Certains services assurés sont absents du manuel de facturation, mais un mécanisme particulier est tout de même prévu pour leur facturation. De plus, de longue date, il existe une tarification d’exception pour certains services rendus dans des situations hors de l’ordinaire. Au lieu d’être associés à un tarif, ces services portaient plutôt l’indication « Considération spéciale » (C.S.). Dans la nouvelle mouture de SYRA, ce n’est plus le cas. Saurez-vous vous retrouver ?
Le Dr Michel Desrosiers, omnipraticien et avocat, est directeur des Affaires professionnelles à la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec. |
Depuis le 1er f.vrier 2018, les services qui comportaient l’indication « Considération spéciale » seront désormais facturés à l’aide d’un tarif. Mais leur facturation n’est pas tout à fait comparable à celle des autres services de l’entente. Revoyons les principes pour bien comprendre.
Le paragraphe 1.1.2 du Préambule général décrit les règles applicables lorsque le tarif prévu ne semble pas adéquat du fait qu’un service est posé dans des circonstances hors de l’ordinaire. Une telle situation peut se produire lorsqu’un service simple exige beaucoup plus de temps et de démarches que d’ordinaire en raison des particularités de la situation. Un exemple est la rémunération du retrait d’un corps étranger de la peau. Un code est prévu pour le retrait d’un corps étranger simple (code 001196, tarif 25,10 $). La tarification pourra être adéquate si le corps étranger est solide, superficiel et facilement localisable. Toutefois, la démarche pourra être d’une complexité disproportionnée lorsque le corps étranger est une écharde métallique se trouvant plus profondément et difficile à saisir ou à extraire.
Notez bien que la difficulté doit venir de la situation elle-même, et non du fait que le médecin est excessivement lent, ce qui pourrait aussi prendre un temps disproportionné. Le libellé parle de « circonstances hors de l’ordinaire ».
Dans le passé, le recours à l’indication « Considération spéciale » était faible. Peu de médecins s’en prévalaient. Il est possible que certains aient plutôt eu recours à l’intervention clinique, qui peut, au choix du médecin, remplacer le tarif de la visite et du service effectué en même temps. D’autres peuvent tout simplement se contenter du tarif prévu pour le service simple, c’est-à-dire un tarif réduit, pour éviter les démarches et les délais engendrés par l’indication « Considération spéciale ».
Depuis le 1er février 2018, on ne retrouve presque plus de services pour lesquels il n’y a aucun tarif. |
En effet, avant SYRA, le médecin qui voulait faire appel au mécanisme de Considération spéciale devait inscrire la lettre « N » dans la case « C.S. » de sa demande de paiement et joindre des documents explicatifs. Une telle approche ne pouvait pas s’appliquer dans SYRA qui exige qu’un tarif soit associé à la facture. Par ailleurs, le médecin devait attendre l’évaluation de la RAMQ pour savoir combien il recevrait, et il ne l’apprenait qu’au moment de recevoir sa rémunération. Cette approche avait toutefois l’avantage de ne pas entraîner un risque de récupération auprès du médecin, puisqu’il était payé seulement après l’évaluation de la RAMQ. Le fait qu’il s’agissait d’une situation hors de l’ordinaire ne risquait pas par la suite d’être remise en question.
De façon à faciliter l’application dans SYRA, les parties négociantes ont revu l’approche et ont profité de l’occasion pour réviser les codes pour s’assurer qu’ils étaient toujours nécessaires. Quelques codes ont ainsi été abolis, n’ayant pas fait l’objet de facturation depuis plusieurs années, autant en rôle 1 que dans d’autres rôles ou parce qu’il existait d’autres codes applicables. Pour ceux qui ont été conservés, un tarif a été fixé en s’inspirant des montants versés durant les dernières années ou du tarif applicable à des médecins spécialistes pour un service comparable.
