En fin... la facturation

Est-ce qu’il y a un congé de paternité prévu dans l’Entente ?

Michel Desrosiers  |  2021-10-28

De plus en plus de médecins demandent s’ils ont droit à un congé de paternité payé à la naissance d’un enfant, comme pour le congé de maternité ou d’adoption. Présentement, ce n’est pas le cas. Il existe quand même différents traitements particuliers dans l’Entente durant un « congé de paternité » qui sont avantageux. Les connaissez-vous ?

Le Dr Michel Desrosiers, omnipraticien et avocat, est directeur des Affaires professionnelles à la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec.

L’Annexe XVI, qui fixe le droit à des allocations de maternité ou d’adoption, se limite à ces deux situations. Rien n’est prévu pour le conjoint ou conjointe de la femme qui accouche, ni d’ailleurs pour celui ou celle qui désire adopter les enfants de sa conjointe. C’est donc dire que les allocations d’adoption sont accessibles quand l’enfant n’est pas celui des conjoints.

Quelles sont alors les autres modalités prévues à l’Entente qui peuvent présenter un certain intérêt pour le médecin pendant ces « congés de paternité » ? Revoyons-les.

Accès à la tarification bonifiée

h Au retour d’une absence de congé de maternité ou d’adoption (mais pas de paternité), le médecin pourra se pré­valoir de la tarification bonifiée selon l’évaluation du nombre de patients inscrits immédiatement avant son départ. Le cas échéant, il la conservera pendant les quatre-vingt-dix jours qui suivent son retour. Par la suite, la tarification bonifiée sera fonction du nombre de patients inscrits à ce moment, jusqu’au début du trimestre subséquent, à partir duquel la tarification dépendra du nombre de patients inscrits le premier jour du mois qui précède un nouveau trimestre.

h Essentiellement, le médecin en congé de maternité ou d’adoption dont le nombre de patients inscrits devient inférieur à 500 pendant son congé aura 90 jours après son retour pour reconstituer sa clientèle, tout en bénéficiant de la tarification dont il disposait avant son départ.

h Pour le médecin en début de pratique qui avait accès à la tarification bonifiée parce qu’il avait pris l’engagement d’inscrire 500 patients avant la fin de sa première année, ce délai est prolongé de la durée de son congé de maternité ou d’adoption.

h Dans les deux cas, pour bénéficier de ce traitement, le médecin devra aviser la RAMQ de son absence (notamment de la date de son départ et de son retour) et mentionner qu’il s’agit d’un congé de maternité ou d’adoption.

Forfaits annuels de responsabilité

h Le médecin qui interrompt ses activités pendant plus de treize semaines consécutives doit en informer la RAMQ, qui suspendra le versement du forfait annuel de prise en charge pour les patients vulnérables. Cette suspension s’applique aussi aux congés d’invalidité de plus de treize semaines, de maternité ou d’adoption, sans égard à la durée de ces deux derniers congés. Comme le congé de paternité est habituellement de moins de trois mois, il n’est pas touché par cette mesure. On peut donc y voir un petit avantage. Si le congé dépasse treize semaines consé­cutives, c’est toutefois autre chose.

h Dans le cas du forfait d’inscription générale, on observe la même différence de traitement entre congé de paternité et congé de maternité et d’adoption. Ce forfait étant payable si l’inscription des patients est active le 31 décembre de l’année précédente, le médecin en congé de paternité pendant au plus treize semaines consécutives reçoit le plein forfait pour l’année, contrairement à celui en congé de maternité ou d’adoption dont le paiement sera calculé au prorata du nombre de mois travaillés durant l’année en question.

h Enfin, en ce qui a trait aux mesures incitatives selon le volume de patients inscrits actifs, si le congé de paternité ne dépasse pas treize semaines consécutives, le médecin reçoit le plein montant en fonction du nombre de patients inscrits à son nom. Dans le cas du congé de maternité ou d’adoption, le paiement est calculé au prorata de la proportion des mois travaillés.

h Le médecin en congé de paternité n’est donc pas désavantagé, tant que la durée de son congé n’excède pas treize semaines consécutives. Il pourra toujours scinder son congé pour éviter de dépasser cette durée qui pourrait produire des effets sur le droit aux mesures incitatives.

Médecins en établissement

h Les médecins qui exercent en établissement sont plutôt préoccupés par la possibilité de prendre un congé de maternité, d’adoption ou de paternité. Ils craignent, en effet, de se faire dire que l’état des effectifs ne le leur permet pas.

h Or, après l’adoption du projet de loi 30 apportant des modifications à la Loi sur les services de santé et les services sociaux, les fédérations ont saisi l’occasion de négocier l’application de ce qui était énoncé. Parmi les éléments qui ont fait l’objet de négociations, on trouve les congés de maternité, d’adoption et de paternité.

h Partant du constat que le Régime québécois d’assurance parentale constitue une norme sociale et que les médecins devraient pouvoir en bénéficier autant que tous les autres Québécois, les fédérations ont obtenu que les médecins pères puissent se prévaloir d’un congé d’au plus cinq semaines, auquel s’ajoute un congé parental d’un maximum de 34 semaines partageable avec la mère. C’est donc dire qu’il existe un « droit » au congé de paternité en établissement, et les règlements prévus doivent s’appliquer.

h Ce « droit » n’existe pas en cabinet privé. C’est la convention de loyer ou d’association entre les médecins qui prévoit ce qui est permis ou non. Les modalités convenues entre les fédérations et le ministère pour l’établissement ne s’y appliquent pas.

AMP

h L’autre préoccupation des médecins lors d’un congé (de maternité, d’adoption ou de paternité), en établissement comme en cabinet, est l’effet du congé sur le respect de leur engagement concernant les AMP.

h Dans le cas du congé de maternité ou d’adoption, les exigences de l’entente particulière sur les AMP ne s’appliquent qu’après un congé de douze mois. Ce n’est pas le cas pour le congé de paternité. Par ailleurs, la réduction des honoraires prévue à l’entente particulière ne s’applique que si le médecin ne remplit pas ses engagements pendant deux trimestres consécutifs. Les congés de paternité ne durant généralement pas aussi longtemps, une telle contrainte ne devrait, par conséquent, pas poser de problème.

h En ce qui a trait à la comptabilisation de la période de pratique aux fins de l’atteinte des quinze ans d’AMP, cinq semaines de congé de paternité sont ainsi comptabilisées, même si le médecin n’exerce pas durant la période en question. On peut donc y voir une forme de congé de paternité. En outre, l’exigence de pratique pour cumuler une année s’applique sur dix mois dans l’année, ce qui pourrait prolonger le congé de paternité de deux mois additionnels.

Par conséquent, bien qu’aucune allocation ne soit prévue dans l’Entente pour un congé de paternité, d’autres modalités protègent le futur père qui prend congé. Ce dernier n’a qu’à s’en prévaloir. Quant à l’avenir, on verra. D’ici là, bonne facturation ! //

Aucune allocation n’est prévue pour le conjoint ou la conjointe de la femme qui accouche d’un nouveau-né. Bref, l’Entente ne prévoit pas d’allocation de paternité.