Questions... de bonne entente

Assurance voyage et pandémie

des modifications pour limiter les surprises

Michel Desrosiers  |  2020-12-22

L’année 2020 a donné lieu à bien des surprises sur le plan des voyages. Il y a fort à parier qu’il s’agit d’un poste de dépenses qui a pesé moins lourd sur votre budget personnel que dans les années précédentes. Les événements liés à la pandémie en ont surpris plusieurs, notamment les membres du comité sur les assurances. Revoyons certaines limites de la couverture de votre assurance et les modifications effectuées en cours d’année pour améliorer le produit.

Le Dr Michel Desrosiers, omnipraticien et avocat, est directeur des Affaires professionnelles à la FMOQ.

En mars, les autorités tant québécoises que canadiennes nous encourageaient tous à rentrer au pays. Dans certaines directives, SSQ Assurance indiquait à ses clients qu’ils devaient entrer au Canada avant le 27 mars, faute de quoi ils ne seraient plus assurés pour les soins de santé dont ils auraient besoin par la suite s’ils attrapaient la COVID-19 à l’étranger. Dans les faits, pour le produit haut de gamme de la Fédération, il ne s’agissait que d’une recommandation. Les médecins n’auraient pas perdu leur couverture. C’est seulement à partir d’avril quand l’assureur a indiqué que les soins nécessités par la COVID-19 en voyage n’étaient plus assurés (car il ne s’agissait pas d’un événement imprévisible) que l’assuré perdait sa couverture.

Cette position découle de l’application des règles du contrat qui prévoient que les maladies ou affections subites et inattendues qui surviennent en voyage sont assurées. La SSQ, comme plusieurs autres assureurs canadiens, a simplement jugé que le fait d’attraper la COVID-19 à l’étranger n’était plus un événement imprévu (ou subit) et n’était donc plus couvert par le contrat.

Premier constat, la couverture peut être réduite en cours de voyage lorsqu’il y a des changements aussi importants en matière de santé publique. La situation pourrait donc se reproduire en cas de nouvelle pandémie ou si une épidémie survenait dans certains pays. Cette limitation n’ayant jamais été invoquée par le passé, on comprend que la situation devrait être très exceptionnelle.

L’autre constat est devenu évident lorsque des adhérents ont cherché à obtenir le remboursement de voyages annulés : l’assureur est en deuxième ligne en ce qui a trait à l’assurance annulation de voyages. Lorsque le grossiste ou le fournisseur annule un voyage ou le transport, comme cela a été le cas pour plusieurs en avril, mai et juin dernier, le voyageur doit d’abord se tourner vers le grossiste ou le fournisseur, puis vers le Fonds d’indemnisation des clients des agents de voyage. L’assureur ne prend en charge que les frais qui ne sont pas « remboursés » par le fournisseur, le grossiste ou le Fonds.

À cette fin, un crédit applicable à un voyage ultérieur as­sorti d’un délai raisonnable est traité comme un rem­boursement, même quand le voyageur préfère un rembour­sement en espèces ou refuse le crédit. Certains transporteurs ou grossistes ont remboursé le montant payé, mais d’autres (notamment la plupart des transporteurs aériens canadiens) s’en sont tenus, selon la destination, à un crédit que le Fonds d’indemnisation et l’assureur traitent de la même façon qu’un remboursement en espèces. Ce volet n’a pu être modifié.


L’assurance voyage se limite au remboursement des frais qui ne sont pas remboursés par le fournisseur ou voyagiste ou par le Fonds d’indemnisation des clients des agents de voyage.

Par ailleurs, le Fonds d’indemnisation étant débordé de demandes, la SSQ, comme d’autres assureurs, a offert d’évaluer les demandes, d’effectuer les remboursements aux assurés et, par la suite, de se faire rembourser à même les sommes versées par le Fonds. Il est malheureux qu’il ait fallu attendre plusieurs mois pour que ce mode de fonctionnement soit annoncé, mais l’Office de protection des consommateurs, qui chapeaute le Fonds d’indemnisation, et les assureurs devaient convenir du fonctionnement et du partage des frais d’analyse des dossiers de réclamation.

