prendre du recul pour mieux avancer !
Parmi toutes les complications qui ont pu, au fil des années, gêner la gestion d’une entreprise, la COVID-19 demeurera pour longtemps dans une classe à part. Les cliniques médicales n’y ont bien sûr pas échappé. Les défis et les obstacles ont été très nombreux. Les médecins qui exploitent une clinique en savent quelque chose. Et ce n’est pas fini.
M Pierre Belzile, avocat, est directeur du Service juridique de la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec. |
D’une façon ou d’une autre, la crise associée au coronavirus a forcé tous les médecins québécois à revoir non seulement la façon dont ils exercent la médecine, mais également le fonctionnement et l’organisation de leurs cliniques médicales.
De multiples questions auront surgi au fil des mois, dont plusieurs liées à l’organisation des services dans un territoire, aux modes de rémunération, aux règles internes de fonctionnement et aux obligations contractuelles d’une clinique. Certains ont parfois tendance à ne pas suffisamment s’en rendre compte : une clinique médicale, qu’elle soit reconnue comme GMF ou non, est une entreprise.
Comme nous en discutions déjà dans ces pages en 2018, chaque clinique médicale possède une réalité professionnelle et contractuelle qui lui est propre. Qu’il s’agisse des ententes régissant les relations entre les médecins, l’organisation médicale, la gestion des ressources humaines, les baux commerciaux, les ententes individuelles de location de bureau, les contrats de travail, les contrats avec les fournisseurs et les partenaires externes, plusieurs contrats visent à encadrer une foule de situations.
De fait, les règles de gestion, les ententes, les contrats, les conventions, peu importe le nom qu’on leur donne, constituent tous des instruments juridiques fondamentaux dans l’exploitation d’une clinique médicale. Les médecins qui travaillent dans une clinique, qu’il s’agisse ou non d’un GMF, ont tous intérêt à réviser leurs règles et les outils conventionnels qui leur permettent d’exploiter leur entreprise pour en tirer, à l’avenir, le meilleur parti. C’est l’un des nombreux effets de la COVID-19.
La pandémie de COVID-19 est probablement l’occasion de revisiter ses règles de fonctionnement et, par la force des choses, son environnement contractuel.
Dans une clinique médicale, il est certainement opportun, à la lumière des nouvelles réalités commerciales et professionnelles qu’a engendrées la COVID-19, de vérifier si les règles écrites de régie interne applicables à tous les médecins qui y exercent et les contrats de l’entreprise sont encore adéquats.
Dans le cas d’un GMF, par exemple, les éléments conventionnels qui suivent devraient maintenant inclure des modalités d’exception en cas de crise, chose à laquelle peu de gens s’intéressaient auparavant :
h fonctions du médecin responsable ;
h obligations des médecins du GMF ;
h modes de fonctionnement pour la prise des décisions collectives ;
h gestion des horaires et des divers congés.
En droit civil québécois, la notion de « force majeure » a des incidences pratiques sur les contrats commerciaux et sur l’exécution, ou l’inexécution, des obligations des parties contractantes. Le coronavirus a mis en lumière cette notion de droit à laquelle peu de gens, auparavant, attachaient suffisamment d’importance.
Le Code civil du Québec stipule en effet que toute personne peut se dégager de sa responsabilité pour le préjudice causé à autrui, comme l’inexécution d’un contrat, si elle prouve que ce préjudice résulte d’une force majeure.
La force majeure, en droit civil québécois, est un événement imprévisible et irrésistible, une situation dont on ne pouvait raisonnablement prévoir ni empêcher la survenance.
En 1998, la crise du verglas a été qualifiée de cas de force majeure. Il en est de même de la COVID-19.
La force majeure modifie, à plusieurs niveaux, l’ordre des choses.
Ses conséquences légales peuvent cependant être encadrées dans les différents contrats régissant la vie d’une entreprise. Il est donc possible pour des parties contractantes d’être prévoyants.
Les conseillers juridiques d’une clinique médicale devraient être consultés à cet égard.
Dans le contexte actuel de la pandémie de COVID-19, les médecins propriétaires de cliniques médicales tirent d’importants renseignements. Ainsi, ils doivent porter une attention particulière à toutes leurs règles de fonctionnement, à la gestion de leurs ressources humaines et à l’environnement contractuel de leurs entreprises.
Prévoir de nouvelles clauses de force majeure adaptées à la nouvelle réalité n’est pas un luxe dans un environnement contractuel. C’est même maintenant devenu une nécessité.
Prévoir des mesures d’urgence, être prêts en matière de travail, d’emploi, de ressources humaines, savoir gérer des enjeux liés aux affaires bancaires, au financement et au fonctionnement de sa clinique médicale, à l’immobilier, aux baux et aux assurances, autant de choses que les médecins auront appris à ne pas négliger depuis l’apparition de la COVID-19. N’hésitez pas à consulter vos conseillers juridiques. Le Service juridique de la FMOQ peut vous aussi vous fournir de précieux renseignements. //
1. Belzile P. L’importance des contrats régissant l’exploitation d’une clinique médicale. Le Médecin du Québec. 2018 ; 53 (10) : 61-2.