Gestion pratique

Les effectifs médicaux et la gestion des avis de conformité

Serge Dulude  |  2016-12-21

Depuis une année environ, plusieurs changements sont survenus quant à la gestion des avis de conformité (PREM), aux AMP et aux nominations en établissement liées au PEM.

Le Dr Serge Dulude, omnipraticien, est directeur de la Planification et de la Régionalisation à la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec.

Les DRMG restent responsables de la gestion du plan régional d’organisation des services des médecins de famille (PROS), du plan régional des effectifs médicaux (PREM), des activités médicales particulières (AMP) et aussi, conjointement avec les DSP (directeurs des services professionnels) des CISSS-CIUSSS pour ce qui est de l’évaluation des besoins en établissement.

En ce qui a trait aux avis de conformité à attribuer, la grande priorité à l’échelle de la province est la prise en charge. Ainsi, le MSSS a fait un exercice de priorisation pour environ 70 % de tous les avis de conformité, de tous les nouveaux facturants et de toutes les mobilités interrégionales en déterminant le nombre de priorités de première ligne par réseau local de service de santé et de services sociaux (RLS). Pour ce qui est des 30 % résiduels, ce pourcentage constitue une marge discrétionnaire pour chaque DRMG, toujours bien encadrée par le ministre de la Santé, afin de combler l’ensemble des besoins de son PROS. Si un DRMG n’est pas d’accord avec les priorités des 70 %, il doit en faire part au MSSS. Il est alors possible que certains ajustements soient accordés.

Le grand changement est que, désormais, la règle du « au moins 55 % des jours de facturation dans la région d’appartenance et au plus 45 % dans une ou plusieurs autres régions secondaires » est basculée vers les RLS. Ainsi, un médecin qui reçoit un avis de conformité d’un DRMG, bien que ce PREM soit dit régional, doit accomplir au moins 55 % de ses journées de facturation, une journée correspondant à un revenu d’au moins 500 $, dans le RLS pour lequel il a été sélectionné. Le maximum de 45 % résiduel vient de la facturation faite dans les autres RLS de sa région d’appartenance, dans les autres régions et aussi celle des journées de dépannage. Ce dernier point constitue également une nouvelle réalité importante pour les médecins dépanneurs à temps partiel. En effet, par le passé, les journées de dépannage à temps partiel ne faisaient pas partie du calcul de 45 %.

Il importe de préciser que le médecin installé avant le 1er juillet 2016 n’est pas assujetti à la règle du « au moins 55 % de ses journées dans le RLS où il a sa pratique principale ». Toutefois, cette règle demeure applicable à l’ensemble de ses journées de travail dans toute sa région administrative d’appartenance. S’il demande un nouvel avis de conformité et l’obtient dans une autre région, la règle s’appliquera alors dans un RLS.

Un médecin a-t-il la liberté d’effectuer ses activités intra-RLS où il le veut et de changer ? Tout à fait ! Il pourrait, par exemple, passer d’un GMF donné à une clinique médicale sans avoir à demander l’autorisation à qui que ce soit. Pour ce qui est de changer de centre hospitalier, par exemple, ce n’est pas une question de PREM, mais de PEM. Il pourra procéder si le besoin est reconnu par le DSP et le DRMG et s’il y a toujours une place au PEM de l’établissement.

Un médecin peut-il changer de RLS principal ? Oui, mais les modalités étaient à définir au moment d’écrire ces lignes. Il y a fort à parier que les DRMG miseront sur une période de stabilisation des effectifs médicaux et qu’au moment de prendre une décision, après une telle demande, un comité de direction de DRMG évaluerait l’effet potentiel du départ du médecin du RLS sur les services offerts dans ce sous-territoire par rapport aux besoins prioritaires du futur RLS envisagé. C’est ce que nous appelons une approche professionnelle.

Précisons qu’un médecin comptant au moins 20 années de pratique pourra, comme par le passé, obtenir un avis de confor­mité en mobilité interrégionale en tout temps dans n’importe quelle région du Québec, sans être assujetti à la règle du « au moins 55 % dans un RLS », le 55 % s’appliquant à l’ensemble de la région, même si le PREM en mobilité est complet au moment de sa demande.

Pour ce qui est du médecin installé depuis au moins trois années dans une région désignée insuffisamment pourvue en effectifs médicaux, il pourra, lui aussi, obtenir un avis de conformité dans n’importe quelle région du Québec au moment de quitter cette région éloignée, même si le PREM en mobilité est pourvu au moment de sa demande. Toutefois, celui-ci sera assujetti à la règle des RLS, à moins bien sûr que le médecin ait au moins 20 ans de pratique.

Qu’en est-il des médecins dépanneurs exclusifs ? Au cours des dernières années, malgré l’arrivée de grandes cohortes de nouveaux facturants pour un ajout net annuel de mé­decins de plus en plus important, nous ne pouvions expliquer pourquoi de plus en plus de jeunes médecins s’inscrivaient en dépannage exclusif. Au cours des cinq dernières années, les DRMG ont fait des pressions importantes avec raison, je crois, sur les instances décisionnelles afin de juguler cette situation. Ainsi, la cible envisagée de dépanneurs exclusifs en 2016 était de 27, et 23 nouveaux médecins ont reçu une dérogation tenant lieu d’avis de conformité pour travailler en dépannage exclusif (au moins 95 % des journées facturées). Nous croyons qu’avec : 1. le phénomène des grandes cohortes, 2. la pénurie qui fond comme neige au soleil, 3. l’accent sur la prise en charge avec l’objectif à moyen terme d’inscrire tous les Québécois qui désirent un médecin de famille, 4. les régions qui commencent à atteindre une zone de confort quant aux effectifs médicaux en place et 5. la nouvelle règle pour se prévaloir du statut de médecin en mobilité (au moins 200 jours travaillés), le nombre de nouveaux médecins de famille désirant s’inscrire au dépannage exclusif va se tarir et se stabiliser de lui-même.

Au moment où vous lirez ces lignes, les DRMG seront en plein exercice d’attribution de leurs avis de conformité autorisés, conformément à la liste des besoins priorisés par territoire de RLS et par champ d’activités.

Et maintenant, à quand la réduction du nombre d’étudiants en première année de médecine ? C’est la question qui tue. À notre avis, il faudrait y penser dès maintenant. Toutefois, vous comprendrez que ce n’est pas la FMOQ qui prend cette décision. Au cours des prochaines années, des ajouts nets records de 250 à 300 médecins sont à prévoir. Probablement que d’ici quelques années pas si lointaines, un ajout net d’environ 200 médecins sera raisonnable et peut-être moins, même dans un contexte de population vieillissante en croissance d’environ 50 000 à 75 000 personnes par année. Plusieurs facteurs viendront influer sur les décisions relatives à l’accueil d’un nombre plus ou moins grand d’étudiants en médecine. En voici quelques-uns : le travail en interprofessionalisme, la productivité des médecins et les jours travaillés, une meilleure assiduité, un GAMF quasiment vide, une plus grande participation de nos confrères spécialistes dans les activités hospitalières et, bien sûr, un soutien indéfectible du MSSS pour ce qui est des activités cliniques des médecins, notamment en première ligne.

D’une certaine façon, j’ose écrire que, pour ce qui est des médecins de famille, nous sommes et serons les artisans de notre propre bonheur ou malheur ! //