Nouvelles syndicales et professionnelles

Répondre aux besoins de la population de Drummondville

des médecins trouvent de nouvelles solutions

Claudine Hébert  |  2018-03-01

Les médecins de Drummondville ont la réputation d’être avant-gardistes. Ils le démontrent une fois de plus avec la création d’une toute nouvelle clinique ambulatoire.

Vincent Simard

Vincent Simard

Quand on pratique dans une région qui ne peut avoir de GMF-réseau, comment offrir à la population des services de consul­tation sans rendez-vous semblables ? Les médecins de Drummondville ont imaginé une solution. Une formule entre le GMF et le GMF-R.

Drummondville n’atteint pas le seuil des 16 000 visites de patients orphelins par année. Par conséquent, impossible pour la population de bénéficier d’un GMF-réseau et de ses avantages : un service de consultation sans rendez-vous ouvert 84 heures par semaine, assorti d’un service de radiologie et de prélèvement sur place. Mais les médecins de la région ont décidé de remédier à la situation.

Depuis le début de l’année, les 73 médecins de famille des sept GMF de la région et les dix urgentologues de Drummondville ont uni leurs efforts pour mettre sur pied la nouvelle Clinique médicale ambulatoire Drummond (CMAD). « Ce n’est pas un GMF-R. En fait, on pourrait qualifier notre modèle de GMF-Plus », explique le Dr Vincent Simard, un des instigateurs du projet. Gestionnaire du GMF Centre médical AJC, il est aussi chef de la Table médicale territoriale de la Mauricie-Centre du Québec.

En quoi consiste la nouvelle formule ?

Le nouveau modèle comprend deux points de service, soit le GMF Centre médical Saint-François et le GMF Centre mé­di­cal AJC. Selon leur disponibilité, les 83 médecins de la municipalité régionale de comté (MRC) de Drummond contribuent à combler l’horaire de la clinique ambulatoire qui est ouverte sept jours sur sept de 8 h à 16 h, simultanément dans les deux points de service.

Même lors des jours fériés, les services sont offerts à raison de quatre heures par jour aux deux endroits. « Nous avons le souci d’offrir à notre population, qui comprend des usagers sans médecin de famille, le meilleur accès possible aux soins médicaux pour des problèmes de santé mineurs. Notre objectif avec la CMAD est d’offrir un filet de sécurité pour libérer les urgences de l’hôpital de la région. C’est la plus-value de ce modèle », précise le Dr Simard.

Les médecins de GMF et les urgentologues se partagent à parts égales l’horaire de la nouvelle clinique qui est ouverte 112 heures par semaine (56 heures par point de service). Déjà occupés les week-ends, les urgentologues veillent principalement à pourvoir les plages horaires en semaine. Les médecins de famille, eux, sont appelés à travailler davantage les week-ends. Ces derniers pratiquent déjà à temps plein dans leur GMF respectif, tient à rappeler le Dr Simard. Et, en plus, ils ont à s’acquitter de leurs tâches à l’hôpital, au CHSLD, au CLSC, dans les soins à domicile, à l’urgence, aux soins palliatifs, en toxicomanie ou dans les cliniques jeunesse. « Il n’y a donc pas un minimum ou un maximum d’heures requis pour chaque médecin. Les horaires de travail sont négociés entre les différents médecins sur une base volontaire », explique le médecin.

Le succès de ce projet pilote repose essentiellement sur la complicité des médecins, souligne le chef de la Table médicale territoriale. « Lorsque les médecins s’engagent eux-mêmes dans la mise en place d’une initiative, leur motivation est beaucoup plus grande. »

En plus de desservir la clientèle dite orpheline, la clinique am­bu­latoire offre aussi ses services aux personnes inscrites auprès d’un médecin de famille de Drummondville ainsi qu’aux résidents du territoire suivis par un médecin d’un autre territoire. La clinique ambulatoire ne dispose toutefois pas de ser­vices de radiologie et de prélèvements sanguins, comme on en trouve dans les GMF-R. « Nous utilisons les services déjà offerts sur le territoire. Des services qui fonctionnent très bien », mentionne le Dr Simard.

Une initiative de plus

Les médecins de la MRC de Drummond, qui compte 100 000 per­sonnes, n’en sont pas à leur première initiative pour permettre à leurs citoyens d’avoir un meilleur accès à la première ligne. En 2009, ils avaient mis sur pied le Réseau d’accès médical Drummond (RAMD). Ce programme, qui bénéficiait d’un soutien financier du ministère, permettait à la population de Drummondville d’obtenir un rendez-vous chez le médecin le jour même.

En 2015, explique le Dr Simard, la réforme du ministre Barette a mis fin au programme RAMD. Soucieux de la clientèle orpheline, les médecins de Drummondville ont tenté de poursuivre l’offre de services en mettant sur pied la Clinique des urgentologues. Malheureusement, le centre a fermé ses portes au printemps 2017. C’est alors que les médecins de la région se sont rassemblés une fois de plus pour trouver une solution : la Clinique médicale ambulatoire Drummond.

« La prise en charge des patients a toujours été excellente dans la MRC de Drummond. Elle surpasse généralement celle de la moyenne québécoise », tient à souligner le Dr Simard. À titre d’exemple, il cite l’effort qu’ont fourni les médecins en 2017. Le territoire enregistrait alors plus de 4000 patients orphelins, « pa­tients qui ont tous été inscrits pendant l’année ». Ironiquement, à cause du dynamisme de Drummondville, qui a entraîné création d’emplois et arrivée de nouveaux résidants, le territoire se trouve de nouveau avec 4000 autres patients orphelins à inscrire au cours de l’année 2018. « Nous avons bon espoir qu’ils auront tous un médecin de famille avant le début de 2019 », soutient le Dr Simard.

Un financement à trois

Plusieurs se posent la question. Comment a été financé ce nouveau modèle ? « L’argent ne vient pas directement du ministère de la Santé et des Services sociaux », répond d’emblée le Dr Simard. La clinique ambulatoire bénéficie de trois principales sources de financement. « Il y a d’abord le Centre intégré universitaire de santé et de services sociaux (CIUSSS) de la Mauricie–Centre-du-Québec qui nous fournit, entre autres, deux postes d’infirmières techniciennes à temps plein. Les deux GMF, qui servent de point de service, nous prêtent leurs locaux, leur salle d’attente ainsi que leur personnel administratif et de réception. La troisième source de financement provient de la Fondation Sainte-Croix/Heriot. Cette dernière nous a remis 30 000 $ pour acheter l’équipement médical, notamment les tables d’examen », souligne le médecin.

Besoins_intérieur

Compte tenu de ce financement adapté, la clinique ambulatoire dispose d’un budget plus serré qu’un GMF. Ce qui, aux yeux du Dr Simard, représente un des rares inconvénients de la nouvelle formule. « Ce ne sont pas des montants qui arrivent tous les mois. Il s’agit toutefois d’un projet pilote. On verra bien comment tout ça se déroulera lors de la première année. »

Le nouveau modèle de Drummondville pourrait être facilement exportable dans d’autres secteurs de la province, croit le médecin. À commencer dans le Centre-du-Québec et la Mauricie. D’ailleurs, chaque fois que le Dr Simard siège à la Table médicale territoriale de la Mauricie–Centre-du-Québec, les questions fusent de toute part. Les médecins de Shawinigan, de Trois-Rivières et de Victoriaville qui desservent un territoire semblable à celui de la MRC de Drummond suivent avec intérêt l’évolution de la Clinique médicale ambulatoire Drummond. //