Les médecins posent souvent des questions sur la rémunération de l’enseignement, en particulier sur l’accès aux modalités d’enseignement en GMF-U lorsqu’ils exercent dans certains secteurs spécifiques connexes. La description d’un lieu peut alors être trompeuse. Comprenez-vous bien les répercussions sur la rémunération d’exercer dans des lieux différents ?
Le Dr Michel Desrosiers, omnipraticien et avocat, est directeur des Affaires professionnelles à la FMOQ. |
Certaines modalités de rémunération de l’Entente sont accessibles sans égard à la nature du lieu, tant qu’il s’agit d’un milieu où le programme de formation envoie des externes, des résidents ou des infirmières praticiennes spécialisées en formation. On parle des demi-indemnités journalières (demi-per-diem) de supervision qui sont décrites à la Section I de l’Entente particulière sur le médecin enseignant, EP42. Le lieu peut être un cabinet, un CLSC, un hôpital, une urgence, une salle d’accouchement, une unité ou une maison de soins palliatifs, une unité de gériatrie de soins de courte durée, un CHSLD ou tout autre milieu.
L’accès à la demi-indemnité journalière de supervision ne se limite pas aux seuls GMF-U. En effet, elle peut s’appliquer partout. Il suffit de demander que votre milieu soit désigné. |
Les questions les plus fréquentes portent sur la façon de faire reconnaître ou désigner un milieu. Le processus est simple. Il suffit généralement de communiquer avec le Dr Claude Guimond, directeur de la Formation professionnelle à la FMOQ, qui est responsable de l’application de cette entente particulière.
À part la reconnaissance du milieu, l’autre question est de savoir comment traiter des stagiaires du Collège des médecins, c’est-à-dire des candidats à un permis restrictif qui font un stage de familiarisation ou d’évaluation ou de médecins qui font un stage d’évaluation à la suite d’une visite d’inspection du Collège soulevant des préoccupations ou d’une période de suspension du permis. Les médecins se demandent s’ils peuvent alors se prévaloir de la demi-indemnité de supervision.
Malheureusement, les stagiaires dans ces situations ne sont pas des résidents ni des externes et ne sont donc pas visés par les modalités de l’Entente particulière. C’est le Collège qui rémunère directement le médecin superviseur. D’ailleurs, comme la RAMQ exige que le médecin précise le nom et le matricule du résident, de l’externe et de l’IPS, celui qui voudrait réclamer des demi-indemnités se butera rapidement à un refus par son système de facturation.
Les externes ou les résidents étrangers faisant un stage d’immersion au Québec se voient tous attribuer un numéro d’externe ou de résident par le Collège des médecins du Québec. Ils sont visés par les modalités de rémunération de la supervision, et les médecins peuvent fournir les informations dont a besoin la RAMQ lors de leur facturation.
D’autres modalités sont spécifiques aux GMF-U. L’Entente particulière fait la distinction entre les milieux en établissement (Section II de l’Entente particulière) et ceux en cabinet privé (Section III de l’Entente particulière). Les questions de facturation touchent plus souvent les GMF-U en établissement, surtout en CLSC.
L’Entente particulière sur les médecins enseignants prévoit une rétribution à tarif horaire en GMF-U. Toutefois, il est aussi possible, par l’entremise de l’Annexe XXIII, de se prévaloir plutôt du mode mixte dans les GMF-U en établissement. Chaque formule de rémunération à son avantage. Au tarif horaire, toutes les heures sont payées de la même façon, ce qui veut dire que les activités d’encadrement clinique et pédagogique des résidents et le développement d’outils à cette fin à leur intention ainsi que l’enseignement sont moins bien rémunérés qu’en mode mixte. En contrepartie, le médecin à tarif horaire peut en plus être rétribué selon ce mode lors d’activités d’hospitalisation de courte durée liées aux activités du GMF-U, par exemple en unité d’hospitalisation du GMF-U. Le mode mixte est réservé aux activités ambulatoires seulement et ne s’applique pas hors du GMF-U, même pour des activités d’hospitalisation.
Plusieurs modes mixtes différents sont applicables en CLSC. Outre celui des services courants (qui rémunère aussi les activités de planification familiale et les IVG), un mode mixte est prévu pour le soutien à domicile et les GMF-U. En plus des modes mixtes, certaines modalités particulières existent dans certains secteurs d’activité (itinérance et toxicomanie, santé mentale). Dans un programme d’itinérance et de toxicomanie, la modalité spécifique prend la forme d’une indemnité s’ajoutant au tarif horaire. Dans le cas de la santé mentale, des services propres à ce programme peuvent être réclamés en fonction d’un pourcentage en sus du tarif horaire. Cette ébauche de mode mixte a été mise en place afin de produire des données sur les activités dans ce secteur dans le but de créer un jour un mode mixte spécifique.
Le mode mixte en GMF-U est le seul qui donne accès à une rémunération bonifiée sur base de temps pour l’enseignement et la supervision (acte d’intervention de supervision). Les autres modes mixtes accordent des bonifications sur les activités cliniques, mais aucun acte n’est prévu pour la supervision ou l’enseignement. Par conséquent, la rétribution de ces activités est inférieure. Cette différence fondamentale explique les difficultés des médecins exerçant dans des programmes spécifiques et qui enseignent aux résidents ou aux externes du GMF-U. Si cet enseignement se fait en dehors du GMF-U, dans le cadre d’un programme spécifique en CLSC (soins à domicile, itinérance ou toxicomanie, santé mentale ou planification familiale) par exemple, l’activité ne sera pas rémunérée selon le mode mixte du GMF-U, et le médecin ne pourra donc se prévaloir de l’acte d’intervention de supervision pour ces activités même s’il a une nomination dans le GMF-U.
