Nous complétons notre discussion antérieure sur la rémunération des évaluations effectuées dans le cadre de demandes de régimes de protection et d’ordonnances de traitement. Avant d’aborder les évaluations à la demande d’un établissement, nous terminons notre traitement des demandes pouvant provenir de la famille d’une personne.
Le Dr Michel Desrosiers, omnipraticien et avocat, est directeur des Affaires professionnelles à la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec. |
De telles situations se présentent plus rarement du fait que la personne qui a besoin d’hébergement ou de traitement, mais qui refuse bénéficiera plus souvent des services d’un CLSC. Et c’est cet établissement qui fera les démarches pour obtenir l’autorisation de donner des soins requis ou de procéder à l’hébergement. Dans les rares cas où la famille fait une telle demande, la rémunération prévue à la lettre d’entente no 223 trouve application. Comme le médecin sera généralement appelé à témoigner devant le tribunal en lien avec le rapport d’évaluation produit, il notera qu’une rémunération est aussi prévue à la lettre d’entente no 223. Cette rémunération ne couvre cependant pas le temps des rencontres avec l’avocat chargé de faire la requête.*
Lorsqu’un établissement entreprend les démarches pour faire ouvrir un régime de protection, le résultat est comparable à ce qui se produit lorsque les proches d’un patient demandent à un médecin d’effectuer une telle évaluation. Les précautions que devrait prendre le médecin sont alors comparables.
Du fait qu’en établissement les médecins peuvent être rémunérés à tarif horaire ou à honoraires fixes, ils peuvent ne pas se poser de questions et simplement effectuer ces évaluations à l’intérieur du temps rémunéré selon ce mode. Une telle approche n’est pas conforme à l’entente. Le médecin ne devrait pas être payé par la RAMQ pour des services non assurés, mais devrait faire le nécessaire pour que la personne qui lui demande d’effectuer les services non assurés en assume le coût.
Le besoin d’une ordonnance de traitement ou d’hébergement se présente plus fréquemment en établissement que sur une base ambulatoire. Tout comme lorsque la démarche est faite par des proches du patient, l’évaluation, la production du rapport et le témoignage en Cour sont rémunérés conformément à la lettre d’entente no 223. Les rencontres du médecin avec l’avocat pour discuter de son évaluation ou préparer son témoignage ne sont pas rétribuées selon cette lettre d’entente, et rien n’est prévu en cas d’annulation du témoignage. Il est donc prudent de convenir d’une rémunération dans ces éventualités.*
Notez que la lettre d’entente prévoit que le médecin rémunéré à tarif horaire ou à honoraires fixes peut se faire payer pour cette évaluation selon son mode habituel. Il ne peut alors réclamer le tarif du code d’acte prévu à la lettre d’entente pour son évaluation. S’il est appelé à témoigner en Cour, il peut de nouveau choisir entre son mode habituel et l’acte prévu à la lettre d’entente pour sa présence en Cour, sans égard à son choix pour l’évaluation. En ce qui a trait au médecin rémunéré selon le mode de rémunération mixte pour les soins psychiatriques en centre hospitalier, la rémunération prévue à la lettre d’entente no 223 est payable au pourcentage applicable pour le supplément d’honoraires, et le médecin cumule ce temps pour le calcul du forfait horaire du mode mixte applicable pour ses activités.
La lettre d’entente no 223 prévoit un forfait par demi-heure de présence en Cour. Le minimum est de deux heures et le maximum, de sept heures. Le code est le 98012, pour un tarif de 133,75 $ par demi-heure de présence. Cette rémunération est seulement fonction du temps de présence à la Cour, que ce soit pour témoigner ou dans l’attente de témoigner. Le tarif a été fixé de façon à dédommager aussi le médecin pour son temps de déplacement pour se rendre à la Cour et en revenir. La lettre n’accorde pas de compensation pour les frais de déplacement et de stationnement. Dans le cadre du mode mixte, le calcul de la durée aux fins du forfait horaire n’est pas fonction du minimum ou du maximum quotidien pour la présence énoncé pour le code 98012 et, contrairement à ce qui prévaut pour le calcul du temps de présence pour l’acte 98012, le temps de déplacement est pris en compte dans la durée du forfait horaire.
