À la suite du vif succès qu’a remporté, en mars dernier, la conférence sur le modèle scandinave auprès de vos collègues, nous publions ici son résumé et vous invitons à la visionner sur le portail en ligne CyberStudio (cyberstudio.fondsfmoq.com).
Depuis quelques années, on observe un retour en vogue du modèle scandinave. En effet, la Suède, le Danemark et la Finlande caracolent en tête de très nombreux indicateurs internationaux de performance économique et sociale. La réussite de la Suède est si impressionnante que le World Economic Forum, qui organise annuellement le forum de Davos en Suisse, a publié en 2018 une analyse intitulée « Pourquoi la Suède surpasse-t-elle tous les autres pays dans à peu près tous les domaines ? ».
La Suède, comme généralement tous les autres pays nordiques, se classe en effet parmi les meilleurs au monde dans de nombreux domaines. Avec Stockholm comme centre de gravité du miracle technologique scandinave, la Suède se trouve au sommet des palmarès en matière de climat pour les affaires, l’innovation et la technologie.
La Suède se classe première au monde pour sa capacité à créer des marques de commerce mondiales, comme IKEA, H&M, Electrolux, Ericsson ou Spotify. Champions dans le domaine numérique, les Suédois apprennent la programmation dès le primaire et sont parmi les plus grands utilisateurs de paiements électroniques. Il est même proposé d’éliminer, d’ici quelques années, la circulation des billets.
Au-delà de la performance économique, il y a aussi la performance sociale. La Suède compte parmi les meilleurs pays au monde pour la place des femmes, des enfants et des aînées dans la société. Les politiques familiales suédoises, qui ont beaucoup inspiré le Québec, et l’éducation de qualité font en sorte que le taux d’emploi des femmes demeure parmi les plus élevés au monde.
La population bénéficie d’un système de retraite et des soins aux personnes âgées de très grande qualité. Leur système de santé se classe 6e mondialement selon le Legatum Institute. Le pays détient la palme en matière de lutte contre le changement climatique et de protection de l’environnement.
Dans les années 1990, les pays scandinaves étaient plongés dans une crise profonde. Comment avaient-ils réussi à se réinventer pour se propulser à nouveau au sommet des classements internationaux ?
En 2019, les pays scandinaves forment un groupe d’économies dont le PIB par habitant dépasse considérablement la moyenne de l’OCDE. Leur taux d’emploi, c’est-à-dire le pourcentage de personnes âgées de 16 à 65 ans qui occupent un emploi, se situe, une fois de plus, parmi les plus élevés des pays de l’OCDE. Leur productivité par heure travaillée est supérieure à celle du Canada, du Québec, de la France, mais aussi des États-Unis ou de la Grande-Bretagne. Étonnamment, ils sont plus ouverts à la mondialisation que les États-Unis ou le Canada vu le volume de leurs exportations et importations par rapport à la taille de leur économie.
Les pays scandinaves possèdent d’excellentes cotes de crédit auprès des agences de notation qui évaluent la situation budgétaire des gouvernements. Toutes proportions gardées, leur dette publique est presque deux fois inférieure à celle des États-Unis ou du Canada. Finalement, les inégalités sociales dans les pays scandinaves sont moins prononcées qu’aux États-Unis, au Canada ou au Québec ; ils affichent aussi des taux de pauvreté plus bas, entre autres, chez les aînées et les jeunes.
Le rebond du modèle scandinave ne cesse d’étonner, car il y a 25 ans la majorité des analystes pensaient que ces pays peineraient à confronter la mondialisation et la croissance de la compétition mondiale en raison de leurs très forts taux de taxation, leurs dépenses sociales élevées, leur taux de syndicalisation (qui oscille autour de 70 % actuellement en Suède, au Danemark et en Finlande), sans parler des politiques d’égalité entre les hommes et les femmes et leurs normes environnementales élevées.
