La COVID-19 a entraîné la création d’un service que l’on n’avait encore jamais vu : les gardes en disponibilité pour les résidences privées et les ressources intermédiaires. Leur objectif : éviter des transferts inutiles à l’hôpital. Ainsi, lorsqu’un résident éprouve un problème de santé non urgent et que son médecin traitant n’est pas libre, il est désormais possible de joindre un omnipraticien de garde.
Ce nouveau service se décline différemment d’une région à l’autre. En Outaouais, par exemple, les médecins sont de garde une semaine et couvrent plusieurs RPA. Dans le secteur de Chicoutimi, les GMF se sont plutôt réparti les résidences. « Le mien est jumelé au Manoir Tadoussac, à une petite résidence d’une dizaine de lits ainsi qu’à une communauté d’une quarantaine de religieuses, indique le Dr Olivier Gagnon, président de l’Association des médecins omnipraticiens du Saguenay–Lac-Saint-Jean. Le médecin assigné au service de consultation sans-rendez-vous fait une garde de vingt-quatre heures pour les deux RPA. » Certaines régions ont par ailleurs plutôt mis en place un système de garde infirmière.
Les appels typiques concernent non seulement les symptômes de la COVID-19, mais aussi les plaies, les infections urinaires, les petits traumatismes, les lésions cutanées ou les problèmes digestifs, indique le Dr Guy Morissette, mandaté par le CISSS de l’Outaouais pour coordonner une liste de garde pour quelque quarante RPA. « Beaucoup de cas se règlent par téléphone ou par visioconférence », dit-il.
Même s’il n’a pas de statistiques à fournir, le Dr Morissette est catégorique : ce système permet d’éviter beaucoup d’hospitalisations. Et il pense qu'il aurait dû être mis en place bien avant la pandémie. « Ça fait des années que l’urgence est la solution facile. À la moindre inquiétude pour un patient, le réflexe de plusieurs résidences privées est d’appeler l’ambulance », constate l’omnipraticien qui exerce dans une RPA, en plus d’avoir une pratique en CHSLD.
La crise sanitaire a eu le mérite de sensibiliser les médecins et les gestionnaires du réseau de la santé à la réalité des résidences privées. « Auparavant, on avait des cas où une personne vue à l’urgence pour une plaie était retournée dans sa RPA avec une ordonnance d’antibiotiques par intraveineuse, rapporte le Dr Morissette, dont les patients ont en moyenne 87 ans. Or, plusieurs résidences n’ont pas d’infirmière et, s’il y en a une, elle finit de travailler à 16 h. Cela a été un choc le pour personnel des hôpitaux de découvrir cette situation pendant la première vague. »
Dans l’ouest du Québec, un nouveau processus de partage d’informations visant à faciliter le transfert des résidents est en train d’être mis sur pied. « Souvent, le patient arrive à l’urgence en ambulance, faible et confus, et personne ne sait pourquoi il est là », rapporte le Dr Philippe Cimon, qui coordonne les soins de première ligne en Outaouais. La nouvelle mesure prend la forme d’une liste de tâches à accomplir pour éviter ce type de situation. Ainsi, avant d’envoyer un patient à l’hôpital, l’infirmière ou le médecin de garde doit notamment décrire le cas au médecin de l’urgence et lui transmettre les renseignements médicaux disponibles, dont le niveau de soins. Et quand le patient obtient son congé, l’urgentologue fait de même pour le médecin traitant.
« Il y aura sans doute un bilan à faire après la pandémie, mais je suis convaincu que l’on conservera ce processus sous une forme ou une autre, estime le Dr Cimon. Le plus beau dans tout cela, c’est le rapprochement des interlocuteurs. Depuis un an, tout le monde s’adapte et collabore. »
Le Dr Morissette partage le même avis. La communication est maintenant plus fluide entre l’hôpital, les médecins et les RPA, remarque-t-il. « Avant, je devais souvent jouer au détective pour savoir pourquoi mon patient de 95 ans était allé à l’urgence et quels traitements il avait reçus. Il y a désormais un échange d’information entre le médecin de l’urgence et le médecin traitant. »
Évidemment, le clinicien souhaite que cette collaboration se poursuive une fois la COVID-19 vaincue. En ce qui concerne les gardes en disponibilité, il pense que la prise en charge de deux ou trois RPA par GMF, comme au Saguenay–Lac-Saint-Jean, pourrait faciliter les choses. « Éviter les transferts inutiles à l’hôpital. C'est bénéfique pour le réseau, mais aussi pour les patients. Une personne âgée qui a des problèmes cognitifs est plus susceptible de souffrir de délirium lorsqu’elle est hospitalisée. » //