Enfin, l’avis de la RAMQ sous le libellé de cette évaluation à la lettre d’entente no 223 prévoit que le médecin doit conserver « la demande d’évaluation » pendant 60 mois afin que la RAMQ puisse s’assurer a posteriori que le médecin répond aux exigences du libellé. La demande d’évaluation proviendra généralement du directeur des Services professionnels de l’établissement. Assurez-vous qu’elle est faite par écrit et conservez le document en question.
Il est rare que le Curateur public demande à un médecin d’effectuer une évaluation pour l’ouverture d’un régime de protection. C’est plutôt généralement l’établissement qui la demandera. La loi prévoit que le Curateur la demande lorsque la personne refuse de se soumettre à l’évaluation. Dans ces rares situations, le médecin est rémunéré pour son évaluation, la production du rapport et son témoignage en Cour selon le code pertinent de la lettre d’entente no 223.
Le temps des échanges du médecin avec l’avocat du Curateur pour préparer sa présence en Cour n’est pas rémunéré par la lettre d’entente. De plus, rien n’est prévu advenant une annulation ou une remise de dernière minute qui ne permet pas au médecin de réorganiser son horaire pour ne pas subir de pénalité financière. Tout comme la situation comparable lorsque c’est l’établissement qui demande l’évaluation, il est prudent de convenir d’une compensation, question d’éviter les déceptions ou les malentendus.
Certaines mesures spécifiques sont prévues pour la rémunération du rôle du médecin lors de la prise en charge et de l’évaluation d’enfants victimes présumés de mauvais traitement et pour la rémunération du temps de présence de ce médecin à la Cour. Elles sont énoncées à la lettre d’entente no 20 et prévoient un montant forfaitaire pour la prise en charge et l’évaluation (code 09070, tarif 111,00 $) et un supplément par demi-heure de dépassement (code 09073, tarif 44,25 $ par demi-heure) pour les enfants de moins de 14 ans lorsque l’évaluation exige plus de 60 minutes. Le temps à la Cour est aussi rémunéré selon un tarif horaire de 131,50 $ (code 09077). L’évaluation en question sera plus souvent physique, mais pourra avoir un volet mental. Cette rémunération ne vise pas le médecin qui agit en tant qu’expert.
La lettre d’entente no 223 prévoit aussi une rémunération pour l’évaluation psychiatrique effectuée dans le cadre de la Loi sur la protection de la jeunesse. Une telle évaluation vise à guider le tribunal en ce qui a trait à une ordonnance à émettre, et non à prendre en charge et à évaluer des enfants. Les deux services ne peuvent d’ailleurs pas être réclamés par le même médecin.
Certaines évaluations sont demandées en dehors du cadre décrit (encadré 1) où des familles peuvent tenter de vous contredire (encadré 2). Les informations de ces trois articles devraient vous aider. //
* Les avocats de l’établissement demandent fréquemment de rencontrer le médecin qui a produit l’évaluation avant de se présenter en Cour, question de discuter de l’évaluation avec le médecin et de le préparer à sa présence devant le juge. Ce service ne fait pas partie de l’évaluation ou de la production du rapport ni du témoignage. Il revient donc à l’établissement d’acquitter les frais du médecin. Avant de consentir à de tels échanges avec l’avocat de l’établissement, le médecin devrait au préalable convenir d’un tarif. L’établissement pourra s’opposer initialement, supposant que la lettre d’entente no 223 prévoit la rémunération de l’ensemble de ses services dans ce contexte. Cependant, le libellé de la lettre d’entente ne vise alors pas les rencontres préparatoires entre le médecin et l’avocat de l’établissement.