Pour certains l’explication de la réussite passe par l’éducation. Les pays scandinaves ont-ils plus de diplômés universitaires que le Québec ? Dans les faits, non. Le taux de diplomation universitaire de la population active (personnes âgées de 25 à 64 ans) demeure très similaire : 25 % au Danemark, 23 % en Suède et de 20 % en Finlande contre 23 % au Québec.
Selon les résultats des tests PISA de l’OCDE, une grande enquête menée tous les trois ans auprès des jeunes de 15 ans, le Québec surclasse la Suède et le Danemark pour se comparer au pays devenu la référence mondiale en la matière : la Finlande.
Le Québec livre une performance enviable en mathématiques où il devance même la Suède, le Danemark et la Finlande ; il excelle en lecture où il n’est dépassé que par la Finlande. On observe toutefois un fort déclin en sciences depuis 2000. En effet, alors que le Québec était au 3e rang mondial en 2000, il se classe 24e en 2013. La Finlande pour sa part est passée de la 2e à la 5e position pendant la même période (tableau). À noter que nous avons exclu les chiffres de 2016, car les écoles publiques québécoises ont décidé de boycotter l’exercice, ce qui a rendu les résultats du Québec encore meilleurs. Ce faisant, elles ont fait la démonstration de l’excellence des écoles privées…
Est-ce qu’une part de la différence pourrait également s’expliquer par la fiscalité ? Comme on s’en doute, les pays scandinaves taxent plus que la moyenne des pays de l’OCDE, plus que la moyenne des pays du G7, plus que les États-Unis, le Canda ou le Québec. Seule la France a un taux de pression fiscale (46,2 %) supérieur au Danemark (46 %) ; il est de 44 % en Suède, de 43,3 % en Finlande contre 37,3 % au Québec, 33 % au Canada et 27,1 % aux États-Unis.
Il est difficile cependant de parler de « fiscalité scandinave » tant les différences entre les pays sont importantes. En matière d’impôt sur le revenu, le Danemark est le pays de l’OCDE qui impose le plus ses citoyens. Le Québec se classe deuxième, devant la Suède et la Finlande.
Lorsqu’on compare les taxes sur les biens et services (comme la TPS et la TVQ), les pays scandinaves taxent plus que le Québec (en moyenne 25 % contre moins de 15 % au Québec).
Finalement, la part de l’impôt des sociétés dans les prélèvements totaux s’élève à 14,1 % au Québec, alors qu’il est de 17,4 % en Suède et de seulement 6,3 % au Danemark et en Finlande.
Le domaine dans lequel le Québec accuse du retard par rapport aux pays scandinaves est bien celui de l’innovation, de la recherche et du développement. Classé pourtant 5e au monde en 2016 pour l’investissement en recherche et développement, le Québec fait globalement mieux que le Canada et dépasse la moyenne des pays de l’OCDE. Il est devancé par le Japon, l’Allemagne, mais également la Suède. Sur une longue période, le Québec se place généralement derrière les pays scandinaves.
La provenance de cet investissement diverge pourtant : l’investissement privé en recherche et développement représente 60 % au Québec ; ce taux est de 70 % en Finlande et de 74 % en Suède. En clair, le Québec dépend plus des fonds publics dans ce secteur que les pays scandinaves.
Portés sur l’innovation, les pays scandinaves déposent plus de brevets triadiques par habitant que le Québec, le Canada, les États-Unis, l’Allemagne ou la France. Ce terme désigne un ensemble de brevets déposés en même temps dans plusieurs offices de brevets (souvent l’Union européenne, le Japon et les États-Unis) pour protéger une invention à fort potentiel de mise en marché. Sur ce plan, le Québec pourrait manifestement tirer des leçons. //
Note de la rédaction. Ce texte a été écrit, révisé et mis en pages par Conseil et Investissement Fonds FMOQ inc. et ses mandataires. Il n’engage que ses auteurs.