Le Régime d’accession à la propriété, communément appelé le RAP, a vu le jour en 1992. Conçu initialement comme mesure temporaire afin de stimuler l’économie, ce programme est devenu permanent à partir de 1994.
Le RAP permet de retirer, sans incidences fiscales, jusqu’à 35 000 $ de son REER (donc 70 000 $ pour un couple) afin d’acquérir une propriété. Ce montant devra par la suite être remboursé au REER sur une période maximale de 15 ans, sans intérêts, à compter de la deuxième année suivant le retrait. En se prévalant du RAP, on effectue essentiellement une mise de fonds initiale sur une résidence avec les sommes n’ayant pas encore été imposées. Notons en passant que les remboursements subséquents effectués dans le cadre du RAP ne feront pas l’objet d’une déduction fiscale ; ces sommes ayant déjà été déduites au moment de la cotisation originale.
Pour être admissible au programme, il faut répondre à certains critères. Une fois qualifié, l’acquéreur n’a aucune obligation d’utiliser les sommes retirées pour acheter une résidence, cet argent peut servir à d’autres fins. Bref, on ne vérifie pas où va l’argent à la suite du retrait.
Si le remboursement minimal dû annuellement n’est pas effectué, son montant sera inclus dans le revenu de l’acquéreur de cette année-là, comme s’il s’agissait d’un retrait du REER.
À l’origine, le retrait maximal permis dans le cadre du RAP s’élevait à 20 000 $ par personne. Le budget fédéral de 2009 l’a fait passer à 25 000 $. Afin de tenir compte de l’évolution des prix de l’immobilier, le maximum admissible au programme a été fixé à 35 000 $ en 2019. Bien que cette dernière majoration représente 40 % par rapport à la limite antérieure, cet ajustement, réparti sur les dix années précédentes, ne constitue toutefois qu’une augmentation annuelle composée de 3,4 %.
Initialement, il n’était possible de se prévaloir qu’une seule fois du RAP. Depuis 1999, aucune restriction ne s’applique en ce sens dans la mesure où les conditions d’admissibilité sont respectées.
Pour se qualifier au RAP, un particulier doit acheter (ou faire construire) une « habitation admissible » pour lui-même ou pour une personne handicapée avec laquelle il est lié. Il s’agit essentiellement d’un logement, existant ou en construction, situé au Canada, ce qui inclut les maisons unifamiliales, jumelées, en rangée, mobiles, les condominiums, ainsi que les appartements dans un multiplex ou un immeuble d’habitation.
Le particulier doit prévoir occuper cette habitation admissible comme son lieu principal de résidence l’année suivant l’achat (ou la construction). Aussi, l’acquéreur, ou son conjoint, ne doit pas avoir été propriétaire d’une habitation qui constituait son (ou leur) lieu de résidence au cours des quatre années précédentes.
Enfin, les plus récentes cotisations versées au REER doivent demeurer au compte pour au moins 90 jours avant leur retrait pour participer au RAP. Autrement, ces cotisations pourraient s’avérer non déductibles d’impôts pour aucune année.
Comment s’y prendre pour effectuer un RAP ? Supposons qu’un couple de jeunes médecins souhaite acquérir leur première maison. Ils n’ont pas encore de REER, mais possèdent tous deux des droits de cotisation supérieurs à 35 000 $. Ils ouvrent donc un REER et y déposent 35 000 $ chacun. Puisque le taux d’imposition marginal des deux conjoints s’élève à 50 % environ, cette cotisation donnera droit à un remboursement d’impôts d’à peu près 17 500 $ par personne. Après une période minimale de 90 jours, les conjoints peuvent retirer l’argent de leurs REER respectifs dans le cadre du RAP, donc sans payer d’impôts sur le retrait.
Ainsi, grâce au RAP, chacun des conjoints disposera d’une mise de fonds de 52 500 $ (17 500 $ + 35 000 $) pour un total de 105 000 $ pour le couple. À elle seule, la stratégie RAP aura donc généré 35 000 $ (sans compter un rendement potentiel). Le couple aura toutefois à rembourser le montant du RAP (35 000 $ chacun) sur une période maximale de 15 ans, à compter de la deuxième année suivant le retrait.
