le médecin de famille de l’année au Québec : le Dr Gilles Brousseau
Le Prix du médecin de famille de l’année, décerné par le Collège québécois des médecins de famille, a été remis au Dr Gilles Brousseau, doyen associé et directeur du Campus Outaouais de la Faculté de médecine de l’Université McGill.
Ce prix couronne une carrière de près de quarante ans consacrée aux soins aux patients, à l’enseignement et à d’importants projets universitaires. La plus grande réalisation du lauréat ? La création du Campus Outaouais. « Notre particularité est d’offrir, en français et avec les ressources locales, le programme de médecine mondialement reconnu de l’Université McGill. J’ai travaillé une douzaine d’années sur ce projet. Le campus a finalement été ouvert en août 2020 », explique le Dr Brousseau.
Le nouveau centre universitaire, construit au-dessus de l’urgence de l’Hôpital de Gatineau, dispose de deux étages et accueille soixante étudiants. Vingt autres effectuent parallèlement l’année préparatoire en médecine offerte par l’Université McGill conjointement avec l’Université du Québec en Outaouais. Quand le programme aura atteint sa vitesse de croisière, il comptera 116 étudiants.
Le campus reçoit également des résidents. En médecine familiale, le GMF-U occupe un étage complet. Doté de 62 salles d’examen et de six de supervision, il compte actuellement près d’une trentaine de résidents. Dans les six spécialités de base, près d’une centaine de résidents se succèdent au cours de l’année dans les différents milieux cliniques.
« Mon objectif était de pouvoir former de futurs médecins comme moi-même j’aurais aimé l’être pendant mes années de médecine. Quand je visitais les campus de Chicoutimi et de Trois-Rivières, avant de commencer le projet, c’est cette pensée qui m’inspirait, explique le Dr Brousseau. Je voulais que nos étudiants qui sortent des cégeps voient la réalité de la médecine. Comme la majorité de la population du Québec ne vit ni à Montréal ni à Québec, cette dernière se pratique beaucoup dans les milieux en région. Dans les petits centres, on voit donc aussi les besoins des patients. »
En 1983, quand il commence à pratiquer la médecine familiale à Gatineau, le Dr Brousseau ne pense pas à une carrière administrative ou universitaire. Il est accaparé par toutes les facettes de la médecine générale. Il exerce à l’urgence, en obstétrique, dans les unités de soins, aux soins intensifs et fait de l’assistance opératoire. Il fonde également une clinique avec des collègues et suit des patients.
Qu’est-ce pour lui qu’un bon médecin de famille ? « C’est celui qui a de l’empathie, de l’écoute et est capable d’accompagner son patient. Il va l’aider à prendre des décisions. Il va également s’assurer de la pertinence des examens qu’il demande », répond le Dr Brousseau. La beauté de la médecine familiale, estime-t-il, c’est de pouvoir soigner des patients de tous les âges, de la naissance jusqu’au grand âge. « C’est donc une pratique très variée. Comme médecin de famille, on doit avoir la capacité de traiter plusieurs problèmes cliniques, parfois complexes, mais en ayant une vision globale de la personne, au lieu de ne regarder que la maladie, l’état ou la situation urgente. »
Les patients ont beaucoup enseigné au médecin. « J’ai appris que c’est eux qui nous amènent vers ce qu’ils considèrent comme important et ce qu’ils aimeraient avoir comme soins ou comme approche. J’ai aussi appris à responsabiliser le patient dans le domaine de la prévention. Je recourais à l’entrevue motivationnelle pour l’aider à modifier ses habitudes de vie. Il faut donc être très près des besoins de la personne. C’est ce qu’on essaie d’enseigner à nos étudiants dans les apprentissages en petits groupes, les simulations ou les discussions de cas. »
Au fil des ans, le Dr Brousseau a commencé non seulement à enseigner, mais aussi à accepter d’importantes responsabilités administratives. En 1990, il devient professeur adjoint à l’Université McGill et directeur de l’unité de médecine familiale de Gatineau qu’il a créée deux ans plus tôt avec une collègue. « J’ai essayé de m’engager le plus possible pour améliorer l’offre de service et le développement de la mission universitaire dans la région. » L’objectif du médecin reste le même : rendre service, être utile.
En 2008, le Dr Brousseau est nommé vice-doyen adjoint à l’enseignement de la médecine de la région de l’Outaouais. Il doit remplir d’importants mandats pour l’Université McGill. En 2010, il dépose ainsi un rapport sur la faisabilité d’un campus délocalisé dans sa région et met sur pied un programme d’externat intégré à Gatineau. Il augmente également la capacité d’accueil dans les milieux cliniques pour les stages des résidents en médecine familiale et en spécialité.
Avec les responsabilités qui s’accumulent, le Dr Brousseau doit réduire sa pratique entre autres pour mettre sur pied le projet de Campus Outaouais. Quand il l’annonce à ses patients, ces derniers lui demandent de former des cliniciens ayant ses qualités. « Ils voulaient des médecins capables d’empathie et d’écoute. Parfois, les gens se sentent un peu bousculés dans le réseau de la santé et ont de la difficulté à faire valoir leur point de vue. Au fil des années, les patients m’ont appris à avoir une certaine humilité et à m’adapter à leurs valeurs, à leurs convictions et à leurs croyances. » Le Campus Outaouais recourt d’ailleurs à des patients partenaires pour aider les futurs médecins à bien comprendre le point de vue de ceux qu’ils vont soigner.
Le nouveau campus sera donc bénéfique non seulement pour les étudiants et les résidents, mais également pour les patients et toute la collectivité. « C’est un legs à la région qui devrait permettre d’attirer des médecins et de les garder. Si on y parvient, ce sera mission accomplie. » Déjà, plusieurs anciens résidents du programme de l’Outaouais pratiquent dans des GMF de la région ou enseignent sur le campus. //