Certains médecins détiennent une nomination de type « profil C » dans un GMF-U qui leur permet d’y exercer à temps partiel de façon complémentaire à leur pratique principale (ex. : en cabinet, en soins à domicile, en santé mentale). C’est seulement lorsque leurs activités d’enseignement se font dans le GMF-U, comme dans le cadre des formations organisées pour leurs résidents, que l’acte d’intervention de supervision est accessible pour ces activités.
À l’inverse, le médecin du GMF-U qui fait des visites à domicile ou qui assure le suivi de patients itinérants, par exemple, doit déterminer s’il effectue ce suivi dans le cadre de ses activités du GMF-U ou d’un programme du CLSC. Lorsqu’il accomplit de telles activités au sein du GMF-U, il a accès aux modalités de supervision, mais ne peut se prévaloir des modalités prévues en CLSC pour ce genre d’activités.
On s’attend que le médecin qui fait le suivi à domicile de sa clientèle inscrite et suivie au GMF-U facture ses services selon le mode mixte du GMF-U. Les codes de visite sont alors ceux qui s’appliquent dans tout milieu, et non ceux du mode mixte pour le soutien à domicile en CLSC. À l’inverse, un médecin qui a une pratique dans un CLSC voisin auprès d’une clientèle importante ayant des troubles de santé mentale devra être conscient qu’il ne pourra se prévaloir de l’acte d’intervention de supervision pour ses activités au CLSC dans le cadre du programme de santé mentale ni des modalités prévues pour les troubles de santé mentale en CLSC pour d’éventuelles activités dans ce domaine au GMF-U.
Le mode mixte en GMF-U est le seul qui donne accès à une rémunération bonifiée sur base de temps pour l’enseignement et la supervision (acte d’intervention de supervision). Les autres modes mixtes accordent des bonifications sur les activités cliniques, mais la supervision et l’enseignement sont rémunérés à un taux inférieur. |
Les différents modes mixtes ont été conçus en silo. Le mode mixte en GMF-U a ainsi des modalités particulières, mais n’intègre aucune adaptation des programmes offerts en CLSC. Bien qu’il puisse être avantageux pour les résidents d’être exposés à ce genre de pratiques, ces programmes ne font pas partie de la vocation des GMF-U. C’est donc dire que le médecin doit exercer dans le GMF-U (et être alors rétribué selon les modalités spécifiques) ou hors GMF-U dans le programme en question (et alors bénéficier des modalités prévues pour ce programme à l’exclusion de celles qui s’appliquent en GMF-U).
Le lieu d’inscription de la clientèle devrait d’ailleurs être cohérent avec les modalités que le médecin a choisies. Si l’ensemble de la clientèle d’un médecin est inscrite en GMF-U, on s’attendrait à ce qu’il demande à être rémunéré selon les modalités applicables en GMF-U, et non en CLSC. Il serait curieux que le médecin se prévalant des modalités prévues en CLSC pour les troubles de santé mentale pour ses activités auprès de cette clientèle indique à la RAMQ que le lieu de suivi de cette même clientèle est le GMF-U.
En raison des critères de financement des GMF, il peut être tentant de chercher à maximiser le nombre d’inscriptions en GMF. Mais encore faut-il respecter le cadre de l’Entente.
L’autre situation qui a posé problème dans quelques GMF-U en milieu hospitalier est la rémunération des médecins pour des activités à l’extérieur du GMF-U (ex. : en toxicomanie ou en itinérance). Lorsque de telles activités se font dans le GMF-U avec les ressources de ce dernier, elles font alors partie des activités de ce GMF-U, même si le programme des GMF-U ne prévoit pas de telles activités.
Pour différentes raisons, un milieu hospitalier peut préférer offrir ces services en consultation externe, mais hors du GMF-U, ou dans un CLSC voisin qui aurait un tel programme. L’intégration dans le CLSC peut présenter certains problèmes, notamment en ce qui a trait aux exigences d’un tel milieu pour la participation à d’autres programmes et aux gardes en disponibilité associées. Cependant, le service serait alors rétribué selon des modalités adaptées, soit à tarif horaire avec une bonification. La pratique dans un service de consultation externe offre l’avantage de limiter l’ajout d’exigences liées à la pratique. Toutefois, il ne donne pas accès à une rémunération à tarif horaire ni à des modalités adaptées ou incitatives. Pour le service de consultation externe, la seule voie conforme, autre que simplement la facturation à l’acte selon les tarifs prévus dans ce service, serait de demander au comité paritaire sur les programmes spécifiques de désigner le milieu et le programme. Une banque annuelle d’heures à tarif horaire « standard » (sans modalités additionnelles spécifiques à cette clientèle) serait alors accordée si la demande est agréée.
Les différents modes mixtes ont été conçus en silo. Le mode mixte en GMF-U a des modalités particulières, mais n’intègre aucune des adaptations existant en CLSC pour certains programmes qui y sont offerts. |
L’accès aux modalités de rémunération des activités de supervision hors d’un GMF-U fait l’objet de discussions avec le ministère menées par le Dr Claude Guimond, directeur de la Formation professionnelle à la FMOQ. La situation pourrait donc changer, mais pas nécessairement dans l’immédiat.
J’espère que vous vous retrouvez mieux maintenant dans l’intersection entre la pratique en GMF-U et les différents modes mixtes pouvant s’appliquer en CLSC. D’ici la prochaine chronique, bonne facturation ! //