Vos régimes enregistrés subissent de fortes répercussions dans le contexte de la volatilité accrue des marchés. Cette situation peut toutefois offrir certaines opportunités dont il faut être conscient pour savoir en tirer profit.
Le retrait minimal d’un fonds enregistré du revenu de retraite (FERR) pour une année est toujours déterminé en fonction de sa valeur marchande en début d’année. Toutefois, puisque la pandémie de la COVID-19 a provoqué une chute importante de la valeur d’une grande majorité des FERR depuis février 2020, le montant du retrait minimal de ce régime pour 2020, tel que déterminé au 1er janvier 2020, a été réduit de 25 %. Par exemple, si votre minimum à retirer du FERR était initialement de 40 000 $ pour 2020, il sera maintenant de 30 000 $ (40 000 $ x 75 %).
En revanche, si vous avez retiré plus que le nouveau montant du retrait minimal pour 2020, aucun remboursement à votre FERR ne sera possible. Cette mesure fiscale vise également les FERR immobilisés et les fonds de revenu viager (FRV).
Le 16 avril 2020, dans le contexte de la COVID-19, le gouvernement du Québec a également annoncé une mesure temporaire permettant l’assouplissement des règles de décaissement des fonds de revenu viager (FRV) pour 2020. Pour plus de détails, nous vous invitons à consulter le site de Retraite Québec.
Au décès du détenteur d’un REER ou d’un FERR, la valeur de ces régimes au jour du décès est entièrement imposable dans les déclarations de revenus du défunt pour l’année de son décès. Le « roulement fiscal au décès » qui consiste à transmettre ces régimes au conjoint (marié ou de fait) ou à un enfant à charge qui est mineur ou handicapé permet de reporter l’imposition de ces régimes. Pour ce faire, le REER ou le FERR devront être transférés dans un régime établi au nom du conjoint ou de l’enfant (REER, FERR ou contrat de rente admissible) selon ce que la loi permet.
Pour plus de détail sur le roulement fiscal, nous vous invitons à consulter notre article « Le REER au décès » paru en septembre 2018.
La chute des marchés boursiers pourrait représenter une opportunité fiscale fort intéressante à l’égard du REER ou du FERR d’un détenteur récemment décédé, qui ne peuvent pas être transmis par roulement fiscal (ex. : le REER ou le FERR légué à des enfants majeurs non handicapés).
Ces opportunités fiscales découlent de la variation de la valeur du régime entre le décès et le désenregistrement du régime, laquelle peut augmenter, diminuer ou rester inchangée.
Prenons l’exemple d’un REER ou d’un FERR dont la valeur des placements constitue 500 000 $ au jour du décès, en décembre 2019. Selon le testament du défunt, tous ses biens (incluant son REER) sont légués à son fils âgé de 35 ans. Au moment de la terminaison du REER en avril 2020, la valeur des placements représente 400 000 $.
Aux fins fiscales, le montant de 500 000 $ sera ajouté au revenu imposable du défunt pour l’année 2019. Cependant, la baisse de valeur de 100 000 $ pourra être déduite du revenu imposable du défunt en 2019. Le montant net imposable en 2019 sera donc de 400 000 $ à l’égard du REER.
Pour avoir droit à cette déduction, le REER doit être terminé au plus tard le 31 décembre 2020. La terminaison d’un REER ou d’un FERR signifie que les placements détenus dans ceux-ci peuvent être transférés dans le compte de placement non enregistré de la succession. Ce transfert n’est jamais assujetti aux retenues d’impôt à la source.
Revenons à notre exemple. Pour la succession et l’héritier, les placements obtenus à la suite de la terminaison du REER auront un coût fiscal de 400 000 $ (soit la valeur du REER au moment de sa terminaison).
Par conséquent, en cas de vente ultérieure, toute augmentation de valeur au-delà de 400 000 $ sera traitée comme un gain en capital, dont seulement la moitié sera imposable. Par exemple, un prix de vente de 500 000 $ déclenchera un gain en capital de 100 000 $, dont seulement la moitié (50 000 $) sera ajoutée au revenu imposable de l’année de la vente.
