Dans le feu roulant des activités quotidiennes qu’entraîne l’exploitation d’une clinique médicale, tous conviendront qu’une des clés du succès réside dans du personnel de soutien fiable et motivé. Un environnement de travail sain et productif suppose cependant une bonne gestion des ressources humaines et le respect des normes minimales de travail. Connaissez-vous ces normes ?
Me Pierre Belzile, avocat, est directeur du Service juridique de la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec. |
La Loi sur les normes du travail s’applique dans les cliniques médicales québécoises, qu’elles soient reconnues comme GMF ou non.
La loi vise essentiellement à protéger les travailleurs salariés d’une entreprise. Elle édicte qu’un salarié est une « personne qui travaille pour un employeur et qui a droit à un salaire ». Ainsi, prévoit-elle des conditions minimales de travail.
Il convient ici de signaler que le personnel que prêtent les CISSS et les CIUSSS aux GMF dans le cadre du programme gouvernemental n’est pas visé par la présente chronique. En effet, ces personnes (infirmières, travailleurs sociaux, etc.) sont payées par les établissements et restent leurs employés, même lorsqu’ils sont déployés en GMF.
Les conditions de travail établies par la loi sont les règles minimales que doivent respecter tous les employeurs en matière de salaire, de semaine de travail, de congés et de cessation de travail.
Bien entendu, rien n’empêche une entreprise, comme une clinique médicale, d’offrir à ses salariés des conditions plus intéressantes que les normes minimales prévues par la loi. Par contre, une clinique médicale ne peut, sous peine de sanctions, établir des normes de travail inférieures à celles que prévoit la loi.
Sans traiter à fond de tous les sujets qu’englobe la loi, voyons-en succinctement quelques-uns.
Hormis quelques exceptions prévues par la loi, tous les salariés ont droit au salaire minimum fixé par le gouvernement. Normalement, une clinique médicale devrait verser le salaire à ses employés à des intervalles réguliers ne dépassant pas deux semaines.
Au Québec, la semaine normale de travail établie par la Loi sur les normes du travail est en principe de 40 heures.
Au-delà de la période de 40 heures, les heures supplémentaires sont payables à taux et demi. Cela signifie une augmentation de 50 % du taux horaire habituel. Encore ici, certaines exceptions peuvent s’appliquer.
En vertu de la loi, à l’exception des pauses repas, un employeur n’est pas obligé d’offrir des pauses à ses employés pendant une journée de travail. Cependant, s’il le fait, il doit les payer et les inclure dans le calcul des heures travaillées.
Les vacances se calculent en fonction d’une année de référence et du nombre d’années de service continu.
Un employé ayant moins d’un an de service continu a droit à un jour ouvrable par mois de service, jusqu’à un maximum de deux semaines de vacances. Si le salarié a plus d’un an, mais moins de trois ans de service continu, il aura alors droit à deux semaines de vacances payées. Il pourra bénéficier de trois semaines de vacances payées après trois ans de service.
Les employés d’une clinique médicale ont droit au Québec à huit journées fériées payées.
1. Le 1er janvier
2. Le Vendredi saint ou le lundi de Pâques
3. La Journée nationale des patriotes
4. La fête nationale du Québec
5. La fête du Canada
6. La fête du Travail
7. L’Action de grâce
8. Le 25 décembre (Noël)
Un employeur peut demander à ses salariés de travailler pendant une journée fériée. Il est cependant dans l’obligation de leur verser une compensation qui peut prendre la forme d’une indemnité pécuniaire ou d’une journée de congé de remplacement.
Plusieurs dispositions légales s’appliquent en matière d’accident ou de maladie. Pour l’essentiel, retenons que dans le cas où une absence n’a pas pour cause le travail en soi, mais bien une cause externe, les deux premières journées d’absence de l’employé seront payées par l’employeur. Aucune sanction ne devrait en principe être appliquée à l’endroit de l’employé. L’employé a toutefois l’obligation de prévenir son employeur le plus tôt possible. En cas d’accident de travail ou de maladies professionnelles, la situation est différente. La CNESST devra alors être avisée.
De nombreuses situations permettent à un employé de s’absenter de son travail pour des raisons familiales. Nous invitons nos lecteurs à en prendre connaissance sur le site Internet de la CNESST.
Parmi ces situations, signalons l’adoption et la naissance d’un enfant, les obligations liées à la garde, à la santé ou à l’éducation de son enfant, de l’enfant de son conjoint ou d’une personne à titre de proche aidant, le mariage ou l’union civile, le décès d’un proche.
Selon la Loi sur les normes du travail, tous les salariés ont droit à un milieu de travail exempt de harcèlement psychologique ou sexuel. Il revient donc aux employeurs de prendre les moyens raisonnables pour prévenir le harcèlement et y mettre fin lorsqu’ils en sont informés.
Tous les employeurs, ce qui inclut les cliniques médicales, doivent adopter une politique de prévention et de traitement des plaintes en matière de harcèlement et la rendre disponible aux membres de leur personnel. Cette politique doit couvrir les conduites à caractère sexuel. La loi impose donc d’importantes obligations aux employeurs.
Lorsqu’il est question de fin d’emploi, le licenciement, la mise à pied, le congédiement et la démission font l’objet de traitements distincts.
Le licenciement intervient lorsqu’un employeur met fin de façon définitive au contrat de travail de son employé quand il n’a plus besoin de lui pour des raisons économiques, organisationnelles ou techniques, par exemple à la suite d’innovations technologiques. Un licenciement peut aussi être collectif.
La mise à pied, quant à elle, suspend temporairement le contrat de travail entre l’employeur et son employé pour des raisons économiques, organisationnelles ou techniques. La personne peut être rappelée au travail. Contrairement au licenciement, le lien d’emploi est donc maintenu durant la mise à pied.
Quant au congédiement, il survient lorsqu’un employeur met fin à l’emploi de son employé de façon définitive pour des raisons disciplinaires ou liées à sa capacité d’exécuter ses tâches. Lorsqu’il congédie un employé, l’employeur doit lui remettre toutes les sommes qui lui sont dues, comme le salaire, les montants liés aux heures supplémentaires et l’indemnité de vacances.
Dans tous les cas mentionnés ici, l’employeur doit remettre aux employés qu’il licencie, qu’il met à pied pour une période de plus de six mois ou qu’il congédie, un avis de cessation d’emploi conforme aux critères de la loi.
Enfin, la démission survient lorsqu’un travailleur décide de quitter son emploi de façon définitive. Dans un tel cas, l’employeur doit remettre au salarié toutes les sommes qui lui sont dues, comme le salaire, les montants liés aux heures supplémentaires et l’indemnité de vacances. Aux fins de l’assurance emploi, il doit aussi produire un relevé d’emploi qui attestera, entre autres, du nombre d’heures assurables faites par son employé.
Comme on peut le voir, plusieurs obligations légales incombent aux cliniques médicales en leur qualité d’employeurs. L’objectif de cette chronique n’est pas d’expliquer en détail la Loi sur les normes du travail, mais plutôt de sensibiliser les médecins à l’importance de respecter leurs obligations en matière de normes du travail.
Les médecins qui exploitent des cliniques médicales et qui veulent obtenir de plus amples informations sur tous les sujets abordés sont donc invités à consulter le site Internet de la CNESST ou des conseillers juridiques spécialisés afin de bien maîtriser les normes minimales s’appliquant au travail de leurs employés. C’est une question de saine gestion ! //