En fin... la facturation

Taux d’assiduité et mesures de la lettre d’entente 368

conséquences possibles sur votre rémunération

Michel Desrosiers  |  2022-12-19

Le Dr Michel Desrosiers, omnipraticien et avocat, est directeur des Affaires professionnelles à la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec.

Bien des médecins se plaignent d’être soumis au taux d’assiduité et à ses effets pernicieux sur l’organisation de leur pratique. Plusieurs ont accueilli à bras ouverts l’exemption du taux d’assiduité associée à l’adhésion à au moins une mesure de la lettre d’entente 368. Assurez-vous de bien comprendre le contenu de cette lettre et le fonctionnement qui y est lié.

Le taux d’assiduité et son calcul

Le taux d’assiduité est un concept simple pour mesurer la proportion des services de première ligne donnés aux patients inscrits auprès de vous par vous ou par les autres médecins de votre groupe par rapport à l’ensemble des services fournis par des médecins de famille à ces patients. Dans son application dans le cadre d’un GMF, le calcul est ajusté pour tenir compte des services offerts par les médecins du GMF à l’ensemble des patients inscrits de ce GMF par rapport aux services donnés à ces patients par les médecins de famille.

Les modalités exactes de calcul sont décrites au paragraphe 15.06 de l’Entente particulière sur la prise en charge et le suivi. À la lecture, vous constaterez qu’il y a des adaptations spécifiques, ce qui explique pourquoi la description détaillée du calcul prend trois pages. Parmi ces adaptations, on compte l’inclusion des visites auprès d’une IPS dans le calcul (pour le numérateur, celles effectuées auprès d’une IPS qui exerce en partenariat au sein d’un groupe et dans le milieu ; pour le dénominateur, les visites auprès d’une IPS en cabinet ou en CLSC). Il y a aussi des exclusions pour certaines visites à l’urgence, selon le code de priorité du patient, s’il y était dirigé ou s’il s’agissait d’une visite de suivi.

L’entente prévoit également un rôle pour un comité paritaire en cas de problèmes d’application. Ce comité relève de la Direction de la planification et de la régionalisation, dont la directrice est la Dre Anne-Louise Boucher.

Taux individuel

Le taux d’assiduité joue un rôle important sur deux plans. Dans le cas du taux individuel, il permet de déterminer si un médecin est admissible au supplément pour le volume de patients inscrits, mesure décrite au paragraphe 15.01 de l’Entente particulière sur la prise en charge et le suivi. On ne parle pas ici du supplément associé au fait de compter 750 ou 1000 patients inscrits et actifs à son nom en fin d’année, mais bien d’un autre supplément qui dépend du nombre de patients inscrits actifs, calculé par patient selon différents paliers. Ce supplément est versé lorsque le taux d’assiduité du médecin est d’au moins 80 %. S’il est légèrement inférieur, mais tout de même supérieur à 75 %, le médecin reçoit 75 % du supplément. Entre 70 % et 74 %, il a droit à 50 %. Si son taux est inférieur, il ne reçoit rien.

Taux d’un GMF

Dans le cas du taux d’un GMF, c’est un des facteurs qui permet de déterminer si le GMF respecte ses engagements. Un GMF qui n’atteint pas son taux d’assiduité ne respecte pas ses engagements. Si c’est le seul reproche fait au GMF, il n’y a pas de conséquences pécuniaires la première année. Toutefois, si la situation persiste plus d’un an, le financement du GMF peut être ajusté à la baisse.

Exemption du taux d’assiduité et lettre d’entente 368

Plusieurs médecins, et surtout plusieurs GMF, considèrent que le taux d’assiduité est un incitatif à offrir des services uniquement à leur clientèle propre afin de réduire au minimum les risques d’être insuffisamment disponible pour cette dernière. En effet, l’accès offert à des patients non inscrits ou inscrits auprès d’autres médecins ou d’autres GMF peut diminuer l’offre à la clientèle du GMF. Cet incitatif va à contresens du but de favoriser l’accès des patients orphelins à un médecin. C’est pour cette raison que les médecins ou les groupes de médecins qui adhèrent à au moins une des mesures de la lettre d’entente 368 sur l’accès et qui respectent leur engagement sont exemptés du taux d’assiduité. Il faut toutefois connaître la façon dont cette exemption est appliquée.

Le taux d’assiduité est calculé sur une base annuelle, et la RAMQ va toujours la calculer de cette façon, qu’un médecin en soit exempté ou non. La raison en est simple : un médecin ou l’ensemble des médecins d’un GMF peuvent adhérer aux mesures de la lettre d’entente 368 seulement une partie de l’année. D’ailleurs, comme les modalités de la lettre d’entente 368 commencent en juin 2022, tous les médecins participants n’auront pas adhéré durant les deux premiers trimestres et seront donc soumis aux taux d’assiduité pour des trimestres avant le mois de juin 2022.

Pour le taux d’assiduité individuel (qui conditionne l’accès au supplément du paragraphe 15.06 pour le volume de patients inscrits), bien que le montant payable soit déterminé en fonction des patients inscrits en fin d’année, la RAMQ entend découper le supplément en quatre parties d’un quart du montant total pour chaque trimestre. Et elle validera le droit au paiement en fonction de l’adhésion à la lettre d’entente 368 et du respect de l’engagement du médecin durant chaque trimestre, ou selon le taux d’assiduité.

