des solutions dans les domaines musculosquelettique et de la santé mentale
L’Association des médecins omnipraticiens de Laurentides-Lanaudière (AMOLL) et sa présidente, la Dre Lyne Couture, tentent d’aider leurs membres grâce à des solutions novatrices fondées sur des études québécoises.
M.Q. — L’AMOLL désire mettre au point avec des chercheurs des solutions novatrices pour aider les médecins de famille. Où en êtes-vous ? |
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L.C. – Notre but est d'aider nos membres à être plus efficaces, tout en ayant moins de pression. Deux secteurs qui sont à l’origine de nombreuses consultations sont les troubles musculosquelettiques et la santé mentale. Ce sont donc les deux domaines auxquels nous consacrons nos efforts. |
M.Q. — Quelles solutions envisagez-vous pour les troubles musculosquelettiques ? |
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L.C. – L’étude de Mme Rose Gagnon et de M. Luc Hébert, des physiothérapeutes chercheurs de Québec, nous a beaucoup intéressés. Ils ont évalué les services que pouvait offrir un physiothérapeute à l’urgence du CHU de Québec–Université Laval aux patients souffrant de troubles musculosquelettiques, problème qui touche de 18 % à 25 % des personnes qui viennent consulter. Leur essai clinique à répartition aléatoire comprenait 78 patients, dont certains ont été pris en charge directement par un physiothérapeute et d’autres, par un médecin urgentologue. Les personnes traitées par le physiothérapeute ont attendu moins de deux heures avant d’être prises en charge, leur état s’est amélioré davantage que celui des patients vus par le médecin, et elles n’ont pas eu besoin d’une nouvelle consultation à l’urgence au cours du mois suivant, contrairement à 21 % des patients traités par le médecin. |
M.Q. — Désirez-vous mettre sur pied un tel projet dans votre région ? |
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L.C. – Pas vraiment, parce qu’une consultation à l’urgence avec un physiothérapeute ne présente pas un bon rapport coût-avantage. Le prix d’une simple inscription à l’urgence est d’environ 750 $. Cela n'a donc pas de bon sens. Il faut offrir des consultations dans un autre milieu. Les membres du conseil d’administration (CA) de l’AMOLL et moi avons discuté avec Mme Gagnon et M. Hébert. Nous leur avons demandé combien de temps il fallait pour évaluer un problème musculosquelettique à l’urgence. Ils nous ont répondu une vingtaine de minutes. Nous avons aussi parlé avec des physiothérapeutes du secteur privé. Nous en sommes venus à la conclusion qu’il serait intéressant de faire une étude dans laquelle les patients seraient dirigés vers une clinique de physiothérapie privée où leur seraient payées des séances de 30 minutes. Le rapport coût-avantage devrait alors être plus intéressant qu’une prise en charge à l’urgence. On a par ailleurs maintenant une belle porte d’entrée pour ce genre de service : le guichet d’accès à la première ligne. Il pourrait aussi être offert aux cliniques à haut débit et aux patients P4 et P5 réorientés par l’urgence. |
M.Q. — Quel serait le rôle de l’association dans ce projet ? |
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L.C. – Nous aimerions qu’une étude soit mise sur pied pour mesurer la qualité des soins et les coûts des consultations en physiothérapie. Comme je pense que ce n'est pas le rôle de l’AMOLL de le faire, j’ai proposé ce projet de recherche aux départements régionaux de médecine générale (DRMG) et aux CISSS de Laurentides et de Lanaudière. Ils étaient très intéressés. Les instances de Lanaudière ont même commencé des démarches. Les médecins de famille pourraient, par ailleurs, participer au projet comme partenaires. Si l’un des physiothérapeutes de l’étude détecte un problème non musculosquelettique, il pourrait leur envoyer le patient. Je me dis que si l’on arrive à décharger un peu nos membres de certaines tâches dans la situation actuelle où l’on manque de médecins et où on leur en demande toujours plus, ce sera bénéfique. |
M.Q. — Et dans le domaine de la santé mentale ? |
