projet de loi no 130, inscriptions et autres dossiers importants
Le dernier conseil de 2016, qui a eu lieu le 10 décembre, a permis de faire le point sur d’importantes questions comme le projet de loi no 130, l’inscription, les frais accessoires, la prise en bloc de patients et le PQADME.
La veille du conseil de la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec (FMOQ), le ministre de la Santé et des Services sociaux avait déposé le projet de loi no 130. Une mesure législative qui modifie entre autres certaines règles concernant le droit de pratique des médecins dans les établissements de soins. Le document prévoit notamment que le ministre peut « exiger l’ajout de certaines obligations aux privilèges que le conseil d’administration compte octroyer au médecin. Ces obligations doivent avoir pour but de combler les besoins en médecine de famille de première ligne. »
Au printemps dernier, la FMOQ était intervenue pour empêcher que l’octroi de postes dans les hôpitaux soit lié à la prise en charge de patients en première ligne pour les nouveaux omnipraticiens. « Ce n’était pas légal. Nous l’avons dit au gouvernement. Il a donc rendu sa mesure légale », a expliqué le Dr Louis Godin, président de la FMOQ aux délégués du conseil général, qui s’est réuni le 10 décembre dernier.
Le projet de loi heurte de plein fouet la liberté de pratique des omnipraticiens. « Nous sommes des travailleurs autonomes. Si le projet de loi no 130 est adopté, nous allons entreprendre toutes les procédures qui sont à notre disposition pour l’invalider », a assuré le président.
Selon le nouveau projet de loi, le conseil des médecins, dentistes et pharmaciens ne ferait plus, par ailleurs, de recommandations au sujet des obligations liées au droit de pratique en établissement. Il serait simplement consulté. Le ministre pourrait donc donner directement aux hôpitaux des directives concernant les obligations des omnipraticiens.
Le projet de loi no 130 a été déposé avant même l’obtention des résultats de l’entente sur l’accessibilité, accord grâce auquel les omnipraticiens pourraient écarter la loi 20*. En fait, le nouveau projet de loi reprend certains éléments de cette dernière, comme le suivi obligatoire d’un certain nombre de patients en première ligne. « Nous sommes très préoccupés par le fait que les règles changent continuellement. Le gouvernement signe une entente, prend des engagements et les modifie comme il le veut. Il bafoue ses règles. »
Le Dr Godin craint l’effet démobilisateur du geste du ministre de la Santé. « C’est sûr que le premier réflexe est de se dire : c’est fini les efforts pour atteindre les cibles de l’entente sur l’accessibilité. Mais cela n’est pas la meilleure chose à faire. Pourquoi ? Parce que l’engagement qu’on a pris, on ne l’a pas pris pour le ministre de la Santé, mais pour les patients et la médecine de famille. Il est donc essentiel de continuer. Ce qui est important, c’est de faire en sorte que dans un an on puisse se retrouver ici et dire : on a réussi ! On aura réussi pour nous et pour nos patients. »
Le grand dossier de l’heure reste l’inscription de la population. Vers la mi-novembre, 73,9 % des Québécois avaient un médecin de famille, selon des données non officielles. « Nous sommes un peu en retard, mais c’est facilement rattrapable. Depuis septembre, les résultats montrent vraiment un changement. On a maintenant une vitesse de croisière qui devrait nous permettre d’atteindre la cible de 85 % », a indiqué le Dr Godin.
La partie est cependant loin d’être gagnée. « Nous sommes dans une situation où notre avenir est entre nos mains. L’enjeu est très gros. Chaque médecin doit réfléchir individuellement à ce qu’il va faire. Il faut que chacun prenne en moyenne une centaine de patients de plus. »
La majorité des associations affiliées à la FMOQ ont déjà mis sur pied un plan d’intervention directe auprès des omnipraticiens de leur région. « Il faut demander aux médecins de donner un coup pendant un an. Si on ne le fait pas, on risque de ne plus contrôler notre pratique à partir du 31 décembre 2017. »
Les médecins qui suivent le moins de patients ont le potentiel de donner un important coup de main. « Si tous ceux qui ont inscrit moins de 500 patients atteignaient ce nombre, il ne resterait plus personne dans les guichets d’accès au médecin de famille, et on atteindrait presque la cible de 85 % », a affirmé le Dr Godin.
Le taux d’assiduité, lui, s’élève à 79,1 %. La cible de 80 % est ainsi presque atteinte. Une nouvelle mesure pourrait même permettre de la dépasser. Sous peu, les consultations qu’accordent les infirmières praticiennes spécialisées pourraient être considérées de la même manière que celles qui sont données par un médecin du GMF.
Qu’en est-il de la prise en bloc de patients ? Au dernier conseil, le 1er octobre dernier, une entente entre la FMOQ et le ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS) était sur le point d’être conclue. Les patients d’un médecin qui déménage, prend sa retraite, réoriente sa pratique ou meurt devaient pouvoir être transférés par groupes de 250 à 1000 à un autre omnipraticien. Ce dernier devait pouvoir proposer de les prendre en charge s’il avait respecté le taux d’assiduité ciblé au cours de la dernière année.