Tableau

En raison de ce délai, depuis l’annonce de ces modalités, le compteur repart à zéro lorsque vous soumettez les informations à l’assureur pour lui permettre d’évaluer votre réclamation. Attendez-vous à un délai de trois mois à partir de cette nouvelle date pour que la SSQ traite votre réclamation et effectue votre remboursement.

L’autre zone grise qui est apparue est la couverture d’assurance annulation ou interruption de voyage pour des plate­formes du genre Airbnb ou VRBO. Le contrat avec la SSQ couvre les frais payés à des intermédiaires commerciaux, comme les agences de voyages et de location de voiture. Une précision a depuis été ajoutée pour prévoir expressément la couverture des réservations effectuées par l’entremise de tels services. Toutefois, les locations directes auprès d’un propriétaire ou par l’entremise d’un tiers (un autre membre de la famille, par exemple) au bénéfice d’un assuré ne sont toujours pas couvertes. Il est donc préférable de faire vos réservations directement à votre nom et auprès d’un fournisseur commercial.


L’assurance annulation de voyage couvre les frais payés à des intermédiaires commerciaux (agence de voyages ou de location de voiture, hôtel, Airbnb, VRBO, etc.), mais pas les locations directes auprès du propriétaire d’un appartement.

Exclusion des cas de COVID-19 et modifications convenues

L’exclusion de la couverture des cas de COVID-19 rend l’assurance voyage essentiellement inutile pour ceux qui veulent voyager à l’étranger. Elle demeure utile pour les voyages à l’intérieur du Canada, ce qui limite les horizons. La Fédération a donc eu des discussions avec la SSQ pour faire couvrir ce risque. D’autres modifications seront apportées dans la même foulée (tableau).

Depuis le début du mois d’octobre, c’est maintenant chose faite. L’assureur n’opposera pas le caractère prévisible de la COVID-19 comme raison pour motiver un refus de couverture, à moins que le gouvernement du Canada déconseille « tout voyage » vers votre destination ou un lieu de transit (avis de niveau 4) (encadré).

Depuis la modification convenue, des voyages de tourisme à l’extérieur du Canada, autrement que par croisière, sont donc couverts, tant que l’assuré quitte la destination dans les quatorze jours suivant l’avis du gouvernement concernant le passage au niveau 4. Cette modification est faite sous réserve des autres conditions de la couverture : l’événement doit être subit et imprévisible, il ne doit pas s’agir d’un voyage pour se faire soigner à l’étranger, et vous ne devez pas présenter de symptômes de COVID-19 au moment du départ. C’est une grosse amélioration.

Toutefois, l’assureur en a profité pour revoir son contrat standard, sur lequel repose le contrat OMNIMAX. Depuis le 1er janvier 2021, la couverture des réclamations sans lien avec la COVID-19 est limitée aux pays ou régions visés par une recommandation de niveau 3 ou moins. Il s’agit donc d’une réduction de la couverture du contrat d’assurance voyage. Que ce soit pour la COVID-19 ou pour les autres situations, le niveau de recommandation retenu est celui qui prévalait au moment de votre départ. Si le niveau devait changer en cours de voyage (passage au niveau 4), vous demeureriez assuré au plus quatorze jours afin de vous permettre d’organiser votre retour au Canada ou vers un autre lieu de séjour qui n’est pas visé par un tel avis. Si vous restez sur place et devenez malade par la suite, l’assurance ne couvrira pas les soins nécessaires. Vous devez donc vérifier le niveau de recommandation le jour de votre départ et périodiquement pendant un voyage prolongé.

Cette modification a aussi été apportée à l’assurance annulation et interruption de voyage, bien qu’il s’agisse d’un contrat distinct. Les conditions de ce contrat étaient déjà plus restrictives. Les annulations et les interruptions de voyage pour des destinations visées par la recommandation de niveau 3 ou 4 au moment de la réservation n’étaient pas couvertes. Seules les annulations ou interruptions effectuées lorsque la recommandation pour la destination était de niveau 1 ou 2 au moment de la réservation l’étaient.


