les réponses à vos questions les plus fréquentes
Au cours des trois dernières années, nous avons suivi de près la mise en œuvre des dossiers médicaux électroniques (DME). Nous avons répondu à plusieurs de vos questions concernant le Programme québécois d’adoption des dossiers médicaux électroniques (PQADME) et les autres sujets qui y sont associés dans la pratique médicale. Dans cet article, nous ferons état des questions les plus fréquentes que vous avez soumises à notre attention.
Me Christiane Larouche, avocate, travaille au Service juridique de la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec. |
Le PQADME devrait poursuivre son existence sous une nouvelle forme à être déterminée par les parties négociantes. Cependant, les médecins qui ont adhéré au PQADME avant juillet 2016 continueront de bénéficier des modalités actuelles jusqu’à la fin du cycle de quatre ans. Si, par exemple, vous avez adhéré au PQADME en octobre 2013, vous pourrez vous prévaloir du programme dans sa forme actuelle jusqu’en octobre 2017.
Dans le cadre du PQADME, vous ne pouvez réclamer que les sommes réellement dépensées pour l’informatisation de votre milieu. Le PQADME est un programme de remboursement, et non de financement sous forme d’avance ou de subvention globale. En conséquence, vous devez toujours avoir une facture appuyant les coûts réclamés au PQADME.
Le médecin responsable qui réclame des dépenses communes pour un groupe agit comme mandataire pour les médecins de ce groupe. À ce titre, il doit faire preuve de prudence, de diligence, d’honnêteté et de loyauté (article 2138, Code civil du Québec). Il devrait aviser ses collègues des réclamations au PQADME et des remboursements effectués ainsi que des dépenses imputées à l’enveloppe GMF, le cas échéant. Ces informations doivent d’ailleurs être remises à chaque médecin annuellement aux fins de fiscalité. Une demande de remboursement au PQADME pour des frais non engagés par la clinique serait fautive.
L’entente entre les médecins d’un groupe participant au PQADME devrait faire état des droits et des obligations de chaque membre concernant l’informatisation de son milieu. Elle devrait prévoir les modalités d’affectation des sommes reçues du PQADME au sein du groupe. L’entente FMOQ – MSSS sur le PQADME impose aux médecins participants de conclure une telle entente entre eux.
Il y a lieu de remédier à cette situation sans délai pour éviter de la confusion ou des conflits, particulièrement lors du départ d’un médecin de la clinique. Malheureusement, il semble que plusieurs médecins n’aient pas signé d’entente ou, lorsqu’ils l’ont fait, ne se souviennent pas du contenu de leur entente et n’en ont pas conservé de copie après signature.
La clinique et ses propriétaires ne peuvent pas exiger le partage de l’ensemble des subventions reçues du PQADME sans entente préalable avec les médecins participants au PQADME. Bien que les subventions soient attribuées sur une base individuelle, rappelons que l’objectif du PQADME est de permettre l’informatisation de toute une clinique. Il est donc raisonnable et souhaitable de mettre en commun certaines sommes reçues du PQADME.
L’entente devrait stipuler des modalités claires concernant l’attribution de l’ensemble des sommes reçues dans le cadre du PQADME, soit pour les équipements, les frais accessoires, les frais de câblage, les frais de mise en œuvre, les frais d’acquisition et d’opération des licences, les forfaits de participation au PQADME et les sommes dévolues à la gestion du changement.
L’entente devrait de plus faire état des modalités particulières sur les sujets suivants :
h description et propriété d’équipements ;
h nombre de modalités d’utilisation des licences ;
h arrivée et départ des médecins au sein de la clinique ;
h contrat avec le fournisseur de DME ;
h bilan des dépenses et des demandes de remboursement au PQADME.
Un canevas d’entente est mis à votre disposition sur le site Internet de la FMOQ dans la section du PQADME.
La responsabilité du médecin est déterminée par le contenu des diverses ententes signées par lui ou en son nom, soit le contrat avec le fournisseur de DME, l’entente entre les médecins du groupe ou l’entente entre le médecin et sa clinique.
Le GMF, qu’il soit privé ou public, doit obligatoirement choisir un CSA pour assurer la conformité des équipements et du réseau. Comme l’établissement doit offrir une infrastructure technologique indépendante que seul le GMF utilisera, des coûts particuliers sont engagés. Le financement du GMF vise à assumer une part de ceux-ci.
Vos appels nous indiquent que les CSA réclament souvent des coûts exagérés. Le rôle des CSA est de fournir un service de première ligne pour le soutien, la mise à jour et l’entretien des parcs informatiques. En GMF, le CSA doit également veiller à ce que les exigences informatiques imposées par le ministère de la Santé et des Services sociaux pour les GMF publics ou privés soient respectées1. Les services des CSA peuvent être regroupés en deux grandes catégories :
h les services fixes (mise à jour et entretien) et ;
h les services variables (soutien selon les besoins).
Il serait donc possible de tarifer différemment ces deux types de services. Chose certaine, il faut bien se renseigner, comparer les tarifs en vigueur, obtenir des soumissions détaillées afin de négocier un contrat qui répondra à vos besoins. En GMF public, il faut convenir à l’avance des coûts anticipés même si les médecins n’ont pas à signer de contrat.
