Un survivant du cancer n’est pas un patient comme les autres. Quand il a fini ses traitements, il a besoin que l’on évalue certains symptômes et qu’on lui transmette certaines informations.
Le patient était guéri depuis six ans. Tous les résultats des tests étaient négatifs. Cependant, quand il arrive au cabinet de la Dre Geneviève Chaput, médecin de famille au Centre universitaire de santé McGill, il est inquiet. Il lui explique qu’il a grimpé des marches en courant et qu’il est devenu essoufflé. « Le cancer est revenu dans les poumons ! », lui déclare-t-il. La réalité n’est toutefois pas aussi dramatique, s’aperçoit l’omnipraticienne, qui constate que son patient n’est tout simplement pas en forme.
« La peur de la récidive chez les patients est très fréquente. Elle touche plus de 80 % des survivants. Et elle ne survient pas seulement à la fin des traitements, explique la clinicienne qui possède une expertise dans les soins de survie au cancer. C’est une angoisse avec laquelle les patients vivent toute leur vie. »
Cette crainte peut nourrir la détresse que bien des survivants du cancer ressentent. Un problème sous-diagnostiqué et sous-traité. « La détresse peut s’exprimer de différentes façons. Il faut s’assurer qu’on la prenne en charge et qu’elle ne se transforme pas en un trouble d’anxiété ou en dépression. Les lignes directrices recommandent de faire remplir au patient, à chaque visite, un questionnaire pour mesurer son degré de détresse. Quand il atteint un niveau trop élevé, on doit absolument faire un dépistage complet d’un trouble de l’humeur. »
Par quoi commence-t-on lorsqu’on prend en charge un survivant du cancer qui vient, par exemple, de terminer ses traitements ? « Il faut évaluer s’il a des effets immédiats attribuables aux traitements. Cela peut être la présence d’une douleur due à l’irradiation ou à une intervention chirurgicale ou encore d’une douleur neuropathique après certains types de chimiothérapie. Généralement, elle va s’estomper », explique la Dre Chaput, qui donne des formations sur les soins de survie auxquelles près de 500 médecins de première ligne ont assisté.
Au cours du suivi, il faut aussi informer le patient. On doit lui parler entre autres de la fatigue. « La majorité des patients en ressentent, et il faut les aider à avoir des attentes réalistes. On peut leur dire : “Vous avez consacré un an à vos traitements pour guérir du cancer. Vous devez vous accorder au moins autant de temps pour récupérer..” »
Le médecin doit également s’assurer que le patient n’éprouve pas trop de problèmes cognitifs. Après avoir terminé tous leurs traitements, plusieurs survivants essayent de retourner au travail, mais ressentent des difficultés à se concentrer ou à parler, cherchent leurs mots.
« Le dysfonctionnement cognitif peut se produire autant avec la radiothérapie qu’avec la chimiothérapie. Dans la majorité des cas, le problème sera temporaire. Toutefois, si on n’en informe pas le patient, il va s’inquiéter. Certaines personnes viennent au cabinet et me disent : ‘‘Je pense que le cancer est revenu, mais au cerveau cette fois parce que je ne suis plus capable de penser comme auparavant’’ », indique l’omnipraticienne.
Au cours de la prise en charge d’un survivant du cancer, il faut également discuter avec lui des facteurs de risque et des saines habitudes de vie, mais aussi de sujets comme la sexualité, l’image corporelle, l’intimité, l’estime de soi. Les patients peuvent être très affectés sur ces plans.
Le clinicien ne doit pas non plus oublier de vérifier l’adhésion des patients à leur traitement de suivi s’ils en ont un. La patiente qui a eu un cancer du sein continue-t-elle à prendre son traitement anti-œstrogénique ? « Si ce n’est pas le cas, pourquoi ? On sait que ce traitement provoque beaucoup d’effets indésirables. Nous devons les maîtriser et donner des outils aux patientes. »
Un programme chargé. « On ne peut pas faire tout cela en une visite. Les lignes directrices recommandent environ quatre consultations la première année », précise la Dre Chaput. //