Éditorial

Dénonciation et rappel historique

Dr Godin  |  2016-05-18

Le réseau de la santé et ceux qui y œuvrent sont à bien des égards, depuis deux ans, malmenés comme jamais. Réformes subites, abolition de postes et d’organismes, compressions, engagements gouvernementaux non respec­tés et tension constante font notamment partie du legs du ministre Barrette à ce jour. Ce qui demeure le plus navrant dans la façon de faire du ministre réside dans l’instauration, en quelque sorte, d’une culture de la peur et de l’épreuve de force où toute consultation, toute discussion et toute entente intelligente semblent doré­navant condamnées à l’avance et vouées à l’échec.

Voilà un bien triste constat ! Comme organisation représentant tous les médecins de famille de la province, nous croyons important de réitérer le fait que nous dénonçons, et ce, de manière non équivoque, les éléments suivants :

h la centralisation extrême, la culture d’intimidation et d’affrontement ainsi que le manque de respect des per­sonnes, qui sévissent depuis deux ans dans le ré­seau de la santé, y compris dans la gestion des effec­tifs médicaux ;

h le discours dénigrant et teinté de préjugés du ministre Barrette, mais aussi malheureusement de nombreux élus de différentes allégeances politiques, envers les médecins de famille et, plus globalement, envers la pro­fession médicale ;

h le refus du gouvernement de travailler en partenariat avec ceux qui prodiguent les soins à la population ;

h l’ensemble des lois, des règlements et des mesures coercitives adoptés et parrainés par Gaétan Barrette ;

h les nombreux changements tardifs et improvisés des règles en vigueur dans le processus d’attribution de postes pour l’année en cours ;

h le mur-à-mur du gouvernement dans la gestion des activités médicales, qui ne tient pas compte des be­soins particuliers de chaque milieu ;

h l’improvisation et la confusion engendrées sur le terrain par l’arrivée à tout moment de nouvelles règles dictées (et souvent transmises de manière cavalière) par le MSSS sur la gestion des effectifs médicaux.

Force est de reconnaître dans ce contexte qu’il faut plus que jamais apprécier le travail effectué depuis deux ans par les médecins de famille québécois. L’augmentation substantielle des taux d’inscription et d’assiduité et le maintien d’une offre de soins de grande qualité dans les urgences, en obstétrique, dans les unités de soins de courte et de longue durée, de soins intensifs et de soins palliatifs sont entre autres des exemples éloquents : les médecins de famille du Québec font actuellement un travail exceptionnel partout dans la province, malgré un gouvernement qui leur tire constamment dessus ! Imaginez comment on pourrait collectivement faire des miracles si on pouvait compter sur l’appui des autorités gouvernementales.

En conclusion, il est important de se rappeler que même s’il est vrai que nous évoluons actuellement dans un contexte unique et jamais vu où une personne semble prête à utiliser tous les pouvoirs que lui donne l’État pour arriver à ses fins et imposer son point de vue, nous nous en sortirons en raison de notre résilience, de notre compétence et de notre engagement. Ces qualités font partie de l’ADN des médecins de famille québécois, et personne ne peut nous les voler. Le Québec a toujours été, malheureusement, une terre fertile pour la coercition envers les médecins. Comme beaucoup de collègues de ma génération, j’ai moi-même connu l’effet de nombreuses mesures coercitives au fil de ma pratique : décrets, obli­gation de travailler en établissement, plafonds trimestriels de rémunération, réduction de rémunération de 30 % en ré­gion universitaire, nombre de lois spéciales, etc. Se battre contre la coercition exercée par le gouvernement fait donc partie de l’univers des médecins omnipraticiens depuis la fondation de la FMOQ il y a maintenant plus de 50 ans. En conséquence, y voir une quelconque bataille intergénérationnelle serait mal avisé. Nous sommes tous concernés et nous devons tous être solidaires afin de pouvoir consacrer toutes nos énergies à défendre ce en quoi nous croyons : une médecine familiale acces­sible, polyvalente, de grande qualité et qui répond aux besoins de nos concitoyens.

Le 16 mai 2016

//

 

dr-godin-editorial

Le président, Dr Louis Godin