comment procéder et bien comprendre les répercussions au préalable
Vous en avez assez du système public et de ses multiples contraintes ? C’est possible de devenir non-participant. Toutefois, ce statut impose aussi son lot de contraintes. Et selon la nature de votre pratique, certaines obligations liées à vos activités antérieures peuvent vous suivre. Discutons-en !
Le Dr Michel Desrosiers, omnipraticien et avocat, est directeur des Affaires professionnelles à la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec. |
La Loi sur l’assurance maladie prévoit (articles 26, 28, 30 et 30.1) la possibilité de devenir non-participant, tandis que les articles 24, 26, 28 et 29 du Règlement d’application de la Loi sur l’assurance maladie précisent les modalités spécifiques pour devenir non-participant ou pour redevenir participant au régime public.
Essentiellement, il suffit de donner un avis écrit au Directeur général de la RAMQ par courrier recommandé et d’attendre le délai prévu (le 30e jour qui suit la mise à la poste de votre avis) pour devenir non-participant. À partir du 30e jour, vous n’êtes plus lié par l’entente entre la FMOQ et le ministère, du moins hors des situations d’urgence ou des exceptions (qui permettent au ministre de rendre les non-participants sujets à la tarification de la RAMQ ou de fixer des tarifs maximaux pour certains services).
Notez que le délai de trente jours est prévu pour permettre au ministre de juger si le retrait du médecin du système public aura des répercussions sur la capacité du système public d’offrir les services requis dans une discipline ou dans une région. Le cas échéant, le ministre peut suspendre la possibilité de devenir non-participant, suspension qui peut commencer jusqu’à 30 jours avant la date du décret et qui pourra durer au plus deux ans (art. 30.1 de la Loi sur l’assurance maladie). La suspension peut être renouvelée pour de nouvelles périodes de deux ans. Elle peut viser l’ensemble du Québec ou certaines régions, ainsi que des secteurs d’activité spécifiques.
Le ministre peut aussi décréter par règlement que les médecins devenus ou qui deviendront non participants à une date donnée sont tenus de réclamer les tarifs fixés à l’Entente pour les services assurés (art. 30 de la Loi sur l’assurance maladie). L’effet d’un tel règlement est d’au plus 90 jours à partir de son entrée en vigueur. Toutefois, comme la date peut être rétroactive à l’entrée en vigueur du règlement, la durée peut être plus longue.
Le médecin non participant de longue date est probablement à l’abri de ces contraintes, mais celui qui quitte et réintègre régulièrement le système est plus exposé. Les deux ne sont pas à l’abri d’un autre pouvoir du ministre, soit celui de fixer un tarif maximal pour les services rendus par les médecins non participants (art. 22.0.0.0.2 de la Loi sur l’assurance maladie). Ce pouvoir existe depuis 2015, mais n’a pour l’instant jamais été exercé.
Depuis le début du régime d’assurance maladie, les moyens visant à contrôler le nombre de médecins non participants n’ont jamais été appliqués, mais ça ne veut pas dire qu’ils ne le seront jamais. L’un de ces moyens a d’ailleurs été appliqué à l’égard des dentistes qui ont utilisé le désengagement massif comme moyen de pression lors de la négociation du renouvellement de leur entente.
Par ailleurs, à partir du moment où un médecin devient non-participant, il doit remettre un avis écrit, signé de sa main, à chaque patient l’informant qu’il doit désormais assumer la totalité des coûts de consultation sans pouvoir obtenir de remboursement partiel ou total de la RAMQ (encadré 2).
Par la suite, le médecin pourra devenir ou redevenir participant au régime en respectant certaines formalités : un nouvel avis écrit au directeur général de la RAMQ transmis par courrier recommandé et qui prend effet la 8e journée de la mise à la poste de l’avis. Ces délais imposent certaines contraintes (encadré 3).
Mais ce n’est pas tout. Le fait de devenir non-participant a d’autres répercussions, tant du fait de l’Entente que du Code de déontologie des médecins.
Le fait de devenir non-participant annule l’avis de conformité au PREM d’un médecin et l’ensemble de ses inscriptions de patients. Nous reviendrons sur les effets de l’annulation des inscriptions. Le médecin non participant qui voudrait subséquemment redevenir participant devra alors obtenir un nouvel avis de conformité au PREM et adhérer à l’Entente particulière sur les AMP, faute de quoi il s’expose à une réduction de sa rémunération par rapport à ce que prévoit l’Entente. Le médecin qui devient non-participant met aussi fin à son engagement concernant les AMP.
Aux fins du PREM, le médecin qui n’a pas encore effectué au moins 200 jours de pratique au Québec dans le cadre du régime public demeure un nouveau facturant. Bref, le fait de devenir non-participant ne permet pas à un nouveau médecin de se prévaloir des modalités de la mobilité interrégionale au moment de sa réintégration au régime après quelques mois de pratique comme non-participant. Toutefois, tant qu’il est non-participant, il peut pratiquer dans la région de son choix hors des contraintes des PREM jusqu’à ce qu’il postule de nouveau un an plus tard. Néanmoins, rien ne garantit qu’il obtiendra l’avis de conformité convoité lors d’une deuxième tentative.
Le médecin qui compte au moins vingt ans de pratique (qui en est donc à sa 21e année ou plus depuis l’obtention de son permis) peut obtenir un avis de conformité dans une région, sans égard au nombre de places offertes. Par conséquent, le médecin non participant depuis vingt ans qui n’a pas effectué au moins 200 jours de pratique dans le régime public en début de carrière peut présentement contourner les règles des PREM s’il désire réintégrer le système public.
