Le 16 novembre 2015, le Programme de financement et de soutien professionnel pour les groupes de médecine de famille (GMF) a remplacé le cadre de gestion des GMF qui avait été adopté en 2002 par le ministère de la Santé. Contrairement à sa forme antérieure, le programme ne requiert plus la création d’une entité juridique. Bien que le ministère n’exige plus la signature d’une convention entre les médecins, un tel exercice s’avère toutefois toujours aussi pertinent.
Me Pierre Belzile, avocat, est directeur du Service juridique de la FMOQ. Mme Marianne Casavant est conseillère en politique de santé à la direction de la Planification et de la Régionalisation de la FMOQ. |
Le Programme de financement et de soutien professionnel pour les GMF a modifié de plusieurs façons la structure et les modalités qui encadraient jusqu’alors le fonctionnement des GMF. Cette importante refonte soulève son lot de questions. À ce jour, le MSSS travaille encore à fournir toutes les réponses. Essentiellement, les préoccupations des médecins concernent le financement, le soutien professionnel et les obligations.
Pourtant, en amont de ces enjeux, deux des éléments les plus importants de la constitution d’un GMF, soit la forme de son regroupement et ses règles internes de fonctionnement, demeurent trop souvent négligés.
Jusqu’à l’entrée en vigueur du nouveau programme des GMF en 2015, le ministère de la Santé exigeait de tous les GMF qu’ils forment une entité juridique autonome. Le GMF était ainsi créé par la signature d’une convention d’association par l’ensemble de ses membres. Cette convention venait préciser les grandes orientations et les règles de fonctionnement des médecins du groupe pour atteindre les objectifs définis dans leur offre de service. Cet engagement collectif était ensuite reproduit dans une seconde convention signée avec l’agence, puis approuvée par le ministre.
Le fait de doter le regroupement d’une personnalité juridique propre constituait pour le MSSS un moyen d’éviter que les agences et les CSSS n’octroient des ressources et du financement directement aux médecins. Dans ce modèle, la formule de l’association, bien qu’elle n’était pas exclusive, avait alors été privilégiée par les médecins de famille. Il s’agissait d’une forme juridique simple qui permettait de créer l’entité juridique exigée. Dans le nouveau programme, la structure est laissée à la discrétion des médecins. Les ressources sont toujours versées au GMF plutôt qu’aux médecins. Toutefois, on ne parle plus de l’accréditation d’un groupe, mais plutôt d’une adhésion collective à un programme.
Maintenant associée à un programme du ministère de la Santé, la dynamique contractuelle a été remplacée par une adhésion qui se fait par l’entremise de la signature d’un formulaire par chacun des médecins du regroupement. Le ministère de la Santé n’impose donc plus d’orientation visant à régir la nature de la structure juridique reconnue pour constituer un GMF. Il laisse cet aspect à la discrétion des médecins.
La signature d’une convention entre médecins n’étant plus une condition sine qua non à l’obtention du statut de GMF, plusieurs médecins négligent malheureusement d’entreprendre les discussions pour convenir entre eux d’une entente explicite relative aux modalités de fonctionnement interne du groupe.
Pourtant, à l’instar des établissements où les médecins sont soumis aux règles de régie interne du CMDP, les médecins exerçant en GMF, que ce soit en cabinet ou en établissement, auraient tout intérêt à se doter d’un dispositif contractuel confirmant les rôles et les responsabilités de chacun ainsi que les normes de gouvernance adoptées pour le bon fonctionnement du groupe. L’authentification des principes convenus entre les médecins tendra à favoriser la cohérence et la cohésion du groupe.
Évidemment, la complexité de l’exercice variera selon l’organisation du groupe et le degré de précision souhaité. À tout le moins, il semble important que le regroupement établisse un processus pour nommer un médecin responsable et définir des tâches qui lui seront confiées. Les obligations des médecins du GMF, comme la participation aux heures défavorables ou à l’occasion de journées fériées, les règles d’arrivée et de départ ou d’expulsion d’un médecin, ainsi que la gestion des vacances et des congés de maternité, constituent tous des éléments qui devraient être convenus préalablement à l’adhésion afin d’éviter tout malentendu.
Des clauses spécifiques devraient clarifier les grandes orientations portant sur les décisions prises au sujet du financement et du soutien professionnel que reçoit le GMF. Il en va de même pour la manière dont le GMF souhaite gérer les heures médicoadministratives prévues à l’entente particulière relative aux GMF.
Jusqu’à l’introduction du nouveau programme par le MSSS, la convention d’association était privilégiée pour former le regroupement de médecins. Maintenant, la formule juridique retenue peut prendre diverses formes. Il pourrait notamment s’agir d’une incorporation en société par actions, d’une association, d’une coopérative ou de toute autre forme légale de regroupement. On peut supposer que les médecins formant le regroupement aux fins du GMF verront ensemble, avec l’aide de leurs conseillers juridiques et financiers, la formule la plus appropriée sur les plans professionnel, commercial et fiscal.
La constitution d’un GMF ne requiert plus de la part du MSSS la signature d’une convention entre les médecins. Cependant, cet exercice s’avère toujours aussi pertinent. Il permet de confirmer le partage d’une vision commune vers l’atteinte des objectifs et contribue à protéger les bonnes relations entre les médecins. En se munissant de règles claires dès le début de la collaboration, certains pourront éviter les imbroglios qui, parfois, iront jusqu’à faire déraper le projet.
L’offre de service du GMF est collective et tend à évoluer. Il est donc logique que l’identification de règles de régie interne fasse partie des étapes de la démarche d’adhésion au programme et soit révisée à la date anniversaire du GMF. Le meilleur moment pour convenir d’une telle entente, c’est quand tout va bien ! //