Depuis le 1er février 2018, on ne retrouve donc presque plus de services pour lesquels aucun tarif n’est prévu. Essentiellement, tous les services sont associés à un tarif, bien que la description du service puisse spécifier que son application se fera seulement dans des situations complexes ou particulières. Le médecin doit alors juger s’il répond à l’exigence du tarif indiqué et s’il pourrait subir un contrôle subséquent par la RAMQ. Une telle approche semble défendable du fait que le volume de facturation en considération spéciale est très faible. Personne ne court donc le risque de faire l’objet d’une récupération importante, du moins si le comportement des médecins ne change pas.
Il se pourrait qu’un plus grand nombre de services soient désormais réclamés au tarif d’une situation exceptionnelle, en raison du paiement immédiat et des tarifs plus intéressants. Si tel était le cas, les répercussions financières d’éventuelles récupérations pourraient devenir plus importantes. Par conséquent, les parties négociantes devront surveiller l’évolution de la facturation des codes modifiés.
Certains services assurés ne sont pas décrits dans le Manuel de facturation bien qu’ils devraient l’être, car ils sont requis sur le plan médical et effectués par un médecin. Une telle situation peut se produire lorsque de nouveaux traitements s’ajoutent aux moyens reconnus par la science. Elle peut aussi survenir en raison de l’évolution de l’interprétation de l’Entente. Une illustration de ce deuxième phénomène est la prise de position de la RAMQ, en 2016, qui ne considère pas les produits de viscosuppléance comme des « médicaments ». De ce fait, le code applicable à l’injection d’un médicament dans une bourse séreuse ou une articulation (code 00431) ne pouvait plus servir à cette fin, situation qui a été signalée aux parties négociantes par la RAMQ en 2017.
En l’absence de code applicable, tant que le service est assuré, le médecin doit avoir recours à un moyen particulier de facturation. Ce dernier est décrit de façon sommaire au paragraphe 1.3 du Préambule général du Manuel de facturation. Cependant, pour prendre connaissance d’une description détaillée du fonctionnement, il faut plutôt consulter le paragraphe 5.2.12 du Guide de facturation accessible sur le site de la RAMQ.
Lors de la première facturation d’un tel service, le médecin doit utiliser le code 09990 sans indiquer de tarif. Exceptionnellement, la visite doit être réclamée sur une autre facture; le service réclamé avec le code 09990 devant figurer seul sur la demande de paiement. Après réception de cette facture, la RAMQ va transmettre un document au médecin contenant un code à barres et des instructions d’envoi par télécopieur. Le médecin devra décrire le service, le temps requis et les autres informations pertinentes pour permettre à la RAMQ de décider s’il s’agit bien d’un service assuré et, par la suite, d’établir un tarif approprié.
Essentiellement, tous les services comportent un tarif, bien que la description de ces services puisse préciser que l’application n’a lieu que dans des situations complexes ou particulières. En l’absence de code applicable, tant que le service est assuré, le médecin doit avoir recours à un moyen particulier de facturation. |
Une fois cet exercice terminé, la RAMQ avisera le médecin du « code de référence pour situations spéciales » pour ce service. Si le médecin rend de nouveau le service avant qu’un tarif soit fixé, il doit encore utiliser le code 09990 (toujours seul sur la facture) et indiquera son code de référence pour situations spéciales pour ce service. La RAMQ comprendra qu’il s’agit du même service que le premier service facturé, et le médecin n’aura pas à fournir chaque fois une description du service. Lorsque les parties négociantes établiront un tarif à ce service, l’ensemble de la facturation antérieure du médecin fera l’objet d’une révision.
Lorsqu’il s’agit d’un service rendu à répétition (comme l’injection d’un produit de viscosuppléance dans une articulation), le médecin a avantage à réclamer le premier service rapidement de façon à recevoir le code de référence pour situations spéciales à l’intérieur du délai de facturation de 90 jours de manière à s’en servir pour les services subséquents. Le médecin ne doit pas « retenir » sa facturation plus de 90 jours, car il perdra alors la possibilité de facturer ce service.
Ce tour d’horizon devrait vous aider à suivre l’évolution des modalités de facturation et à éviter des surprises lors de la facturation de services dans des circonstances hors de l’ordinaire ou lorsqu’il n’existe pas de code de facturation. Le mois prochain, nous traiterons des particularitées du mode mixte. D’ici là, bonne facturation ! //