Éditorial

De l’ouverture et de la souplesse svp

Louis Godin  |  2018-11-22

On ne peut que saluer le discours empreint de bonne volonté et d’ouverture de la nouvelle ministre de la Santé. On semble libérés du dénigrement et des me­sures coercitives qui furent le lot des profes­sion­nels de la santé, mais encore plus particulièrement des médecins de famille, au cours des dernières an­nées. Il reste maintenant à voir quelles orientations seront mises de l’avant pour atteindre les objectifs que l’équipe ministérielle juge prioritaires.

D’abord, il y a évidemment le souhait exprimé à main­tes reprises de modifier en partie le mode de rémunération des médecins de famille pour en augmenter la part dévolue à la capitation (ou aux forfaits), même si le tiers de la rémunération des omnipraticiens est déjà versé sous une autre forme qu’à l’acte et que cette proportion augmente constamment. Il semble que l’objectif soit de favoriser la délégation d’un plus grand nombre d’actes vers d’autres professionnels de la santé. Bien que nous soyons prêts à discuter de la question et que nous soyons de fa­rou­ches partisans du travail interprofessionnel, un fait demeure : ce n’est pas le manque de volonté des médecins, mais bien le nombre insuffisant d’autres professionnels en clinique médicale, notamment d’infirmières, qui constitue actuellement le principal frein à une quelconque délégation d’actes. À titre d’exemple, lorsqu’une infirmière en GMF s’absente pour des raisons de santé ou pour un congé de maternité, elle n’est souvent pas remplacée. C’est avec ouverture, en adhérant à une vision différente de celle qui concentre toujours un maximum de ressources en milieu hospitalier et un minimum dans la communauté, que la nouvelle équipe gouvernementale doit s’attaquer en priorité au manque de soutien offert aux médecins en clinique, pas autrement.

L’autre grande priorité en soins de première ligne demeure le taux de prise en charge, mais aussi l’accessibilité pour tous les patients, ins­crits ou non au­près d’un médecin de famille, à des consultations sans rendez-vous au besoin. Sur le plan de la prise en charge, les médecins de famille continuent leurs efforts inédits, 80,3 % de la population étant maintenant prise en charge. Cette proportion était de 67 % en 2014. Il s’agit d’une amélioration constante et soutenue. Dans un contexte de pénurie relative, où la relève médicale n’est pas au rendez-vous comme prévu en raison de la dévalorisation de la médecine familiale au cours des dernières années au Québec, on parle d’un véritable petit miracle. Si le gouvernement offre davantage de soutien aux omnipraticiens et fait preuve de vision en valorisant la médecine familiale, cette tendance ne pourra que perdurer.

Quant à l’accès aux services de consultation sans rendez-vous, un peu de souplesse dans la gestion mur-à-mur du gouvernement s’impose pour améliorer les choses. Pourquoi pénaliser à tout prix des GMF et des médecins qui n’atteignent pas la cible d’assiduité de 80 % en milieu urbain quand on sait que les patients inscrits préfèrent parfois consulter dans une autre clinique pour un problème de santé bénin et ponctuel ? Pourquoi procéder de la sorte quand on sait que cette situation a forcé des cliniques à réserver le service de consultation sans rendez-vous aux patients inscrits afin de répondre aux exigences du gouvernement en matière d’assiduité ? Un peu plus de souplesse à cet égard permettrait la réouverture de nombreux centres de consultation sans rendez-vous, nous en sommes convaincus. Et la même logique s’applique aux programmes de GMF et de superclinique. Ne pourrait-il pas y avoir un peu de souplesse dans la gestion de ces programmes, notamment par l’ajout d’un palier intermédiaire pour faire le pont entre la mission GMF courante et la mission superclinique ? Encore là, il suffirait d’un peu de souplesse et de vision pour procurer un meilleur accès à tous.

Le 20 novembre 2018

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Le président, Dr Louis Godin