Depuis le début d’octobre 2020, l’assurance assume les frais liés aux soins exigés par la COVID-19 que vous avez contractée à l’étranger, tant que le gouvernement du Canada ne déconseillait pas « tout voyage » vers votre destination ou dans un lieu de transit au moment de votre départ et que vous avez quitté la région ainsi visée moins de 14 jours après l’émission d’une telle recommandation.

Depuis le 1er octobre 2020, l’assureur couvre les annulations si la recommandation était de niveau 1 à 3 au moment de la réservation. C’est donc dire que l’annulation d’un voyage parce que la recommandation est passée du niveau 3 ou moins au niveau 4 entre la date de la réservation et le moment du départ est assurée.

Encadré

Par ailleurs, si vous réservez lorsque la recommandation du gouvernement canadien est de niveau 4 et que ce niveau est par la suite abaissé avant votre départ, l’annulation pour une autre cause apparue après l’abaissement du niveau d’avis serait couverte (hospitalisation d’un des compagnons de voyage, par exemple), mais non le fait que la destination soit visée par une recommandation de niveau 3 du gouvernement canadien.

Dans le cas d’une assurance interruption de voyage, si l’assuré part en voyage lorsque la recommandation est de niveau 3, il ne pourra pas invoquer cette raison pour interrompre son voyage, à moins que la recommandation passe au niveau 4.

Si l’assuré part en voyage quand la recommandation est inférieure au niveau 3, mais qu’elle passe au niveau 3 ou 4 au cours de voyage, la personne doit se conformer à l’avertissement dans les quatorze jours de l’avis pour avoir droit à la couverture d’interruption de voyage à cause du changement du niveau de recommandation. C’est donc dire que si la recommandation passe au niveau 3 pendant qu’il est à l’extérieur du pays, que l’assuré décide de poursuivre son voyage, mais qu’il change d’avis trois semaines plus tard quand la recommandation passe au niveau 4, il ne sera pas couvert par l’assurance interruption.


Une couverture d’assurance ne vous garantit pas des soins sur place pendant votre séjour, la capacité du système local de santé pouvant être dépassée.

Il faut aussi être conscient qu’il peut être plus difficile d’obtenir des soins localement pendant votre séjour si le nombre de malades dépasse la capacité du système de santé local. Le fait de pouvoir payer (ou de faire assumer les frais par un assureur) ne garantit pas toujours l’accès aux soins, du moins dans certaines situations de « catastrophe ». De plus, lors du passage au niveau 4, il peut être difficile de trouver du transport pour quitter la destination en raison de la demande subite.

Le fait d’avoir une couverture d’assurance ne constitue donc qu’un des éléments à prendre en compte dans votre évaluation du risque de voyager ou de demeurer dans un pays où le taux d’infection de COVID-19 ferait un bond spectaculaire. On part généralement en vacances pour se reposer, et non pour vivre un stress important.

Enfin, il ne faut pas oublier que la couverture d’assurance ne vous dispense pas de l’obligation de quarantaine à votre retour de l’étranger. Il s’agit donc d’un autre facteur qui peut influencer votre décision d’aller jouer au golf dans le Sud ou de prendre congé de l’hiver.

Quelques-uns d’entre vous se sont informés de la possibilité d’obtenir un remboursement d’une portion du coût de l’assurance voyage en 2020 du fait des limites de couverture. Malgré la réduction du nombre de voyages, les réclamations jusqu’en juin ont été élevées, particulièrement chez les gens de 70 ans et plus dont l’expérience a été catastrophique. L’expérience est plus favorable chez les voyageurs de moins de 65 ans. Les primes du volet assurance voyage des personnes de 70 ans et plus vont donc augmenter de façon importante à partir du 1er janvier 2021, mais pas celles des assurés de moins de 65 ans.

Espérons que vous comprenez mieux les limites de l’assurance voyage et que vous êtes maintenant en mesure de décider plus facilement de votre conduite. À la prochaine ! //