Le mois dernier nous avons traité du début du processus d’aide médicale à mourir et de la façon de distinguer par la suite les soins au patient et les services liés à la demande d’aide médicale à mourir. Il reste à discuter de la rémunération spécifique prévue pour cette activité et pour les formulaires applicables. Allons-y !
Le Dr Michel Desrosiers, omnipraticien et avocat, est directeur des Affaires professionnelles à la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec. |
Les services rendus par le médecin dans le cadre d’une demande d’aide médicale à mourir sont obligatoirement rémunérés selon une formule d’intervention clinique spécifiquement adaptée à ce type de situation. Cette façon de faire est contraire à l’intervention clinique « générale » qui, elle, s’applique au choix du médecin lorsque la durée du service rend désavantageuse la rémunération de la visite ou de l’examen qui s’appliquerait autrement.
Pour les services visés, lorsque le médecin agit comme accompagnateur ou est appelé à donner un second avis sur la demande écrite d’un patient, il est rémunéré selon l’intervention clinique à la suite d’une demande d’aide médicale à mourir (tableau). Comme nous l’avons vu le mois dernier, lorsqu’il s’agit de services exclus, ou lorsqu’en même temps le médecin prodigue des soins au patient et que le temps requis pour ce faire est plus important que celui qui est consacré à l’aide médicale à mourir, le médecin réclame alors la rémunération de ces autres services.
Les médecins rémunérés selon le mode à l’acte et le mode mixte doivent obligatoirement se prévaloir de cette forme de rémunération. Les modifications au mode mixte se sont faites dans un deuxième temps, les médecins rétribués selon ce mode ayant dû retenir leur facturation un peu plus longtemps que ceux du mode à l’acte. Toutefois, rien n’est prévu pour les médecins rémunérés selon le tarif horaire ou les honoraires fixes. Si le volume de demandes d’aide médicale à mourir traitées par les médecins à tarif horaire ou à honoraires fixes était important, les parties négociantes pourraient modifier l’entente pour leur y donner accès. Si la situation survenait, n’hésitez pas à l’indiquer à votre Fédération.
Enfin, pour éviter toute confusion, soulignons qu’il existe une modalité de soins palliatifs qui n’est pas visée par la Loi sur l’aide médicale à mourir, soit la sédation palliative continue. Plusieurs milieux de soins palliatifs offrent d’ailleurs cette modalité de traitement, tout en refusant d’offrir l’aide médicale à mourir. Le médecin qui participe à la mise en place de la sédation palliative continue est rémunéré selon la tarification applicable aux services cliniques, et non selon l’intervention clinique à la suite d’une demande d’aide médicale à mourir. Toutefois, comme l’obligation de produire un rapport détaillant la mise en place de la sédation palliative a vu le jour en même temps que l’aide médicale à mourir, une rémunération spécifique pour remplir le formulaire a été convenue en même temps.
L’intervention clinique à la suite d’une demande d’aide médicale à mourir exige une période initiale minimale de quinze minutes de services continus (code 15880). À défaut, aucune rémunération n’est prévue.
Par la suite, le médecin peut réclamer des périodes supplémentaires de quinze minutes, comme c’est le cas pour l’intervention clinique (code 15881). Le calcul du temps additionnel se fait de la même façon que pour l’intervention clinique.
Il se peut très bien que les services soient donnés au cours de différentes séances le même jour ou sur plusieurs jours. Le médecin inscrira donc la date et le moment de la prestation sur sa facture et appliquera de façon distincte les règles de durée pour l’admissibilité et pour le calcul de chaque séance. S’il donne de tels services durant des périodes visées et non visées par des majorations en horaire défavorable, il devra alors préciser les périodes lors de sa facturation.
L’intervention clinique à la suite d’une demande d’aide médicale à mourir peut être effectuée dans tout milieu, y compris au domicile d’un patient. Il est donc possible que le patient soit inscrit comme patient vulnérable auprès du médecin accompagnateur ou d’un médecin membre de son groupe. En pareil cas, le médecin peut réclamer le forfait de responsabilité, en plus de l’intervention clinique à la suite de la demande d’aide médicale à mourir (code 15169, 15170 ou 15171, selon le cas).
Le temps consacré à l’obtention des médicaments de la pharmacie de l’établissement et à leur gestion pour procéder à l’aide médicale à mourir est rémunéré de façon distincte des autres services de l’aide médicale à mourir. La rémunération est celle de l’intervention clinique adaptée, et les règles de calcul (temps minimal, périodes additionnelles) sont les mêmes. Cependant, des codes distincts s’appliquent (15883 et 15884). Il s’agit du temps consacré à se rendre à la pharmacie, à la vérification des trousses avec le pharmacien et à leur prise de possession de même qu’à leur retour à la pharmacie et à la vérification de leur contenu.
Le temps de l’intervention clinique à la suite d’une demande d’aide médicale à mourir n’est pas cumulé avec les autres interventions cliniques du médecin le même jour pour la limite quotidienne de 180 minutes. |
De façon générale, la rémunération à l’acte ne prévoit pas de compensation pour le temps nécessaire pour se rendre sur les lieux où des services sont requis. Il y a quelques exceptions (la tarification de certaines visites à domicile de même que les suppléments de déplacement d’urgence accesssibles pour certaines visites). L’intervention clinique « générale » prévoit la possibilité d’être rémunéré pour le temps de déplacement lors d’une visite à domicile qui exige un déplacement de plus de dix kilomètres du lieu principal d’activité du médecin. L’intervention clinique à la suite d’une demande d’aide médicale à mourir donne accès à une compensation comparable, mais elle n’est pas limitée au domicile. Suffit que le médecin se déplace à dix kilomètres ou plus de son lieu principal de pratique. Il peut alors réclamer son temps de déplacement au-delà de dix kilomètres, jusqu’à concurrence de 45 minutes à l’aller et au retour (90 minutes au total) comme périodes supplémentaires de l’intervention clinique adaptée (code spécifique 15882). Advenant que son déplacement ait pris plus de temps du fait de l’absence de médecins sur place disposés à accompagner un patient à la suite d’une demande d’aide médicale à mourir, ce maximum peut être levé. Le médecin doit alors procéder par demande de considération spéciale. Les directives de facturation sont décrites à la section 4.2.7 de l’onglet Rédaction de la demande de paiement du Manuel de facturation.
Le temps de l’intervention clinique à la suite d’une demande d’aide médicale à mourir, y compris celui pour la gestion des médicaments et le déplacement, ne s’ajoute pas aux autres interventions cliniques du médecin le même jour pour la limite quotidienne de 180 minutes. Cette situation s’explique par le fait qu’aucune autre rémunération n’est prévue pour ces services. Le médecin ne peut donc pas opter pour d’autres visites ou examens.
Reste enfin à traiter de la rémunération pour remplir les formulaires pertinents. Ce sera le sujet de la chronique du mois prochain. D’ici là, bonne facturation ! //