Plusieurs médecins offrent des services à des personnes habitant dans une résidence pour personnes autonomes ou au sein de communautés religieuses. Certains le font en l’intégrant à leur pratique en cabinet ou en CLSC. D’autres le font de façon autonome. La RAMQ a récemment modifiée sa position concernant la caractérisation de ces lieux. Ce changement a un effet sur ce qui est dorénavant facturable en pareil milieu. Êtes-vous au courant ?
Le Dr Michel Desrosiers, omnipraticien et avocat, est directeur des Affaires professionnelles à la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec. |
En décembre 2016, la RAMQ informait les médecins de l’obligation de faire codifier l’ensemble des cabinets dans lesquels ils rendent des services. L’échéancier était différent selon que le médecin commençait sa pratique (1er mars 2017) ou exerçait au sein d’un groupe « d’anciens », pourvu qu’il n’y ait pas de nouveau médecin dans le milieu en question (1er septembre 2017). Cette obligation visait à appliquer les exigences de l’entente particulière sur les PREM par sous-territoire à l’intérieur d’une même région. La facturation avec un « code de localité » (municipalité) ne suffisait pas à cette fin.
Selon l’organisation de la pratique du médecin, il devait alors utiliser le code du cabinet ou de l’établissement associé aux visites à domicile ou, lorsque les visites à domicile n’étaient pas liées à une telle pratique, le code postal du domicile.
Deux types de milieux posaient problème : les résidences pour personnes autonomes et les congrégations religieuses. Les visites dans les appartements des résidents ou au chevet de patients à l’infirmerie étaient manifestement des visites à domicile. Toutefois, ces milieux offrent fréquemment au médecin un local pour recevoir la clientèle ambulatoire du milieu. Aux fins de codification, il fallait décider s’il s’agissait d’un cabinet ou d’un milieu visé par les règles du domicile.
Au début des années 2000, lors d’une visite d’inspection, la RAMQ a pris la position qu’un tel local était un cabinet et que le médecin ne pouvait pas se prévaloir des codes applicables aux visites à domicile. La Fédération avait la même lecture. Les conséquences sur la facturation étaient différentes d’aujourd’hui. À l’époque, lorsqu’il se rendait chez le patient, le médecin pouvait seulement réclamer la visite à domicile auprès du patient en perte importante d’autonomie ou la visite à domicile, dans les deux cas pour un maximum de trois patients sous le même toit. Par la suite, il devait s’en tenir à l’examen ordinaire ou à l’examen complet. Il n’avait pas accès à l’examen complet majeur ni à la thérapie psychiatrique de soutien à domicile.
En cabinet, il ne pouvait pas se prévaloir des tarifs d’examen à domicile, mais pouvait réclamer l’examen complet majeur et la thérapie psychiatrique de soutien. Et le médecin pouvait toujours choisir de voir certains patients à leur appartement ou à leur chevet et d’autres dans le local offert.
Sous la nouvelle nomenclature applicable en première ligne, autant en cabinet qu’à domicile, le médecin traitant a accès à la visite périodique du patient vulnérable de même qu’à l’intervention clinique. La différence persistante entre cabinet et domicile est l’accès à la visite à domicile auprès du patient en perte importante d’autonomie. Selon la logique appliquée jusqu’alors, la visite à domicile ne pouvait être facturée pour la clientèle ambulatoire d’une résidence pour personnes autonomes se présentant au local aménagé. Elle pouvait l’être seulement quand le médecin se rendait dans les appartements de ces patients.
Du fait d’autres modifications à l’entente depuis le début des années 2000, sont apparus deux autres enjeux : l’accès à la compensation pour les frais de cabinet et la possibilité de former un groupe de pratique. Les visites à domicile liées à la pratique en cabinet sont comptabilisées pour l’atteinte des six ou des douze visites quotidiennes donnant droit à cette compensation. La notion de groupe de pratique pour le partage de la tarification des patients vulnérables au sein d’un groupe de médecins existe seulement en cabinet ou en établissement, mais non à domicile.
Voyant apparaître ces deux derniers enjeux du fait des demandes de codification de locaux dans les résidences pour personnes autonomes et les communautés religieuses, le ministère a fait part de ses objections à la RAMQ. Comme les médecins qui exerçaient de façon autonome dans ces milieux ne payaient pas de loyer, il lui semblait inapproprié que ces médecins bénéficient de la tarification et des avantages applicables en cabinet. Toutefois, lorsque des médecins exerçant en cabinet pratiquaient en plus dans de tels milieux, le ministère semblait plus ouvert à tenir compte des dépenses qu’ils assumaient durant leur absence du cabinet pour faire des visites à domicile (loyer, secrétariat, etc.).