Pour les AMP, les règles sont plus restrictives quand le médecin réintègre le système public. En effet, depuis le 1er septembre 2003, seules les années de pratique actives sont comptabilisées dans l’atteinte des quinze années de pratique. En outre, au cours de chacune de ces années, le médecin doit avoir obtenu une rémunération mensuelle minimale de 4000 $ dans le système public.
Il faut être participant pour avoir droit aux différents avantages de l’Entente. C’est donc dire que les allocations de formation qui n’ont pas été utilisées durant l’année ou les frais de formation continue et les frais de séjour (perfectionnement) en banque seront perdus si le médecin devient non-participant. En ce qui a trait aux jours de vacances restants du médecin à honoraires fixes, leur valeur sera versée dans les semaines suivant le changement de statut. Et il va sans dire que la médecin non participante ne pourra pas non plus compter sur les allocations de maternité de l’Annexe XVI. La médecin qui réintègre le système public dans la perspective de toucher ces allocations devra le faire avant de devenir enceinte pour maximiser ses allocations qui sont calculées en fonction de la rémunération dans le système public.
En territoire désigné, les majorations de rétention sont fonction du nombre d’années accumulées dans le cadre de la pratique principale continue. Ce cumul n’est pas remis à zéro quand un médecin devient non-participant, mais plutôt après deux ans (ou un total de deux ans comme non-participant et comme participant quand le médecin ne respecte pas les conditions de la pratique principale en région). Lors du retour du médecin comme participant au régime, ce dernier devra reconstituer le nombre d’années nécessaires pour pouvoir de nouveau compter sur les majorations de rétention.
Le médecin non participant n’est pas régi par les différentes obligations de la Loi sur l’assurance maladie : affichage des tarifs, avis du recours à la RAMQ sur l’affiche et sur les reçus, production de reçus détaillés. Néanmoins, le Code de déontologie des médecins prévoit des obligations comparables : afficher les tarifs dans le lieu de pratique, informer le patient des frais avant d’effectuer le service et, à des fins de contrôle, produire des factures écrites.
Le médecin participant ne peut facturer ses activités à ses patients, à moins qu’il s’agisse de services non assurés. Cette interdiction vise aussi les fournitures et les médicaments que le médecin administre. Le non-participant peut facturer de tels honoraires ou frais pour des fournitures ou produits, mais le Code de déontologie prévoit des limites. Comme ces restrictions s’établissent différemment selon qu’il s’agit d’honoraires, de fournitures et de médicaments, la facture remise au patient devrait préciser ces différents éléments (ou indiquer des montants distincts pour chacun sur la même facture ou le même reçu).
En ce qui a trait aux honoraires, le Code de déontologie précise que le médecin doit réclamer des honoraires raisonnables, eu égard à la nature du service et du contexte dans lequel il est rendu. Pour leur part, les frais pour les fournitures ne doivent pas être disproportionnés. En ce qui a trait aux médicaments, le médecin ne peut pas faire de profit sur les médicaments qu’il administre.
L’autre contrainte du médecin qui a été en pratique avant de devenir non-participant est l’obligation du suivi de la clientèle. Nous avons vu que le fait de devenir non-participant met fin aux inscriptions du médecin. Certains pourraient en conclure qu’ils sont alors libérés de leurs obligations envers ces « anciens » patients.
Ce n’est pas le cas. Le Collège tient le médecin responsable du suivi de ses patients. Si ces derniers n’ont pas les moyens de payer ses nouveaux honoraires comme non-participant durant la période de transition, le médecin pourrait être tenu d’offrir le suivi requis gratuitement, du moins pour certains groupes de patients, jusqu’à ce qu’un autre médecin assure effectivement le suivi du patient.
De plus, le Collège est d’avis que le patient qui préfère être suivi par un médecin participant et qui demande donc à son ancien médecin, nouvellement non-participant, de transmettre une copie de son dossier à son nouveau médecin ne devrait pas se voir réclamer des frais pour ce service (ni pour les copies ni pour leur transmission).
Le Collège des médecins a produit un résumé des obligations déontologiques du médecin qui change de statut au sein de la RAMQ. Vous pouvez le consulter ici : https://bit.ly/obligations-changement-statut-RAMQ.
Devenir non-participant n’est donc pas un moyen de réduire sa clientèle. La clientèle du médecin pourra diminuer à moyen terme, mais dans l’immédiat, le médecin a des obligations envers sa clientèle actuelle qui peuvent reporter la diminution de ses responsabilités.
Le fait de devenir non-participant annule l’avis de conformité au PREM d’un médecin ainsi que l’ensemble de ses inscriptions de patients, de sorte que le médecin qui voudrait par la suite réintégrer le système devra obtenir un nouvel avis de conformité. |
N’oubliez pas que les autres obligations du Collège qui incombent au médecin participant continuent de s’appliquer au médecin non participant. Tous les médecins doivent donc avoir un contrat écrit pour la location des locaux professionnels où ils exercent qui doit comporter certains éléments spécifiques. De plus, les obligations liées à la formation professionnelle continue, à l’assurance responsabilité professionnelle ou au statut de membre de l’ACPM s’appliquent à tous, sans égard au statut.
La Fédération n’accorde pas de remboursement de cotisation aux médecins qui deviennent non-participants en cours d’année. Toutefois, par la suite, comme ces médecins ne sont pas rémunérés par la RAMQ, ils cessent de cotiser à la Fédération, à moins d’acquitter leur cotisation sur une base volontaire. En cessant d’être membres, ces médecins ne recevront plus Le Médecin du Québec et n’auront plus droit au tarif réduit pour les congrès et les autres activités de formation organisées par la Fédération. À cette fin, ils sont traités comme des non-membres (à moins qu’ils s’acquittent de la cotisation annuelle).
Ça vous éclaire ? C’est toujours bon de bien comprendre ses options. Nous traiterons bientôt de l’exercice en centre médical spécialisé. À la prochaine ! //