De nombreuses équipes médicales en CLSC ont adhéré au programme GMF ou ont pu établir des formes de collaboration avec les cabinets de leur région. Or, certains CLSC n’ont pas encore franchi ce pas. Et ne sont pas sûrs d’ailleurs d’y trouver leur compte.
« Pourquoi faut-il absolument devenir un GMF ? », déplore la Dre Dorice Boudreault, médecin au CLSC de Châteauguay. « Ne pourrions-nous pas demeurer un CLSC et continuer d’apporter notre expertise en soins à domicile, en jeunesse et en santé mentale comme on le fait depuis plus de 40 ans ? »
La Dre Boudreault représente la voix de certains CLSC de la Montérégie Ouest, des établissements à qui le Centre intégré de la santé et des services sociaux de la Montérégie Ouest (CISSSMO) n’a toujours pas démontré clairement quels seraient les avantages pour ces CLSC de former un GMF. « Non seulement nous ne serions pas responsables du budget accordé à la formule GMF, mais nos établissements utiliseraient essentiellement cet argent pour payer nos frais d’exploitation actuels », soulève la Dre Boudreault. « En fait, dit-elle, le principal avantage à devenir un GMF serait d’obtenir un dossier médical électronique (DME). Un outil que nous attribuera le CISSS qu’à la condition que le CLSC change sa vocation. »
Aux yeux du président de l’Association des médecins de CLSC du Québec (AMCLSCQ), le Dr Sylvain Dion, lier DME et statut de GMF est inacceptable. « D’être un GMF ou non ne devrait pas être une condition pour avoir cet outil », affirme le deuxième vice-président de la FMOQ. La Fédération effectue d’ailleurs des démarches auprès du ministère de la Santé et des Services sociaux afin de remédier à cette situation. « Il est inadmissible que tous les CLSC n’aient pas accès à un véritable DME. »
Il y a déjà eu quelques rapprochements entre le CLSC de la Dre Boudreault et des GMF de son secteur afin de créer un GMF mixte. « Une telle association aurait été profitable si chacune des parties avait pu mettre à contribution ses expertises et ses offres de service pour former une équipe », indique l’omnipraticienne. Mais les médecins de GMF, dit-elle, demandaient à ce que le CLSC propose, en plus, des plages de « consultation sans rendez-vous » les week-ends. Il n’y a pas eu d’entente.
« Pourquoi ne peut-on pas continuer à exercer principalement la médecine de soins à domicile, de santé mentale et d’autres programmes pour laquelle nous avons une solide expertise ? La population vieillit. Les gens vont nécessiter encore plus de soins à domicile et d’aide en santé mentale. Pendant ce temps-là, on nous demande de réduire nos efforts dans ce domaine. Quelle est la logique derrière tout ça ? »
« Je lève mon chapeau aux médecins de CLSC qui exercent dans les programmes et je voue un très grand respect au travail qu’ils font », indique le président de l’AMCLSCQ. « Mais notre modèle, observe-t-il, n’est plus aussi attrayant pour la relève. Les jeunes médecins recherchent davantage la polyvalence offerte en GMF. » Selon le Dr Dion, la formule CLSC doit donc évoluer.
Il est vrai, poursuit-il, qu’il y aura de plus en plus de patients qui auront besoin de soins à domicile et d’aide en santé mentale. « Il y en aura tellement que le nombre actuel de médecins en CLSC ne suffira pas à la demande. Il nous faudra un coup de main des autres omnipraticiens. »
C’est pourquoi le Dr Dion invite les médecins des quelques dizaines de CLSC qui n’ont toujours pas conclu d’entente avec des GMF à collaborer avec ces derniers. « Nous sommes des experts en soins à domicile et en santé mentale. C’est en travaillant avec les GMF que nous pourrons mieux sensibiliser les jeunes médecins à notre type de pratique et nous assurer ainsi que la population sera très bien desservie », ajoute-t-il. //