Au dernier moment, toutefois, le gouvernement s’est montré réticent. « On en était désolé, parce que durant notre tournée du Québec, à l’automne, les médecins nous avaient dit : “Le transfert en bloc de patients est ce qu’il nous faut, notamment pour atteindre nos cibles.” Cela n’aurait pas été la seule solution, mais aurait constitué un outil important. »
La FMOQ a donc proposé au gouvernement une formule un peu différente de la première version. Le changement concerne le moment du paiement des forfaits de prise en charge et de vulnérabilité. La Fédération fait valoir qu’à partir de la date du transfert, l’omnipraticien qui prend en charge un bloc de patients leur offre les mêmes services et la même disponibilité que leur ancien médecin. Par conséquent, elle suggère qu’il reçoive les mêmes forfaits que ce dernier aurait obtenus, au rythme où il les aurait eus. Cette proposition semble plaire davantage au gouvernement.
Le nouveau règlement sur les frais accessoires devrait entrer en vigueur en 2017. Toutefois, au moment du conseil, de nombreuses questions restaient encore en suspens. « Est-ce qu’un prélèvement fait par une entreprise privée dans le local d’un médecin ferait partie des frais accessoires ? Si ce n’est pas un service accessoire à l’extérieur du cabinet, pourquoi le devient-il à l’intérieur ? », a demandé le Dr Godin. On sait par ailleurs que les vaccins et les médicaments ne pourront plus être facturés. Mais qu’en est-il de produits comme l’azote liquide et les agents de viscosuppléance. « Ce ne sont pas des médicaments. Sont-ils accessoires ? »
La question la plus simple à régler sera celle des vasectomies et des petites chirurgies. « Nous avons consulté un bon nombre d’omnipraticiens qui en font. Nous allons pouvoir déterminer combien il en coûte et négocier par la suite une juste compensation permettant aux médecins de continuer à offrir le service. »
Les discussions entre la FMOQ et le gouvernement progressent toutefois très lentement. La Fédération tiendra ses membres au courant par courriel ou dans son infolettre Zoom.
Le nouveau Programme québécois d’adoption du dossier médical électronique (PQADME), qui succéderait à celui qui s’est terminé le 31 août dernier, disposerait de 15,4 millions par année. Comment serait utilisé cet argent ? « Nous voulons payer en priorité les licences d’utilisation des dossiers médicaux électroniques », explique le Dr Godin. Cet objectif aura la part du lion. À lui seul, le coût des licences de tous les médecins qui adhèrent actuellement au PQADME s’élèverait à environ 11,5 millions.
La Fédération a également une autre priorité : aider les quelque 1500 médecins qui n’ont pas encore de dossier électronique. Ils seront bientôt forcés d’en acquérir un. « D’ici quatre ans, le Collège des médecins du Québec va obliger tous les médecins de famille à travailler sur support numérique. »
La FMOQ désire également apporter un soutien financier aux quelque 500 médecins de cabinet qui se sont informatisés, mais qui ne pratiquent pas dans un GMF. Ils n’ont donc pas droit aux subventions pour l’informatique prévues dans les enveloppes des groupes de médecine de famille. « Il faut leur permettre de renouveler leur matériel informatique », a mentionné le président.
Les statuts et les règlements de la FMOQ vont bientôt être révisés, et des modifications seront proposées au besoin. Le Bureau de la Fédération va mettre sur pied un comité spécial entre autres pour tenir compte des normes actuelles de gouvernance. « Cela fait une quinzaine d’années que nous n’avons pas fait une révision complète de nos statuts », a mentionné le Dr Godin.
Le comité sera présidé par un médecin qui ne sera pas membre du conseil général. « Il s’agira d’un omnipraticien d’expérience qui a vécu des négociations et des crises et qui connaît l’histoire de la Fédération. » Il sera épaulé par quatre autres membres :
h un expert indépendant spécialisé dans la gouvernance ;
h deux présidents d’associations affiliées à la FMOQ ;
h un délégué du conseil général.
Le comité devra remettre un rapport contenant ses recommandations au conseil général de décembre 2017. //
Cette année, la cotisation syndicale sera haussée de 1,9 %, taux d’augmentation de la rémunération moyenne des omnipraticiens en 2015-2016. Ainsi, pour 2016-2017, la cotisation totale passera de 1893 $ à 1927 $.
La nouvelle cotisation comprend la cotisation de base de 1827 $ ainsi qu’une somme de 100 $ destinée au Grand Défi Pierre Lavoie. La remise aux associations, elle aussi accrue de 1,9 %, atteindra 351 $.
* Le nom exact de la loi est : Loi favorisant l’accès aux services de médecine de famille et de médecine spécialisée et modifiant diverses dispositions législatives en matière de procréation assistée.