Renouvellement de l'entente et nouveau modèle d'organisation des soins
Le Dr Marc-André Amyot, président de la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec (FMOQ), a commencé sa tournée annuelle de la province par Val-d’Or, le 7 septembre. L’un des sujets de l’heure : le renouvellement de l’accord-cadre, échu depuis le 1er avril 2023.
Les négociations ont réellement commencé le 27 août. Le gouvernement a alors déposé une première offre dans laquelle il indiquait vouloir « optimiser » l’utilisation de l’enveloppe budgétaire des omnipraticiens. La Fédération, pour sa part, remettra son cahier des demandes au cours des prochaines semaines.
« Ce cahier a été élaboré après de multiples consultations. Nous avons répertorié toutes les demandes formulées par les différents comités de la FMOQ, les médecins et les associations affiliées », a spécifié le président aux quarante-quatre membres de l’Association des médecins omnipraticiens du nord-ouest du Québec (AMONOQ) présents en personne ou en visioconférence. Le document contient, notamment, une demande d’augmentation du tarif horaire des médecins de famille.
Le cahier des demandes comporte cinq axes :
Le mode actuel d’organisation des soins de première ligne doit être revu. Il manque 1500 médecins de famille au Québec. Les besoins augmentent. Comment offrir des soins à toute la population ?
« Tous les patients n’ont pas besoin de suivi ou d’un médecin de famille. Cependant, tous ont besoin d’avoir accès à des soins et, si c’est nécessaire, à un médecin de famille », a expliqué le Dr Amyot. La Fédération ne souhaite par ailleurs pas éliminer le suivi à long terme. « Jamais nous n’allons remettre en question la nécessité d’une prise en charge longitudinale pour certains patients. »
La FMOQ désire avoir l’avis de ses membres sur son nouveau modèle de soins. « C’est vous qui traitez les patients, c’est vous qui allez nous dire quelle est la meilleure formule. Nous voudrions que vous regardiez comment aborder l’accès aux soins pour les patients qui n’ont pas de médecin de famille. L’objectif de l’inscription collective était de répondre à ce problème. C’était de réserver aux médecins de famille les cas qui nécessitent leur expertise. »
Dans sa réflexion, la Fédération est accompagnée par un spécialiste des politiques de santé, le professeur Jean-Louis Denis, de l’Université de Toronto. Une de ses étudiantes au doctorat, dont le milieu d'accueil est la Fédération, poursuit ses travaux de recherche sur les différents modèles d'organisation de soins dans le monde.
« On a remarqué, quand on a analysé les divers systèmes de soins, que les plus performants ont certaines caractéristiques. D’abord, le travail y est effectué en interprofessionnalisme. C’est un trait de notre système, mais il faut l’accentuer. Ensuite, il y a l’intégration des soins. On doit éviter de travailler en silo. Il faut que les professionnels se parlent, que les dossiers soient transférables. Vous devez savoir ce que les intervenants du CLSC font et, eux, ce que vous faites. Comment y arriver ? », a demandé le président.
Avec un nouveau modèle d’organisation des soins doit venir un nouveau mode de rémunération. « Si les médecins de famille traitent les cas les plus complexes et laissent les plus légers aux autres professionnels de la santé, la rétribution à l’acte sera moins adaptée, a mentionné le Dr Amyot. Quel doit alors être le modèle de rémunération ? La capitation ? Un système mixte ? Le modèle de la Colombie-Britannique ? Celui de l’Île-du-Prince-Édouard ? Plusieurs provinces canadiennes ont revu leur modèle d’organisation et de rémunération. »
La répartition des effectifs médicaux au Québec est une question cruciale pour une région comme l’Abitibi-Témiscamingue. Il y a plus d’un an, la FMOQ a proposé au gouvernement vingt-quatre mesures pour améliorer la distribution des médecins de famille.
L’une des propositions : « garantir un contingent de candidats en médecine en provenance de régions désignées par les parties ». « C’est la seule mesure qui a été étudiée et pour laquelle on a montré un effet sur le retour et l’installation en région. Elle a été mise en application. Avant, les universités accordaient 0,5 de plus à la cote R des étudiants des régions, maintenant elles ajoutent, ou vont ajouter, 1 de plus. »
Les mesures présentées par la FMOQ comprennent également la création de plus d’unités d’enseignement en région afin d’y offrir toutes les étapes de la formation. Elles incluent aussi des incitatifs pour maintenir le lien entre l’étudiant et sa région d’origine et favoriser son retour. « Pourquoi ne pas augmenter le montant de ces bourses ? », a suggéré le président. La FMOQ et le gouvernement ont par ailleurs l’intention de mettre en place un chantier sur les vingt-quatre mesures proposées.
Le nord-ouest du Québec a effectivement besoin de solutions. L’année a été difficile, a reconnu devant ses membres le Dr Jean-François Verville, président de l’AMONOQ. Il y a eu la réduction du recours aux agences de placement de personnel et la baisse de services hospitaliers pendant l’été. Le recrutement de jeunes médecins a été décevant, et les retraites ont été nombreuses. « On vit ce qui se passe dans le reste de la province : une diminution du nombre de médecins de famille. Mais nous, nous sommes touchés depuis cinq ans », a mentionné le président.
Comment améliorer la situation ? Avec le début des négociations pour le nouvel accord-cadre, l’AMONOQ a plusieurs demandes. D’abord, la mise à jour de l’Annexe XII, qui comporte diverses majorations pour les territoires désignés. « Il faudrait rétablir l’abolition de la différence de tarifs entre le cabinet et l’établissement que l’on trouvait dans la première entente sur l’accès aux soins », a précisé le Dr Verville. Il serait également souhaitable d’éliminer la nécessité pour les omnipraticiens d’être membres du conseil des médecins, dentistes et pharmaciens pour avoir droit à une rémunération plus élevée. « Cette obligation constitue une contrainte supplémentaire pour les jeunes médecins, déjà soumis aux activités médicales particulières. Elle pèse lourd dans le choix de leur lieu de pratique », affirme le président.
Par ailleurs, le mécanisme de dépannage doit être amélioré. Bien des hôpitaux en dépendent. À Ville-Marie, par exemple, les médecins dépanneurs couvrent le tiers des quarts de travail à l’urgence et la moitié des quarts pour les soins aux patients hospitalisés. « Ce mécanisme a été créé pour des situations ponctuelles. Il faudrait qu’il soit organisé différemment et plus facilement accessible », a affirmé le président. Et l’équipe volante du gouvernement ? « On ne l’a pas vue ».