Les règles relatives à la détention antérieure de résidence ont été assouplies en cas de séparation. Depuis 2019, il est possible pour un particulier d’être admissible au RAP s’il vit séparément de son conjoint (marié ou conjoint de fait) pour une durée d’au moins 90 jours en raison de l’échec de leur mariage ou de leur union de fait. Plus précisément, le particulier aura le droit d’effectuer un nouveau retrait RAP s’il vit séparément de son conjoint au moment du retrait et s’il a commencé à vivre séparément de cette personne dans l’année où le retrait est fait ou au cours d’une des quatre années précédentes. On notera toutefois que dans le cas où le principal lieu de résidence du particulier est une habitation détenue et occupée par un nouveau conjoint (marié ou conjoint de fait), il ne pourra profiter du RAP en vertu de ces règles.
Le particulier devra habituellement disposer de sa résidence antérieure au plus tard deux ans après la fin de l’année où le retrait RAP aura été effectué.
En règle générale, si le participant au RAP décède avant d’avoir complété le remboursement complet à son REER, le solde résiduel du RAP du défunt doit être inclus, aux fins d’impôts, dans son revenu pour l’année du décès. Essentiellement, le défunt s’impose sur ce solde comme s’il s’agissant d’un retrait REER. Le montant à inclure dans le revenu du défunt pour l’année de son décès est égal au solde du RAP au moment du décès, moins toutes les cotisations versées au REER avant le décès, désignées comme remboursement dans le cadre du RAP pour l’année du décès.
Si le participant avait, au moment de son décès, un conjoint (marié ou conjoint de fait) qui résidait au Canada, ce dernier pourrait choisir, avec le représentant légal du défunt, de continuer à effectuer les remboursements dans le cadre du RAP à la place du défunt. La règle d’inclusion du revenu ne s’appliquerait donc pas au défunt. Le solde du RAP du défunt est alors considéré comme un montant retiré dans le cadre du RAP par le conjoint survivant, et devra être remboursé au REER de ce conjoint.
Notons également qu’il n’y a aucune conséquence fiscale négative pour le conjoint survivant, si, en raison de sa décision de rembourser le solde du RAP du défunt, son nouveau solde du RAP (combiné) dépasse 35 000 $.
Pour faire le choix de rembourser le solde du défunt, le conjoint survivant et le représentant légal du défunt devront joindre une lettre signée à la déclaration de revenus finale du participant décédé. Cette lettre devra indiquer que le conjoint survivant a choisi d’assumer le remboursement des sommes dans le cadre du RAP, et que la règle d’inclusion du revenu ne doit pas s’appliquer au défunt.
Notons que cette option s’offre uniquement au conjoint survivant. En l’absence de conjoint, personne d’autre ne peut décider de continuer à rembourser le RAP du défunt.
Il est tout à fait possible d’utiliser un REER conjoint dans le cadre du RAP. Ainsi, les règles d’attribution qui s’appliquent normalement en cas de retrait hâtif d’un REER conjoint (normalement, pour tout retrait effectué avant deux années civiles complètes suivant la cotisation conjointe) sont suspendues. Autrement dit, il est possible de cotiser au REER de son conjoint et ce dernier pourra, sans aucune conséquence fiscale, retirer ces sommes dans le cadre du RAP 90 jours plus tard.
Aussi, rien n’oblige le particulier qui a effectué un retrait RAP à partir d’un REER conjoint à faire ses remboursements subséquents dans un REER conjoint ; il peut choisir de les verser dans son REER personnel.
Il est aussi permis d’effectuer un retrait RAP à partir d’un REER détenu en Fonds de travailleurs (Fonds de solidarité ou Fondaction). Il était auparavant obligatoire d’avoir utilisé la totalité de ses autres REER avant de pouvoir toucher les sommes investies dans ce type de fonds. Cette obligation n’existe plus. Toutefois, les montants retirés devront, par la suite, être remboursés dans ces mêmes Fonds de travailleurs.
Le RAP est un programme en constante évolution. Son utilisation demeure encadrée, mais s’avère souvent profitable. //
Note de la rédaction. Ce texte a été écrit, révisé et mis en pages par Conseil et Investissement Fonds FMOQ inc. et ses mandataires. Il n’engage que ses auteurs.