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L.C. – En santé mentale, on s’est intéressé aux travaux de la Dre Cynthia Cameron du GMF-U de Lévis. Elle et son équipe ont mis sur pied l’approche STAT-C qui vise à optimiser les arrêts de travail liés à des problèmes de santé mentale. Leur méthode, fondée sur une revue de littérature, a été conçue avec différents intervenants du réseau de la santé et des services sociaux, dont des psychiatres. Cette approche permet de procéder de manière méthodique pour déterminer quand donner un arrêt de travail à un patient, quand ne surtout pas le lui donner et comment l’aider à retourner le plus rapidement possible à la vie active. La prise en charge est faite en collaboration avec des travailleurs sociaux et des infirmières. Pour faire connaître cette méthode à nos membres, nous avons organisé à leur intention une formation gratuite avec la Dre Cameron le 16 septembre. Dans le domaine de la santé mentale, on va également collaborer avec nos deux CISSS pour améliorer la trajectoire de soins. Actuellement, c’est le parcours du combattant quand il faut obtenir un rendez-vous en psychiatrie pour un patient. |
M.Q. — Pour régler certains problèmes qui nuisent à la prise en charge des patients, vous êtes aussi passée par la voie politique. |
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L.C. – Des membres du CA de l’AMOLL et moi avons récemment rencontré douze des dix-sept députés de Laurentides–Lanaudière au sujet du projet de loi no 11. Nous en avons profité pour leur parler de certains dossiers. À Sainte-Anne-des-Plaines, qui est ma région, nous avions déjà obtenu, grâce à la députée, Mme Lucie Lecours, la réouverture en octobre 2021 du centre de prélèvements fermé depuis 18 mois. Nous nous étions alors dit que les élus pouvaient nous aider. Quand, dans le cadre de notre tournée contre le projet de loi, nous avons ensuite rencontré Mme Agnès Grondin, à Argenteuil, nous en avons profité pour aborder le problème des prises de sang et des tests de laboratoire dans sa circonscription. Elle a réussi à obtenir un véritable corridor de services. |
M.Q. — Avez-vous eu d’autres résultats ? |
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L.C. – Dans la circonscription de Mirabel, la députée, Mme Sylvie D’Amours, est intervenue notamment pour tenter d’améliorer la situation en ophtalmologie. Dans les Laurentides, Lanaudière et Laval, les patients ne peuvent pas avoir de consultations dans cette spécialité. C’est une catastrophe. La députée a donc transmis les chiffres et les documents que nous lui avions fournis au bureau du ministre de la Santé. Nous avons ensuite appris que le centre de répartition des demandes de service des Laurentides avait décidé d’accorder quelques places pour des cas urgents classés B. Mais malheureusement la situation ne s’est pas améliorée. On a donc ressollicité Mme D’Amours. |
M.Q. — Quelle était votre approche à l’égard des députés ? |
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L.C. – Leurs électeurs leur disent régulièrement qu’ils n’arrivent pas à voir un médecin. Les membres du CA et moi sommes donc allés rencontrer les députés avec des cliniciens de la région qui leur expliquaient les raisons pour lesquelles ils ont de la difficulté à voir plus de patients. Souvent, les élus nous demandaient : « Que peut-on faire pour améliorer la situation ? » On leur donnait alors des pistes de solution. Le député de la circonscription de Rousseau, M. Louis-Charles Thouin, nous a même demandé de lui rédiger un document. On en a donc produit un d’une trentaine de pages : Accès aux soins et valorisation de la pratique : problématiques et solutions. On y propose de nombreuses mesures qui vont de l’augmentation et de la simplification de l'informatisation, à l'éducation du patient en passant par l’accès aux tests de laboratoire. J’ai aussi envoyé ce document à la FMOQ, aux autres présidents d’association ainsi qu’aux responsables des DRMG et des CISSS. Bien des députés veulent donc en savoir davantage sur la situation en première ligne. |