Entrevues

Entrevue avec le président de l’Association de Québec

réussites face à la pandémie

Élyanthe Nord  |  2021-03-03

La lutte contre la COVID-19 est difficile, mais elle est néanmoins marquée par des réussites. La région de Québec compte ainsi plusieurs succès, explique le Dr Pascal Renaud, président de l’Association des médecins omnipraticiens de Québec.

M.Q. — À l'automne, la région de Québec a été frappée de plein fouet par la pandémie. Est-ce que cette situation a été difficile ?

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P.R. – Oui, mais on a eu la chance que la région soit peu touchée au printemps. Cela nous a permis de préparer nos protocoles pour affronter la deuxième vague. Tout le travail médico-administratif nécessaire avait été effectué et les équipes médicales étaient beaucoup plus prêtes.

M.Q. — Quelle a été la contribution de l’établissement de soins Jeffery Hale dans la lutte contre la COVID-19 ?

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P.R. – Le Jeffery Hale, un hôpital comprenant un gros CHSLD, a été très touché. Quatre-vingt-quinze patients y ont été atteints de la COVID-19, dont 40 qui en sont décédés. Et plus d’une centaine d’employés ont été infectés. Chaque semaine, la pandémie montait d'un étage.
Après la crise, des médecins du Jeffery Hale, dont le Dr François Piuze, ont décidé de partager leur expérience pour que les problèmes qu'ils avaient vécus ne surviennent pas dans d’autres CHSLD. Chaque mois, ils organisaient des réunions sur Zoom avec les chefs des autres centres pour expliquer comment empêcher les éclosions, comment y faire face et quels étaient les pièges à éviter. La formation a commencé au printemps, dès le début de la pandémie. Les médecins du Jeffery Hale ont été des leaders. Ils voulaient s'assurer que les autres milieux soient prêts quand leur premier cas se déclarerait.
Je pense que cette initiative a donné des résultats. Cet automne, les CHSLD auraient normalement dû être plus touchés qu’ils ne l’ont été. Au printemps, quand l’un d’eux était atteint, une grande partie de la clientèle devenait infectée. Durant la deuxième vague, plusieurs CHSLD ont eu quelques cas, mais le virus ne s'est pas propagé. Les protocoles mis en place ont été efficaces. Quand un premier patient était positif, on le transférait tout de suite dans une ressource non traditionnelle comme l’Hôtel Le Concorde. Les mesures de protection et d'isolement semblaient également adéquates.

M.Q. — Et quelle a été la situation dans les résidences pour personnes âgées ?

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P.R. – C’était plus difficile quand une éclosion se produisait. Dans les CHSLD, il y a des infirmières, des préposés et des médecins qui peuvent s'occuper des patients dès les premiers symptômes. Les RPA, elles, ne disposent pas d’un tel personnel. C'est donc là où nos équipes médicales d’intervention entraient en jeu pour éviter que la COVID-19 ne se propage.

M.Q. — Quel rôle a joué votre association pendant la pandémie ?

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P.R. – Au printemps, les médecins se posaient beaucoup de questions sur différents plans. Les protocoles, par exemple, changeaient d'une semaine à l'autre. Il y avait également le problème de l’équipement de protection individuelle.
L’association a donc rapidement pris les mesures nécessaires pour informer et rassurer les médecins. Nous voulions qu’ils soient tous sur la même longueur d’onde. Nous avons ainsi collaboré activement avec le centre intégré universitaire de santé et de services sociaux (CIUSSS), le département régional de médecine générale (DRMG) et la Santé publique. Dès le mois de mars 2020, tous les quatre nous avons organisé régulièrement des téléconférences à l’intention des médecins sur le terrain. C’était un genre de webinaire-midi au cours duquel l'association se prononçait sur les nouvelles ententes négociées, le DRMG présentait les mesures qui allaient être adoptées, comme le délestage des infirmières, le CIUSSS donnait des informations sur l'approvisionnement en équipement de protection individuelle, et la Santé publique indiquait le nombre de cas de COVID-19 et expliquait la situation. Les médecins pouvaient poser des questions à la fin de la rencontre.
Ces rencontres ont commencé de manière assez intense : il y en avait deux par semaine au début. On a immédiatement eu une réponse incroyable : entre 300 et 600 médecins y assistaient. Tout le monde avait ainsi la même information. L'association compte 818 membres actifs, mais tous les omnipraticiens de la région étaient les bienvenus. Maintenant que la situation est plus calme, nous organisons une réunion toutes les deux semaines à laquelle participent environ 200 médecins.
Ces rencontres ont été extrêmement bénéfiques. On a eu des commentaires très positifs, et plusieurs médecins ont décidé de devenir membres de l'association. C'était la première fois dans la région qu’il y avait des réunions conjointes hebdomadaires regroupant toutes les autorités médicales locales et l'association syndicale. C'était du jamais vu.

M.Q. — Quelles sont les grandes leçons à tirer de la pandémie ?

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P.R. – Nous avons appris que, pour être efficace, il faut travailler tous ensemble. Nous ne pouvons pas être dans un silo, chacun de notre côté, et penser que nous allons offrir des soins de bonne qualité. C'est certain que la collaboration entre les différents acteurs de la région va se poursuivre.