Le mécanisme de dépannage peine à suffire à la demande, et certains milieux dans le besoin s’en voient refuser l’accès. D’autres milieux ont de la difficulté à recruter des médecins dépanneurs à la hauteur des autorisations accordées. Enfin, certains milieux ne sont pas admissibles au dépannage, mais ont quand même des besoins et aimeraient pouvoir compter sur de l’aide extérieure. Il y a une solution de rechange au dépannage, mais son fonctionnement doit être bien compris pour éviter des surprises aux utilisateurs. Traitons-en !
Le Dr Michel Desrosiers, omnipraticien et avocat, est directeur des Affaires professionnelles à la FMOQ. |
D’abord, une mise en garde ! Certains milieux se font refuser l’accès au dépannage, mais sollicitent tout de même des médecins pour venir faire du « dépannage ». Comme ils ne sont pas autorisés à faire appel au mécanisme de dépannage de l’Entente, les modalités spécifiques qui le régissent ne s’appliquent pas. Par exemple, l’accès à un forfait quotidien de neuf heures à tarif horaire pour le dépannage en obstétrique ne peut être réclamé, pas plus que le forfait quotidien plus un pourcentage de l’acte pour l’hospitalisation, à moins que le milieu n’adhère à l’Entente particulière–Malade admis. Le médecin qui se rend dans ces milieux pour prêter main-forte devra donc facturer à l’acte à 100 %, sauf exception.
L’autre surprise réservée aux « dépanneurs exclusifs » (médecins qui doivent consacrer au moins 95 % de leurs jours d’activité au mécanisme de dépannage) est que ce genre d’assistance compte pour une activité hors dépannage. Un médecin qui a un volume important de ce type d’activité peut donc ne pas respecter les exigences de la dérogation qui lui tient lieu d’avis de conformité. Par conséquent, il doit toujours s’assurer que le milieu qui sollicite son aide se trouve sur la liste des établissements qui ont accès au dépannage et obtenir du Centre national Médecins-Québec une autorisation pour la semaine ou les quarts de dépannage.
L’autre enjeu par rapport au dépannage est la rémunération du temps de déplacement des médecins vers le milieu où ils font du dépannage et le remboursement de leurs frais de déplacement. Lorsque vient le temps de demander à des médecins de prêter main-forte, plus la distance pour se rendre dans le milieu est grande, plus l’absence de compensation pour le déplacement crée un obstacle à être charitable. Pour les milieux qui ne bénéficient pas du dépannage, la lettre d’entente 285 adoucit quelque peu cet obstacle en prévoyant une rémunération pour le temps de déplacement des médecins qui s’y rendent ainsi que le remboursement des frais de déplacement et de séjour par l’établissement.
L’autre avantage de cette lettre d’entente est que son accès n’est pas limité aux seuls secteurs visés par le dépannage. Un établissement peut donc s’en servir pour obtenir de l’aide en CLSC (maintien à domicile et même service de consultation sans rendez-vous ou services courants), en CHSLD, voire en centre de réadaptation, en plus de l’urgence, de l’hospitalisation ou de l’obstétrique.
Mais il ne s’agit pas d’une voie parallèle au dépannage. Hormis le fait qu’il n’y a pas de rémunération forfaitaire pour les activités dans le cadre de cette lettre d’entente, il y a une autre grande distinction avec le dépannage : seuls les médecins de la région sociosanitaire en cause peuvent s’en prévaloir. C’est ce qui explique le nom des ententes précédentes qui ont été consolidées en une seule, soit la Lettre d’entente 285 : desserte intrarégionale.
L’établissement responsable d’une installation où existe un besoin doit d’abord s’adresser au DRMG qui s’assure qu’il y a pénurie d’effectifs et recommande au comité paritaire un nombre de semaines de désignation dans le ou les secteurs visés par la demande. En fonction de ces renseignements, le comité paritaire fixe une banque d’heures pour les déplacements et en informe le DRMG et la RAMQ.
Comme nous l’avons vu, un médecin qui souhaite se prévaloir des modalités de la lettre d’entente doit respecter certaines conditions. Comme il doit être désigné par le DRMG, il doit répondre à certaines exigences. En gros, il doit résider à plus de 40 kilomètres du lieu désigné, il ne doit pas réduire ses activités dans son milieu d’attache et doit effectuer au moins 75 % de toutes ses activités dans un « lieu de pratique principal » situé dans la région sociosanitaire.
Un médecin exerçant à Montréal ne peut donc pas se prévaloir de cette lettre d’entente pour donner un coup de main en Montérégie, par exemple. Un dépanneur exclusif ne pourrait pas s’en servir non plus pour aller dans un milieu en besoin qui n’est pas désigné pour le dépannage provincial. Un médecin de la région des Laurentides qui fait principalement du dépannage ne pourrait pas plus y avoir recours pour aider une installation des Laurentides qui se serait fait refuser l’accès au dépannage ou qui dépasse le quota de dépannage qui lui a été accordé.
Bref, cette lettre d’entente compense le refus de désignation au dépannage, tant que les médecins appelés en renfort exercent déjà dans la région et que leur aide est complémentaire à leur pratique dans la région. Elle ne permet pas à une région de puiser dans les effectifs médicaux d’une autre région.
Enfin, le médecin désigné ne doit pas déjà exercer dans le milieu. Un médecin qui habite Montréal et dont le lieu de pratique régulier est dans les Laurentides ou en Montérégie ne peut pas être désigné dans le cadre de cette lettre d’entente pour se rendre dans son milieu habituel de travail. Il ne s’agit pas d’une mesure incitative pour atténuer l’effet du déplacement requis sur la rétention des médecins existants.
Le médecin admissible qui se prévaut de cette lettre d’entente facture à tarif horaire (demande de paiement 1215) le temps de déplacement entre sa résidence ou son lieu principal de pratique et l’installation désignée. Les demandes de paiement pour le temps de déplacement doivent être contresignées par le chef du DRMG. Voyez l’avis de la RAMQ qui suit le paragraphe 7 de la lettre d’entente pour les instructions spécifiques de facturation. En cohérence avec les autres règles, le temps de déplacement rémunéré se limite à celui effectué au sein de la région sociosanitaire. Pour le remboursement du kilométrage et des frais de séjour dans la région, le médecin doit se tourner vers l’établissement. L’ensemble de ces sommes sont exclues du calcul du plafond trimestriel.
Dans les régions visées par l’Annexe XII, il y a une différence additionnelle entre dépannage et desserte. Les activités effectuées dans le cadre du dépannage sont traitées comme l’ayant été en dehors des régions de l’Annexe XII, même lorsque le dépannage se fait dans une région désignée. Pour le médecin qui fait beaucoup de dépannage, ce volet de sa pratique peut faire tomber la proportion de ses jours de pratique en région sous la barre des 75 %. Il peut alors perdre certains des avantages liés à sa pratique principale en région. Nous en avons déjà parlé dans la chronique Question de bonne entente de janvier 2004 qui est encore pertinente aujourd’hui.
La lettre d’entente 285 n’a pas cette conséquence. Aux fins de l’Annexe XII, les activités sont comptabilisées en fonction du lieu où elles sont effectuées. La lettre d’entente 285 peut donc constituer un moyen pour le médecin d’aider les milieux voisins dans sa région, sans toucher à sa pratique principale.
Espérons que ces informations vous éviteront des surprises et réduiront vos objections à prêter main-forte à un milieu voisin en besoin de façon complémentaire à vos activités existantes. Le mois prochain, nous traiterons de la facturation à distance dans le cadre des visites à domicile. D’ici là, bonne facturation ! //