La nouvelle mesure annoncée en juin bonifiant votre rémunération selon le nombre de patients dont les inscriptions sont actives a relancé les questions sur la façon de déterminer combien de patients a un médecin. Les règles concernant cette mesure sont différentes de celles pour l’accès à la tarification bonifiée et pour la détermination de la clientèle d’un GMF aux fins de financement. Gagneriez-vous à les revoir ?
Le Dr Michel Desrosiers, omnipraticien et avocat, est directeur des Affaires professionnelles à la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec. |
Compter votre clientèle peut paraître simple. Plusieurs logiciels de facturation gardent un historique de vos inscriptions. Cependant, ils ne tiennent pas nécessairement compte des décès ou des déménagements. Le ROSEH est censé vous informer de l’état de vos inscriptions, mais il n’est mis à jour que de façon périodique. Au début de 2019, les données dataient de 2017.
Il est toujours possible de consulter le nombre de patients inscrits du GMF à l’aide des services en ligne. Toutefois, le chiffre indiqué tient parfois compte d’éléments qui faussent les résultats pour l’évaluation visant à déterminer l’accès au supplément selon que vous avez 750 ou 1000 inscrits. Un autre rapport est aussi disponible dans les services en ligne. Il s’agit du « statut actif et inactif de la clientèle ».
D’abord, il faut comprendre que les règles pour cette évaluation diffèrent de celles pour déterminer le nombre de patients donnant droit à la tarification majorée en première ligne. Elles sont aussi différentes des règles donnant droit à une prime annuelle en fonction du volume de patients inscrits.
Selon l’entente particulière sur la prise en charge et le suivi, les inscriptions retenues sont celles donnant droit au versement du forfait annuel d’inscription générale. Les patients en CHSLD « réputés inscrits » en vertu de la lettre d’entente 327 ne sont donc pas comptabilisés. Toutefois, les patients transférés en bloc en vertu de la lettre d’entente 304 sont comptabilisés, même s’ils n’ont pas encore été vus par le nouveau médecin. Il en va de même des patients obtenus en lot du GAMF conformément à la lettre d’entente 321, qui sont comptabilisés même s’ils n’ont pas encore consulté le médecin, tant que ce dernier a confirmé à la RAMQ que les patients l’acceptaient comme médecin. Toutefois, comme le médecin dispose d’un à trois ans pour voir les patients pris selon la lettre d’entente 321, si le fait de compter ces patients a contribué à l’atteinte d’un des deux seuils, la RAMQ fera un contrôle à l’évaluation suivante pour s’assurer que le médecin n’est pas par la suite tombé sous le seuil. Le cas échéant, la RAMQ pourra récupérer le montant versé l’année précédente en tout ou en partie, sauf si le médecin a été en congé de maternité, de paternité ou d’invalidité totale durant une partie de cette deuxième année. Cette modalité ne s’applique pas à l’évaluation du 30 septembre 2019.
Il n’y a pas de mécanisme de dérogation pour cette mesure. |
En plus des inscriptions « vraies », deux autres clientèles sont retenues lorsqu’elles ont fait l’objet de la facturation de certains services au cours des douze mois qui précèdent la date de l’évaluation : 1) les patientes pour lesquelles un supplément pour prise en charge temporaire de grossesse (code 15189) a été facturé et 2) les patients ayant donné lieu à une visite d’évaluation psychiatrique, de prise en charge psychiatrique ou de suivi psychiatrique (dans ce troisième cas, le patient doit avoir eu une visite d’évaluation psychiatrique ou une visite de prise en charge psychiatrique au préalable). C’est donc dire que certains patients pourront être comptés comme inscrits auprès de deux médecins différents.
De façon générale, il n’y a pas de pondération des inscriptions. Que les patients soient suivis dans le cadre du maintien à domicile ou en cabinet, une inscription compte pour une inscription. Contrairement à ce qui prévaut pour l’atteinte des 500 patients donnant droit à la tarification bonifiée en première ligne, il n’y a pas de mécanisme de dérogation pour cette mesure. Le médecin à qui il manque une ou deux inscriptions pour atteindre 750 patients ne recevra tout simplement pas le montant, à moins de bénéficier de la seule forme de pondération prévue (voir la page suivante).
Ce résultat peut sembler sévère, mais il faut être conscient que la cible d’inscription de la population à l’entente sur l’accessibilité (85 % de la population admissible à la RAMQ) ne tient compte d’aucune pondération.
Comme nous l’avons indiqué, les inscriptions retenues sont celles qui donnent lieu au paiement du forfait annuel d’inscription générale. Ces forfaits visent les inscriptions « actives ». Plusieurs se sont interrogés sur les critères appliqués à cet égard. La RAMQ évalue donc le statut d’actif, tant des patients vulnérables que non vulnérables, selon le critère visant ce forfait. Le patient doit donc avoir été vu au cours des 36 mois qui précèdent le 1er janvier de l’année durant laquelle le supplément est versé (donc au cours des 36 mois, moins le jour qui précède la date d’évaluation du 31 décembre. Les règles sont les mêmes pour l’évaluation du 30 septembre 2019, la période de 36 mois commençant trois mois plus tôt.
Les inscriptions retenues sont celles des patients toujours inscrits auprès du médecin et qui ont été vus au cours des 36 mois qui précèdent le 1er janvier de l’année durant laquelle le supplément est versé. |
Malgré le principe voulant que les inscriptions ne soient pas pondérées, il y a trois situations qui peuvent donner lieu à une pondération. D’abord, les patients provenant du GAMF en dehors du cadre de la lettre d’entente 321 et qui ont été inscrits comme vulnérables lors d’une visite au cours des douze mois qui précèdent la date de l’évaluation font l’objet d’une pondération deux pour un. Il en va de même des patients obtenus dans le cadre de la lettre d’entente 321 et qui sont codifiés A, B ou C (il s’agira généralement de patients vulnérables) et dont l’inscription par le médecin a été faite « sans visite » après l’acceptation du patient au cours des douze mois précédant la date d’évaluation. C’est donc dire que de prendre des patients par ces deux voies peut accélérer l’atteinte d’un seuil.
Par la suite, si le médecin compte cinq cents patients inscrits ou considérés comme inscrits ou plus, la RAMQ évalue la proportion de ces patients qui sont vulnérables, en excluant ceux qui ont fait l’objet d’une pondération du fait qu’ils proviennent du GAMF. Si la proportion des patients vulnérables dépasse 40 %, les patients vulnérables excédentaires sont aussi pondérés selon un ratio de deux pour un.
C’est donc dire que le médecin qui contribue à vider le guichet par la lettre d’entente 321 ou par simple attribution du GAMF peut être avantagé par rapport à d’autres médecins, tout comme le médecin dont la clientèle comporte une proportion importante de patients vulnérables.
Reste à traiter des modalités de calcul selon la date d’évaluation. Ce sera le sujet de la chronique de septembre qui, exceptionnellement, sera disponible en ligne en même temps que celle d’août. D’ici là, bonne facturation ! //