Dans cet exemple, la terminaison du REER au moment opportun (en avril 2020) aura permis de convertir un revenu de 100 000 $, qui aurait été autrement pleinement imposable au décès, en un revenu de 50 000 $ qui sera imposable ultérieurement, soit lors de la vente des placements à un moment où ils auront remonté à leur valeur de 500 000 $. Il arrive parfois que la reprise des marchés boursiers soit assez rapide, surtout lorsque leur chute aura été brusque et prononcée.
Dans un marché baissier, il est donc nettement plus avantageux pour les héritiers de terminer le REER à un moment où sa valeur se trouve à son niveau le plus bas. Les épargnes fiscales seront d’autant plus colossales que la valeur du REER au décès sera substantielle et que sa baisse sera significative.
Malheureusement, il est impossible de prévoir le meilleur moment pour terminer le REER. Si la valeur des placements poursuit sa baisse après la terminaison du régime et que lesdits placements sont éventuellement vendus, la succession ou l’héritier, selon le cas, pourra au moins réaliser une perte en capital pour la dévaluation additionnelle.
Pour fins de comparaison, si le REER du défunt est terminé avant sa baisse de valeur (500 000 $ dans notre exemple), tout ce montant sera imposable au décès ; et la vente ultérieure des placements à un prix de 500 000 $ ne déclenchera aucun gain ni perte en capital pour les héritiers. Si ce prix de vente est différent, il y aura alors un gain ou une perte en capital, selon le cas.
Lorsque le décès du rentier survient lors d’un marché haussier, le liquidateur aura avantage à terminer le REER ou FERR le plus rapidement possible après le décès.
À partir de notre exemple, supposant que les placements affichent une plus-value non réalisée de 50 000 $ entre le jour du décès et la terminaison du REER. Le montant imposable au décès sera de 500 000 $. Quant à la somme de 50 000 $, elle constituera un revenu pleinement imposable pour la succession (et non un gain en capital). Pour la succession et l’héritier, les placements auront un coût fiscal de 550 000 $.
Si le REER est plutôt terminé avant cette hausse de valeur de 50 000 $, le coût fiscal des placements sera de 500 000 $ pour la succession. La vente ultérieure des placements à un prix de 550 000 $ déclenchera un gain en capital de 50 000 $, dont seulement la moitié (25 000 $) sera imposable. Il s’agit d’un avantage fiscal intéressant.
Tant que le régime n’aura pas été terminé, tous les revenus générés par les placements après le décès demeureront à l’abri de l’impôt (intérêts, dividendes et gains en capital). Cette règle fiscale s’applique jusqu’au 31 décembre de l’année qui suit l’année du décès.
Toutefois, ces revenus accumulés dans le REER ou le FERR seront pleinement imposables pour la succession au moment de la terminaison des régimes et ne pourront pas bénéficier de l’imposition favorable des dividendes de source canadienne et des gains en capital, ni donner droit à des crédits pour impôts étrangers.
Si le régime est terminé avant la réalisation de ces revenus de placement, ceux-ci seront aussi imposés dans la succession, mais en tenant compte des particularités fiscales de chaque type de revenus. Lorsque ces revenus sont importants, il sera avantageux de terminer le REER ou le FEER le plus tôt possible après le décès.
Puisque la terminaison du REER ou du FERR du défunt doit être effectuée à un moment stratégique, il revient au liquidateur de s’assurer qu’il pourra le faire le temps venu. À cet égard, il doit remettre promptement à l’émetteur du REER ou du FERR tous les documents juridiques requis afin de démontrer qu’il a tous les pouvoirs pour agir comme liquidateur. Il devra ensuite ouvrir un compte non enregistré au nom de la succession. Ces étapes administratives peuvent parfois entraîner de longs délais. //
Note de la rédaction. Ce texte a été écrit, révisé et mis en pages par Conseil et Investissement Fonds FMOQ inc. et ses mandataires. Il n’engage que ses auteurs.