C’est dans ce contexte que la RAMQ a annoncé son interprétation selon laquelle ces locaux ne pouvaient pas être des cabinets, car les patients étaient hébergés dans ces milieux. Dans un premier temps, la Fédération a fait valoir que cette position n’était pas cohérente avec les propos des législateurs lors des débats sur le projet de loi réformant la Loi sur les services de santé et services sociaux, ni avec les positions antérieures de la RAMQ.
Le ministère a alors indiqué qu’il tenait à modifier la définition d’un cabinet dans l’entente. Après discussions, la Fédération a décidé de ne pas s’objecter au changement de position de la RAMQ, du moins dans l’avenir. Toutefois, en cas de contestation d’une facturation antérieure, elle interviendrait pour soutenir le médecin en cause.
Il faut noter qu’en fonction des objections soulevées, le ministère se soucie probablement encore de la possibilité pour des médecins qui n’ont aucune pratique en cabinet, d’accéder à la tarification prévue en cabinet lors de visites à domicile dans les milieux en question. Cependant, pour l’instant, il n’y a pas eu de discussions à ce sujet.
Donc, pour l’instant, le médecin dont les activités dans une résidence pour personnes autonomes font partie de son offre de service en cabinet ou en établissement doit utiliser le code du cabinet, du CLSC ou du GMF-U en question lors de l’ensemble des visites dans le milieu, autant au chevet des patients que dans le local mis à sa disposition. Par conséquent, il peut se servir du code de visite à domicile pour le patient en perte importante d’autonomie, autant dans le local mis à sa disposition que lors de visites au chevet du malade (tableau).
Au-delà des trois premières visites auprès du patient en perte importante d’autonomie, il se servira de la nomenclature applicable dans son milieu d’attache selon les tarifs du cabinet ou de l’établissement.
S’il se fait remplacer pendant ses vacances ou pour d’autres raisons, le médecin remplaçant, qui provient du même milieu d’attache (tant qu’il fait partie du groupe de partage des bonifications pour patients vulnérables et que le lieu de suivi associé à l’inscription des patients est le milieu d’attache) peut se prévaloir des tarifs pour patients vulnérables lorsqu’il voit ces patients dans la résidence ou la congrégation religieuse.
L’ensemble des visites le même jour, sur rendez-vous ou en accès adapté, autant en cabinet qu’à la résidence pour personnes autonomes ou dans la congrégation religieuse, sera comptabilisé pour fixer la compensation pour les frais de cabinet auquel le médecin a droit.
Le médecin dont les activités dans une résidence pour personnes autonomes ou une congrégation religieuse ne sont pas liées à une offre de service en cabinet ou en établissement, doit utiliser le code postal du milieu lors de sa facturation de l’ensemble des visites.
Il peut se servir du code de visite à domicile pour les patients en perte importante d’autonomie, autant pour les consultations dans le local mis à sa disposition que lors de visites au chevet du malade (tableau).
Au-delà des trois premières visites auprès du patient en perte importante d’autonomie, il se servira de la nomenclature applicable et des tarifs en cabinet.
Pour les remplacements de vacances, le médecin remplaçant ne pourra réclamer la tarification pour le patient vulnérable, du fait qu’il n’existe pas de groupe de pratique.
L’ensemble des visites le même jour, sur rendez-vous ou en accès adapté, autant en cabinet qu’à la résidence pour personnes autonomes ou dans la congrégation religieuse, ne sera pas comptabilisé pour fixer la compensation pour les frais de cabinet auquel le médecin a droit.
Dans les deux cas précédents (code de cabinet, CLSC, GMF-U ou code postal), aux fins du respect des exigences sous-territoriales ou territoriales des PREM, les services seront comptabilisés en fonction du lieu du cabinet, du CLSC ou du GMF-U dans le premier cas et du lieu de la résidence ou de la congrégation dans le deuxième.
Le médecin qui facture les services en utilisant le code de localité sera rémunéré comme celui qui se sert du code postal, mais les services seront comptabilisés comme s’ils avaient été rendus en dehors du territoire ou du sous-territoire de l’avis de conformité du médecin au PREM. Ce problème touche surtout les médecins dont l’avis de conformité le plus récent est postérieur au 30 juin 2017, mais non ceux qui détiennent leur permis du Collège des médecins du Québec depuis vingt ans ou plus.
Espérons que ces informations vous permettent d’adapter votre facturation dans les résidences pour personnes autonomes et les congrégations religieuses. Le mois prochain, nous traiterons de changements touchant les médecins qui exercent en musculo-squelettique. D’ici là, bonne facturation ! //