L’exonération pour un trimestre sera acquise dans la mesure où le médecin adhère pendant au moins une partie du trimestre et qu’il respecte son engagement ou, dans le cas d’un GMF, que l’ensemble des médecins aient adhéré. La RAMQ saura qu’un médecin a adhéré à la lettre d’entente 368 et qu’il respecte son engagement quand il aura réclamé au moins un forfait de la lettre d’entente 368 par le passé et qu’il réclamera au moins un forfait pour le trimestre en cause. Le respect de l’engagement pourra être vérifié subséquemment à la pièce par la RAMQ.

Si un médecin ou un groupe ne respecte pas son engage­ment, la RAMQ ne versera pas le supplément pour ce trimestre et ne regardera même pas le taux d’assiduité du ou des médecins. En raison des conséquences sur le taux d’assiduité de groupe du GMF, l’adhésion sans respect du niveau d’engagement peut donc avoir un effet qui dépasse la perte des forfaits de la lettre d’entente 368.

Notez bien que lorsque l’adhésion se fait en cours de trimestre, la règle est la même. Le fait de ne pas avoir adhéré pour l’ensemble du trimestre n’entraîne pas d’évaluation sur la base du taux d’assiduité. Il en est de même lorsqu’un médecin se retire de la mesure pendant le trimestre (la RAMQ entend limiter les retraits à la fin d’un trimestre). Il est donc important, lors de changements, de s’assurer de respecter l’engagement et de réclamer les forfaits en fin de trimestre. Dans le cas du médecin qui met fin à son adhésion, il est préférable qu’il le fasse à la toute fin d’un trimestre afin de pouvoir réclamer les forfaits pour le trimestre en question et d’avoir droit au traitement prévu.

C’est dire que lors de la première année civile d’application et lorsque le médecin ou le GMF adhère en cours de trimestre, le comportement du médecin de juin à décembre ou pendant le trimestre d’adhésion et les trimestres subséquents peut influencer le versement du supplément pour le volume de patients inscrits pour les périodes antérieures à l’adhésion durant la même année civile. Il ne s’agit pas d’un passe-droit pour l’ensemble de l’année.

Retrait de la lettre d’entente 368

L’évaluation du taux d’assiduité est radicalement différente selon que le médecin ou le GMF adhère ou non. De plus, la facturation de forfaits sert de marqueur à la RAMQ pour trouver les médecins adhérents. Si le médecin a facturé au moins un forfait par trimestre, la RAMQ le traite comme s’il avait respecté son engagement. Le médecin ou le GMF qui veut mettre fin à son adhésion doit alors en informer la RAMQ à l’aide d’un formulaire. La RAMQ ne déduira pas, de l’absence de facturation de forfaits, que le médecin n’adhère plus à la mesure. Au contraire, le médecin qui a réclamé des forfaits de la lettre d’entente par le passé et qui cesse d’en facturer sera traité comme s’il ne respectait pas ses engagements, et le supplément pour le volume de patients inscrits ne lui sera pas versé pour le trimestre en cause. Il est donc important d’informer la RAMQ de tout désistement afin qu’elle évalue votre droit aux suppléments pour le volume de patients inscrits selon le taux d’assiduité. De plus, du fait de ces contraintes, le médecin ou le GMF qui, après l’adhésion et le désistement, veut de nouveau adhérer à une des modalités de la lettre d’entente 368 devra remplir un formulaire de réengagement.

Effet du retrait de la lettre d’entente 368 d’un des membres d’un GMF

Nous avons vu que le droit au supplément pour le volume de patients inscrits est évalué individuellement. L’évaluation du respect d’un GMF à honorer ses engagements envers le programme GMF se fait soit par le taux d’assiduité de groupe (aucune médecin n’a adhéré à la lettre d’entente 368 durant le trimestre en question), soit selon les règles de la lettre d’entente 368 (lorsque l’ensemble des médecins adhèrent à la mesure et que le groupe atteint ses cibles). Si le groupe y adhère, mais qu’un des médecins n’adhère à aucune des mesures, le groupe sera considéré comme n’ayant pas atteint son taux d’assiduité ; la RAMQ ne regardera pas le taux réel calculé. Le cas d’un tel GMF devra être traité en comité paritaire.

Les parties négociantes veulent que ces modalités continuent de s’appliquer au médecin en invalidité ou en congé de maternité, tout comme à leur groupe. Toutefois, les règles de validation du respect des engagements (obligation de facturer au moins un forfait le dernier jour du trimestre pour signaler son atteinte des cibles) et les contraintes quant à la possibilité de réclamer des services durant ces périodes (impossibilité de facturer des services durant la période de perception d’allocations) posent problème. Le mécanisme pour donner suite aux volontés des parties n’était pas établi au moment de la rédaction. Des informations suivront sous peu.

Espérons que ces informations vous éviteront des surprises et vous inciteront à participer à ces mesures importantes pour favoriser l’accès de la clientèle orpheline aux soins. Bonne facturation ! //