règlement d’application de la Loi sur l’assurance maladie prévoit, à l’alinéa 22 h), que l’examen, le vaccin, l’immunisation et l’injection ne sont pas assurés : 1) pour un groupe de personnes, à moins que le professionnel qui offre ce service n’ait obtenu au préalable l’autorisation écrite de la Régie ; et 2) dans une école (tous les niveaux), un camp de vacances ou autres, une association ou un organisme. C’est cette règle qui explique l’exclusion des groupes dans le libellé du code de vaccination antigrippale de masse. L’exclusion peut s’appliquer si un employeur demande à un médecin d’organiser une séance de vaccination sur les lieux du travail au bénéfice de ses employés ou si une association faisait une telle demande au bénéfice de ses membres. On ne parle pas ici des membres d’une même famille qui reçoivent la vaccination en même temps ni même de l’ensemble de la clientèle d’un médecin ou d’une clinique.
La règle générale étant que le médecin n’est pas rémunéré spécifiquement pour la vaccination, quelles sont donc les exceptions ?
Le code 00474 (2,20 $ en cabinet ou à domicile) existe de longue date. Il est utilisé pour la rémunération de « l’injection intradermique, sous-cutanée et intramusculaire aux fins de prévention et de traitement, d’inoculation, de vaccination, etc. lorsqu’elle est faite sans examen ». Ce code date de l’époque où l’examen ordinaire exigeait minimalement une anamnèse et un examen du patient. On peut donc supposer qu’il existait des situations où le médecin vaccinait sans répondre à l’exigence de l’examen. La modification de la définition d’un examen ordinaire il y a quelques années pour n’exiger qu’un contact avec le patient pour une des raisons énoncées (tel qu’entreprendre un traitement) a modifié cet état de fait. À moins que la note versée au dossier par le médecin ne corrobore pas son contact avec le patient ni son rôle dans l’instauration du traitement, il est difficile d’imaginer une situation où le médecin administrera le vaccin sans répondre à l’exigence de l’examen. La conclusion demeure la même avec la nouvelle nomenclature en cabinet, à domicile, en CLSC et en UMF. Ce code devrait probablement être aboli, question d’éviter la confusion.
Notez que certains médecins peuvent parfois penser que ce code peut servir lorsque leur infirmière évalue un patient de façon autonome (ou lorsqu’ils sont présents au sein du cabinet) et procède à la vaccination. C’est oublier une des règles de base de la Loi sur l’assurance maladie selon laquelle les services assurés sont ceux que rend le médecin lui-même et qui sont requis sur le plan médical. Bien que cette exigence ne soit pas reprise dans le libellé, ce code peut seulement être utilisé par le médecin qui procède lui-même à la vaccination. Il ne peut servir à couvrir des frais associés lorsqu’une infirmière procède à la vaccination de façon autonome.
Certains gestes de désensibilisation (que plusieurs peuvent voir comme une forme de vaccination) font l’objet d’un tarif spécifique. Les codes figurent dans l’encadré. Vous remarquerez qu’un de ces codes (00400) est facturable seulement en l’absence d’un examen. Il n’est donc probablement plus valable. D’autres incluent l’ensemble des soins (00334 et 09425). Enfin, le code 00161 fixe la rémunération applicable à l’injection, mais n’inclut pas la rémunération des évaluations, qui sont payables en plus selon les règles générales.
En dehors des situations visées par ces codes, les règles générales s’appliquent lors d’une désensibilisation. Si le médecin doit examiner le même patient deux fois dans la journée, une première fois pour s’assurer de l’absence de contre-indication et une deuxième fois pour mesurer l’induration ou la rougeur après l’administration, deux évaluations peuvent être réclamées. Revoyez à ce sujet un article de cette chronique, paru en janvier 2007 (encadré).
Le nouveau code à venir sert à la rémunération de l’évaluation d’un patient dans le cadre d’une séance de vaccination antigrippale de masse, à l’exclusion de la vaccination d’un groupe (voir plus haut concernant la notion de groupe et le fait que les services ne sont alors pas assurés à moins d’une autorisation écrite de la RAMQ). Du fait des règles générales de l’Entente, la vaccination, si elle est effectuée par le médecin, ne donne pas droit à une rémunération supplémentaire. Le médecin qui se fait assister d’une infirmière pour le volet de la vaccination peut réclamer le tarif prévu, tant qu’il effectue l’évaluation de chaque patient. Il ne peut réclamer de frais pour le geste de l’infirmière qui est associé à l’évaluation par le médecin. Il ne peut réclamer de supplément de vulnérabilité, le cas échéant, ni le forfait annuel d’inscription en GMF. Il ne peut non plus se prévaloir du supplément pour l’inscription d’un patient orphelin, advenant qu’il inscrive le patient, ni de tout autre supplément prévu à l’entente. Toutefois, les majorations en horaire défavorable de même qu’en région désignée s’appliquent.
Le tarif est constant pour les 200 premiers patients évalués par le même médecin le même jour. Si plusieurs médecins participent à la séance le même jour, ce nombre s’applique à chaque médecin distinctement. À compter du 201e patient par médecin, le tarif par patient est réduit de moitié pour la balance des patients évalués le même jour.
Ce nouveau code s’applique avec ou sans rendez-vous, tant qu’il s’agit d’une séance de vaccination de masse. Toutefois, si vous donnez des rendez-vous aux fins de vaccination à un nombre très faible de vos patients, il ne s’agira pas d’une séance de vaccination de masse. Le nouveau code ne s’appliquera donc pas.
Certains médecins peuvent profiter d’une séance de vaccination antigrippale de masse pour mettre à jour la couverture vaccinale des patients qu’ils évaluent. Du fait du libellé qui parle d’évaluation dans le cadre d’une telle clinique, c’est alors le nouveau code qui s’appliquera.
Toutefois, un médecin qui organiserait une séance de vaccination de masse pour autre chose que la vaccination antigrippale ne pourrait pas utiliser le nouveau code.
Certains peuvent se demander si le nouveau code s’applique lorsqu’une clinique engage du personnel infirmier pour procéder à la vaccination antigrippale dans le cadre d’une séance de masse sans la participation de médecins. Comme il n’y a aucune évaluation par un médecin, le code ne trouve manifestement pas application.
On serait porté à croire qu’il s’agit d’un service non assuré. Comme la RAMQ fait une lecture très large de la portée de la loi, reste à voir comment elle évaluera pareille situation et si elle y verra un lien avec des services assurés.
Espérons que la facturation de la vaccination est plus claire pour vous. Le mois prochain, nous traiterons de la notion de 500 patients aux fins de tarification en cabinet, en CLSC et en UMF. D’ici là, bonne facturation ! //