Nous comprenons que plusieurs d’entre vous ont rencontré des difficultés à cet égard. Comme le DME n’est pas un contrat d’adhésion, vous ne devriez pas être contraints de signer un « modèle » ne laissant aucune place à la discussion et à la négociation.
Nous vous encourageons à prendre connaissance des articles à ce sujet dans Le Médecin du Québec2,3 et dans le Guide sur les dossiers électroniques de l’Association canadienne de protection médicale4. La FMOQ a également adapté un gabarit de contrat créé par le MSSS pour les DME en établissement et préparé une liste des éléments essentiels d’un contrat avec un fournisseur de DME5.
Les contrats avec les fournisseurs de DME sont souvent complexes et difficiles à comprendre pour certains. Nous vous incitons donc fortement à consulter un conseiller juridique si vous éprouvez des problèmes à comprendre le contrat de DME ou ne parvenez pas à en négocier les modalités. Le coût de ces services pourrait être partagé par les médecins de votre groupe. Il s’agira d’un investissement modeste qui pourrait vous épargner bien des soucis.
Vous devrez communiquer immédiatement avec votre fournisseur de DME pour l’informer de la situation et l’enjoindre de trouver la source de la défaillance. Vous devez de plus consigner l’incident par écrit et en assurer le suivi avec diligence. Enfin, une note devrait être ajoutée au dossier de tout patient pour faire état de l’erreur découverte.
Le médecin doit avoir un accès ininterrompu aux renseignements contenus dans les dossiers électroniques de ses patients pour satisfaire à ses obligations déontologiques et légales. Un fournisseur ne devrait en aucune circonstance empêcher le respect de cette obligation ; et le contrat devra être clair à cet effet. Très souvent, le fournisseur s’oppose à la remise des données au motif que le médecin n’a pas honoré ses obligations de paiement. Le contrat ne devrait pas permettre cette possibilité et devrait garantir la remise de données sur simple demande du médecin, sous réserve des recours que le fournisseur pourrait avoir contre le médecin bien entendu.
Le délai ne devrait jamais excéder vingt jours et devrait être indiqué dans le contrat.
Nous croyons que les données devraient être remises sans frais et encourageons les médecins à convenir d’une telle modalité avec les fournisseurs.
Le processus d’homologation des DME, devenu plus récemment un processus de certification, a pour but d’assurer la conformité d’une version d’un DME à certains critères de qualité et de sécurité minimaux imposés par le MSSS. Ce n’est toutefois pas une garantie que les DME seront sans failles ou qu’ils seront utilisés conformément au cadre légal et déontologique. Le médecin doit donc en tout temps prioriser la sécurité et la qualité du DME. Il doit mettre en place des mesures et procédures de contrôle de la sécurité et des accès. Il doit agir sans délai s’il constate une défectuosité ou un accès non autorisé au DME.
Nous croyons que les données du DME ne devraient pas être consultées ni utilisées par les fournisseurs de DME autrement que pour en donner l’accès aux médecins. Que ces données soient anonymisées ou agrégées ne change rien à nos craintes quant à l’utilisation secondaire des données par les fournisseurs. Les contrats de DME ne devraient donc pas permettre aux fournisseurs de se servir des données des DME à des fins commerciales.
Comme le médecin a le devoir d’assurer la confidentialité des renseignements personnels et confidentiels de ses patients et d’en protéger l’accès, il doit être vigilant lors de l’introduction de toute nouvelle fonctionnalité dans le DME. Il doit notamment se poser les questions suivantes :
h Quelle est la raison d’être de cette nouvelle fonctionnalité ? A-t-elle pour objet de faciliter le suivi médical de mes patients et sert-elle véritablement leurs intérêts ?
h Ai-je été adéquatement informé de sa raison d’être et de son fonctionnement ?
h Cette fonctionnalité permet-elle à des tiers ou à des personnes qui ne participent pas aux soins prodigués aux patients d’accéder à des renseignements du DME, de les utiliser ou de les conserver ? Si oui, à quels renseignements ont-ils accès, à quelles fins et selon quelles modalités ?
h Ai-je obtenu un consentement explicite de mes patients pour la communication de ces renseignements à des tiers ? S’agit-il d’un consentement explicite, libre et éclairé ?
En bref, vos questions révèlent quelques-unes des difficultés auxquelles certains d’entre vous ont été confrontés. La protection de la confidentialité et de l’accès aux DME sont des enjeux dont nous reparlerons sans aucun doute au cours des prochains mois, voire des prochaines années. Maintenant que les DME font enfin partie de la pratique médicale, tout le monde veut y avoir accès. Il devient donc pressant d’en établir clairement les limites et les modalités d’accès. //
1. Ministère de la Santé et des Services sociaux du Québec. L’informatisation des groupes de médecine de famille. Exigences informatiques. Québec : le Ministère ; 2014. 27p.
2. Larouche C. Les ententes avec les fournisseurs de DME points de réflexion avant de signer. Le Médecin du Québec 2013 ; 48 (3) : 91-3.
3. Dulude S. Le fournisseur de solution DME un partenaire d’affaires. Le Médecin du Québec 2014 ; 49 (1) : 70-2.
4. L’Association canadienne de protection médicale. Guide sur les dossiers électroniques. Ottawa : ACPM ; 2014. 70p.